Vu la requête, enregistrée le 10 février 2003 pour M. et Mme Souad X, élisant domicile ..., par Me Secondi ; M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement n°0000210 du 5 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a condamné le centre hospitalier de Bastia à verser à M. et Mme X une somme de 3.000 euros chacun en réparation de leur préjudice moral résultant du traumatisme causé par la naissance d'un enfant poly mal formé, mis les frais d'expertise à la charge du centre hospitalier de Bastia et rejeté le surplus des conclusions de la requête ;
2°) de payer à chacun des exposants la somme de 22.867,35 euros en réparation du préjudice moral résultant de l'état de Hana, une rente mensuelle de 1.143,37 euros jusqu'au décès de Hana, la somme de 14.244,90 euros en réparation du préjudice personnel de l'enfant au titre du préjudice esthétique et 15.244,90 euros au titre du prétium doloris ;
3°) de condamner le centre hospitalier à leur verser une somme de 1.524,40 euros par application de l'article L. 716-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2005,
- le rapport de M. Marcovici, rapporteur ;
- les observations de Me Demailly, substituant Me Le Prado, pour le centre hospitalier général de Bastia ;
- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X a accouché prématurément le 10 septembre 1996, en Tunisie, d'un enfant poly mal formé, non viable et d'un enfant de sexe féminin, prénommé Hana ; que Hana a présenté après sa naissance des troubles neurologiques invalidants ; que M. et Mme X demandent au centre hospitalier de Bastia qui a suivi la grossesse de Mme X, la réparation de leur préjudice moral résultant de la naissance de l'enfant poly mal formé et des troubles dont est atteint Hana ;
Sur la régularité de l'expertise :
Considérant que si les consorts X font valoir que l'expertise serait irrégulière, cette circonstance, à la supposer établie, ne fait pas obstacle à ce que le rapport d'expertise soit retenu à titre d'élément d'information, dès lors que les consorts X ont pu présenter leurs observations au cours de la procédure écrite qui a suivi le dépôt dudit rapport et que la Cour dispose des éléments d'informations nécessaires à la solution du litige ; que, dès lors, il y a lieu pour la Cour de statuer au fond sans qu'il soit besoin de recourir à une nouvelle expertise ;
Sur le préjudice moral :
Considérant que Mme X présentait une grossesse gémellaire ; qu'elle a été suivie par le service obstétrique du centre hospitalier de Bastia ; qu'à l'issue de sa 14ème semaine de grossesse, elle a subi une échographie qui a décelé une anomalie dans l'évolution d'un des foetus ; que s'il est constant que le choix d'interrompre la grossesse du foetus poly mal formé n'a pas été retenu dans la mesure où il était probable que cette grossesse n'arriverait pas à terme, le centre hospitalier n'apporte pas la preuve que la requérante aurait été complètement informée et notamment de ce que le foetus pouvait se développer jusqu'au terme de la grossesse ; que la requérante relève également que seule la présence du foetus sain lui aurait été confirmée lors de la deuxième échographie du 16 juillet 1996 ; que le défaut d'information au cours de la grossesse est à l'origine d'un préjudice tenant au choc subi à l'accouchement de la venue au monde d'un enfant développé et mort-né ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en fixant à 3.000 euros la somme que le centre hospitalier de Bastia est condamné à verser à chacun des époux X au titre du préjudice moral qu'ils ont subi ;
Sur les troubles dont souffre Hana :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de sa naissance en Tunisie, le 10 septembre 1996, Hana ne présentait aucune anormalité ; que lors de l'examen qu'elle a subi le 13 octobre 1996 dans le service de pédiatrie du centre hospitalier de Bastia, un bon développement saturo-pondéral a été constaté et les examens neurologique et cardiaque étaient normaux ; que le 26 octobre 1996, elle a été hospitalisée pour une bronchio-alvéolite sévère et que son état s'est ensuite dégradé ; que l'origine du syndrome opso-myoclonique, qui a été diagnostiqué en janvier 1998 après une hospitalisation dans un service de neuropédiatrie à Marseille, ne peut être déterminée ; qu'aucun lien de causalité n'est ainsi établi entre le suivi de la grossesse de Mme X et la maladie dont est atteinte Hana ; que les époux X ne sont dès lors pas fondés à rechercher la responsabilité du centre hospitalier de Bastia pour les troubles dont souffre Hana ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces circonstances que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que le Tribunal administratif de Bastia a rejeté la majeure partie de leur demande ; que le centre hospitalier n'est pas fondé à soutenir par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia l'a condamné à verser une somme de 3.000 euros aux époux X ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit à la demande des époux X tendant à la condamnation du centre hospitalier de Bastia au titre des frais non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1 : La requête susvisée de M. et Mme X est rejetée.
Article 2 : L'appel incident du centre hospitalier de Bastia est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Bastia, à M. et Mme Souad X et à la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Corse.
Copie en sera adressée au ministre des solidarités, de la santé et de la famille, au préfet de Corse, à Me Secondi et à Me Le Prado.
N° 0300249 2