Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 26 avril 2000 sous le n° 00MA00886, présentée pour Mme Elisabeth X, demeurant ... par Me COHEN, avocat ;
Mme X demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement, en date du16 mars 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à :
- l'annulation de l'arrêté n° 3789 en date du 23 décembre 1997 par lequel le maire d'Orange a mis fin aux fonctions qu'elle occupait en qualité d'agent contractuel à temps complet à compter du 24 décembre 1997 ;
- l'annulation de l'arrêté n° 3799 en date du 23 décembre 1997 par lequel le maire l'a recrutée en qualité d'agent contractuel à compter du 5 janvier 1998 sur la base d'une durée annuelle d'emploi maximale de 122 jours et d'un horaire mensuel maximal de travail de 70 heures ;
Classement CNIJ : 54-08-01-04-02
36-12-03
C
- ce que la commune d'ORANGE soit condamnée à lui verser la somme de 50.000 F au titre de dommages et intérêts ;
- ce que la commune d'ORANGE soit condamnée à lui verser la somme de 10.000 F au titre de l'article de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
2°/ d'annuler pour excès de pouvoir lesdits arrêtés du 23 décembre 1997 ;
3°/ de condamner la commune d'Orange à lui payer une indemnité de 50 000 F en raison du préjudice qu'elle a subi ; à lui payer la somme de 7 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que, contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, elle a bien intérêt à agir contre les deux décisions ; que c'est à tort que le tribunal ne s'est pas prononcé sur l'ensemble des moyens soulevés à l'appui de sa demande d'annulation des décisions précitées ; qu'il a ainsi omis de statuer sur le défaut de consultation du comité technique paritaire, sur l'incompétence de l'auteur des actes faisant grief et l'absence de motivation des décisions attaquées ; que les juges de premiers ressort ont, en outre, dénaturé le sens de la décision mettant fin à ses fonctions ;qu'ils se sont prononcés non pas sur la légalité de la décision d'abrogation contestée mais sur celle de la décision abrogée alors même que le délai de recours contre ladite décision était expiré ; qu'enfin c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision créatrice de droit du 2 septembre 1997 pouvait être abrogée ou retirée par une décision en date du 23 décembre 1997 ; qu'elle reprend devant la Cour ses différents moyens qui établissent l'illégalité de l'abrogation en litige, que par suite, l'illégalité de cette abrogation qui entraîne celle du nouveau recrutement, constitue une faute de la commune ayant généré un préjudice qu'il convient de réparer ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 novembre 2000, le mémoire en défense présenté pour la commune d'Orange, par Me Lucien LECOEUR, avocat ; la défenderesse conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement attaqué et à la condamnation de la requérante à lui payer la somme de 6.000 F au titre des frais irrépétibles ;
La commune soutient que c'est en stricte application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant statut de la fonction publique territoriale qu'il a été mis fin aux fonctions exercées en qualité de vacataire par Mme X dont la situation a été régularisée par un nouveau recrutement sur un emploi d'agent territorial non titulaire ; que les moyens tirés de la non-consultation du comité technique paritaire, de l'incompétence de l'auteur des actes et du défaut de motivation des décisions attaquées ne sont pas fondés ; qu'il est constant que la situation de vacataire de Mme X telle qu'elle résultait, en dernier lieu, de la décision de recrutement du 2 septembre 1997 était illégale et préjudiciable aux finances de la commune ; que, le délai de recours à son encontre n'étant pas expiré, ladite décision pouvait être légalement abrogée ; que par suite, le préjudice allégué par la requérante et sa demande de frais irrépétibles ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance de clôture d'instruction en date du 23 février 2001 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juillet 2004 :
- le rapport de Mme LORANT, présidente assesseur ;
- les observations de Me COHEN pour Mme X .
- les observations de Me PERDOMO pour la commune d'Orange ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que l'arrêté du 23 décembre 1997 par lequel le maire d'Orange a mis fin aux fonctions de 32 agents contractuels à temps complet à compter du 24 décembre 1997 doit s'analyser comme constituant autant de décisions individuelles que d'agents concernés et doit être regardé comme ayant pour objet de retirer, en ce qui concerne Mme X, l'arrêté en date du 2 septembre 1997 qui la recrutait en qualité d'animatrice vacataire pour la période du 2 septembre 1997 au 3 juillet 1998 pour assurer l'animation des centres de loisirs et aérés avec une rémunération égale au SMIC en fonction des heures effectuées. ;
Considérant que si le maire d'Orange mentionne dans ses écritures avoir pris l'arrêté attaqué à la suite d'une correspondance adressée par une organisation syndicale et pour revenir à une stricte application des textes régissant les personnes recrutées sous ce régime juridique , aucune correspondance demandant expressément l'abrogation de l'arrêté litigieux n'a pu être produite ; que par suite le maire n'était pas tenu de procéder à cette abrogation ; qu'il en résulte que l'ensemble des moyens soulevés par Mme X était opérant et qu'en ne les examinant pas, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité ; que par suite ce jugement doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Marseille ;
Sur la légalité de l'arrêté n° 3789 du 23 décembre 1997 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée, qui abroge une décision individuelle créatrice de droits, ne comporte aucune motivation ; que la circonstance que l'intéressée a été informée au cours d'une réunion des motifs de ladite décision n'est pas de nature à suppléer cette absence ; que par suite cette décision est illégale et ne peut qu'être annulée ;
Sur la légalité de l'arrêté n° 3799 du 23 décembre 1997 :
Considérant que dès lors que par le présent arrêt, la cour annule l'arrêté du 23 décembre 1997, en tant qu'il abroge l'arrêté du 2 septembre 1997 recrutant Mme X, ledit arrêté est remis en vigueur et que par voie de conséquence, Mme X est recevable et fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 23 décembre 1997 la recrutant dans la limite de 70 heures par mois et 122 jours par an ;
Sur les conclusions à fin de dommages et intérêts :
Considérant que l'illégalité fautive commise par la commune est de nature à engager sa responsabilité ; que Mme X demande des dommages et intérêts tant au titre des troubles dans ses conditions d'existence que de la violation des droits qu'elle tiendrait de la décision illégalement abrogée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'arrêté dont s'agit ayant été abrogé illégalement, et devant être regardé comme ayant toujours été en vigueur, Mme X a droit à être indemnisée du préjudice lié à l'interruption de son engagement entre le 24 décembre1997 et le 5 janvier 1998 ; que par ailleurs l'arrêté initial qui recrutait Mme X pour une durée de 10 mois en qualité d'animatrice vacataire pour assurer l'animation des centres de loisirs et aérés pendant leurs périodes d'activité avec une rémunération égale au SMIC en fonction des heures effectuées n'était pas contraire aux dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, dans la limite d'une application conforme auxdites dispositions ; que cette application conforme aurait assuré en tout état de cause une rémunération supérieure à celle résultant de nouvel arrêté la recrutant à compter du 5 janvier 1998 ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice financier et des troubles dans les conditions d'existence résultant de l'abrogation illégalement décidée par le maire d'Orange de la décision en date du 2 septembre 1997 en l'évaluant à 4000 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que la commune d'Orange étant la partie perdante dans la présente instance, ses conclusions présentées de ce chef ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche de la condamner à verser à Mme X une somme de 800 euros au titre des dites dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 16 mars 2000 est annulé.
Article 2 : L'arrêté n° 3789 du 23 décembre 1997 est annulé en ce qu'il abroge l'arrêté du 2 septembre 1997 recrutant Mme X.
Article 3 : L'arrêté n° 3799 du 23 décembre 1997 est annulé.
Article 4 : La commune d'Orange versera à Mme X une somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts.
Article 5 : La commune d'Orange versera à Mme X une somme de 800 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme X est rejeté.
Article 7 : Les conclusions de la commune d'Orange tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, à la commune d'Orange et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
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N° 00MA00886