Vu la requête , enregistrée le 21 mai 2002, présentée pour la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS, représentée par son maire en exercice, par la SCP d'avocats Treffes, Mielle, Robert ; La COMMUNE DE DIGNE LES BAINS demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01-3389 du 28 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande de M. X, la décision en date du 20 février 2001 par laquelle le maire de DIGNE LES BAINS a décidé d'exercer le droit de préemption de la commune sur un immeuble lui appartenant cadastré Section AK n° 190, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 9 avril 2001 ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
3°) de condamner M. X à lui verser une somme de 1.500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 2005,
- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;
- les observations de Me Dessinges, de la SCP Treffs Mielle Robert, pour la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS ;
- les observations de Me Lombard, de la SCP Trampoglieri-Lombard, pour M. X ;
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS et réitérée en appel :
Considérant que la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS réitère en appel la fin de non-recevoir qu'elle avait invoquée devant les premiers juges et tirée du défaut d'intérêt à agir de M. X ;
Considérant que le droit de préemption, institué par les dispositions de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme, permet aux personnes publiques d'acquérir, dans un but d'intérêt général, un bien immeuble en se substituant à l'acheteur choisi par le vendeur ; que l'utilisation du droit de préemption a pour effet de priver le vendeur du choix de l'acquéreur du bien et entraîne pour le vendeur la soumission à un régime juridique différent quant aux conséquences de la vente ; qu'ainsi, la décision de préemption entraînant des effets sur la situation de fait et de droit du vendeur, ce dernier, a intérêt à contester ladite décision qui lui fait grief, nonobstant le fait que le bénéficiaire du droit de préemption ait acquis le bien aux prix et conditions fixés dans la déclaration d'intention d'aliéner ; que, par suite, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, par le jugement attaqué qui est suffisamment motivé, M. X justifiait, en sa qualité de vendeur du bien préempté, d'un intérêt lui donnant qualité pour contester la décision de préemption en date du 20 février 2001 ; que, dès lors, la fin de non-recevoir susvisée doit être écartée ;
Sur la légalité de la décision de préemption du 20 février 2001 :
Considérant que, pour faire droit à la demande de M. X, le Tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur l'unique moyen tiré du défaut de motivation formelle de la décision contestée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.210-1 du code de l'urbanisme : «Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L.300-1 …/ Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé…./ Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L.211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. Il en est de même lorsque la commune a délibéré pour délimiter des périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité urbaine» ; que l'article L.211-4 vise notamment les immeubles soumis au régime de la copropriété ;
Considérant que la décision de préemption en litige du 20 février 2001, qui concerne trois lots à usage de local commercial, d'appartement et de grenier dont M. X était propriétaire, compris dans un immeuble en copropriété cadastré Section AK n° 190, situé 4 rue de l'Ubac à Digne les Bains, précise en son article 2 qu'elle est prise «en vue d'organiser le maintien de l'activité économique et de permettre la restructuration urbaine dans le cadre du programme de redynamisation du centre ville» ; qu'ainsi que l'ont à bon droit estimé les premiers juges, une telle motivation qui ne précise pas l'objet exact de l'opération que la décision de préemption devait permettre de réaliser, est insuffisante ; que si la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS fait valoir que la référence au programme de redynamisation du centre ville était suffisante dès lors qu'un règlement de consultation pour le réaménagement du centre ancien dans le secteur en cause avait été établi ainsi que l'élaboration d'un schéma d'aménagement du centre ancien, il ressort des pièces du dossier que la décision de préemption ne faisait pas référence explicitement à cette opération particulière ; que la circonstance que ce programme d'aménagement précis était envisagé à la date de la décision de préemption est sans incidence sur l'insuffisante motivation formelle de la décision contestée ; que les justifications produites devant le juge par la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS ne sont pas de nature à régulariser ce vice de forme substantiel qui entache d'illégalité la décision susvisée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 28 février 2002 , le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 20 février 2001 précitée ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS le paiement à M. X de la somme de 1.500 euros au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE DIGNE LES BAINS versera à M. X la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE DIGNE LES BAINS, à M. X et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N° 02MA00898 2