Vu la requête, enregistrée le 19 août 2003, présentée pour la SCI PAGES ET FILS, dont le siège est 23, Bd Président Kennedy, à Beziers (34500), par Me X... ;
La SCI PAGES ET FILS demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9804023 / 9901839 du 26 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 dans les rôles de la commune de Béziers ;
2°) de prononcer la décharge et subsidiairement la réduction des impositions contestées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2006,
- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Bonnet, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le magistrat délégué du Tribunal administratif de Montpellier a jugé que les contraintes urbanistiques pesant sur les constructions assujetties à la taxe foncière n'étaient pas de nature à justifier un abattement sur la valeur locative sur le fondement de l'article 324 AA de l'annexe III dès lors que ces contraintes n'ont pas provoqué une modification des caractéristiques physiques des immeubles ; qu'il a ainsi répondu au moyen du requérant relatif aux conséquences du classement des immeubles non vacants en zone rouge du plan de prévention des risques de la commune sur la valeur locative desdits immeubles ; que si le jugement ne se prononce pas sur les conséquences du classement en zone rouge sur la valeur locative des locaux vacants, d'une part ce moyen est inopérant s'agissant des locaux situé 24, Quai Port Notre Dame qui étaient occupés au cours des années en litige, d'autre part, n'était pas soulevé dans la demande enregistrée au greffe du Tribunal administratif sous le n° 9901839 et qui concerne les locaux situés ... ; que le jugement n'est donc pas entaché de l'omission à statuer reprochée par la société requérante ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que devant la Cour, la S.C.I. PAGES ET FILS demande, à titre principal, la décharge des taxes foncières sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 à raison de l'immeuble situé ..., ainsi que la décharge de la taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 à raison des locaux situés ... ; qu'elle conclut, à titre subsidiaire, à la réduction de l'ensemble des taxes en litige ; qu'elle ne sollicite plus en appel la décharge ou la réduction de la taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 à raison du local situé ... ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à la décharge totale des impositions en litige :
Considérant, en premier lieu, que les immeubles dont s'agit sont implantés en zone rouge du plan de prévention des risques de la commune de Béziers en raison du risque d'inondation qu'ils encourent ; que, si le règlement d'urbanisme applicable dans la zone concernée interdit tout travaux de construction, toute installation et activités nouvelles, le paragraphe suivant excepte de cette interdiction « les travaux d'entretien et de gestion normaux des biens et activités (…) implantés antérieurement à la publication du présent document … » ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet d'interdire à un propriétaire de locaux compris dans cette zone, édifiés avant l'adoption du règlement d'urbanisme, de proposer à la location des locaux devenus vacants, ce qui constitue, au demeurant, un acte de gestion normal des biens en cause ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les entrepôts situés au ... ont perdu toute valeur locative en raison du règlement d'urbanisme et qu'ils ne devraient plus de ce fait être imposés à la taxe foncière sur les propriétés bâties ; que l'entrepôt situé ... n'étant pas vacant, le moyen est en tout état de cause et en ce qui le concerne inopérant ;
Considérant, en second lieu, que le choix par l'administration, lorsqu'elle détermine la valeur locative d'un local commercial selon la méthode de comparaison prévue par le 2°) de l'article 1498 du code général des impôts, d'un terme de comparaison erroné n'entraîne pas, en principe, la décharge des impositions contestées ; qu'il appartient seulement au juge de l'impôt, saisi de conclusions tendant à la décharge ou à la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties litigieuses, de déterminer, au vu des éléments de l'instruction, s'il dispose d'un autre terme de comparaison susceptible d'être valablement retenu pour procéder à la détermination par la méthode de comparaison de la valeur locative de l'immeuble à évaluer ou, en l'absence en l'état du dossier d'un tel terme de référence, de décider un supplément d'instruction pour permettre à l'administration de fournir un tel terme ou, à défaut, les éléments utiles pour procéder, conformément au 3°) de l'article 1498 précité, à l'évaluation de l'immeuble litigieux par la voie de l'appréciation directe ; que dès lors, la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge totale des taxes en litige au motif que le terme de comparaison retenu par l'administration serait erroné ; qu'elle n'est au surplus pas fondée à se plaindre de ce que les locaux de référence retenus par l'administration ne sont pas situés dans le quartier du Faubourg où sont implantés les locaux à évaluer dès lors que l'administration n'a pas l'obligation de choisir ses termes de comparaison dans le même quartier et que les différences de situation entre les locaux à évaluer et les locaux-type peuvent être corrigées par l'application de l'abattement prévu par les dispositions de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à la réduction des impositions en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : « La valeur locative de tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes ci-après : … 2° a) Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b) La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : - soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date ; - soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. » ; qu'aux termes de l 'article 324 Z de l'annexe III au même code : « I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. » ; qu'aux termes de l'article 324 AA de la même annexe : « La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire … est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance. » ;
Considérant, en premier lieu, que la valeur locative du local situé ..., affecté à un usage d'entrepôt, a initialement été fixée par l'administration par comparaison avec le local-type n° 196 du procès verbal d'évaluation de la commune de Béziers ; qu'il résulte de l'instruction que suite à la réclamation de la S.C.I. requérante, l'administration a substitué le local-type n° C 221 pour établir la valeur locative de cet immeuble, sans que cette substitution n'entraîne une réduction de la valeur locative ; que la S.C.I. PAGES ET FILS persiste à soutenir devant la Cour que le local-type n° 196 n'est pas adapté et à demander qu'y soit substitué le local-type n° 197 ; qu'en raison de la substitution opérée par le service, ce moyen est inopérant ; qu'en outre, la société n'établit pas la nécessité de procéder en application de l'article 324 AA de l'annexe III à un ajustement de la valeur locative déterminée par comparaison avec le nouveau local-type ;
Considérant, en second lieu, que la valeur locative des locaux situés ..., également à usage d'entrepôt, a été déterminée par comparaison avec le local-type n° 70 du procès verbal d'évaluation de la commune de Béziers ; que la société requérante ne conteste pas en appel la pertinence de ce terme de comparaison, mais demande l'application d'un abattement de 45% sur la valeur locative en raison des différences entre ses locaux et le local-type tenant à leur situation en zone inondable et aux contraintes d'urbanisme qui en découlent, ainsi que de leur emplacement dans une zone de commercialité moins attractive ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le local de référence retenu par l'administration est situé dans la zone d'activité du Capiscole, plus attractive que le quartier du Faubourg où sont situés les locaux litigieux, et qui présente l'avantage de ne pas être inondable alors que les locaux litigieux, situés en zone rouge du plan de prévention des risques de la commune, subissent cet inconvénient et les contraintes qui en résultent ; que, pour tenir compte de ces différences de situation, il y a lieu de procéder, en application des dispositions précitées de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, à un abattement de 30% sur la valeur locative et d'accorder à la S.C.I. PAGES ET FILS le dégrèvement correspondant de la taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI PAGES ET FILS est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en réduction de la taxe foncière à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 à raison des locaux situés ... ;
Sur les conclusions de la SCI PAGES ET FILS tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à la SCI PAGES ET FILS une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La valeur locative des locaux commerciaux situés ... déterminée par comparaison avec le local type n° 70 est réduite de 30%.
Article 2 : Il est accordé à la S.C.I. PAGES ET FILS une réduction de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 égale à la différence entre le montant de la taxe qui lui a été réclamée et le montant qui résulte des dispositions de l'article précédent.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 26 juin 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la SCI PAGES ET FILS une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCI PAGES ET FILS est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI PAGES ET FILS et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 03MA01688 2