Vu la requête et le mémoire, enregistrés les 8 septembre 2003 et 30 juin 2005, présentés par la Selarl Mathieu et Dallest pour Mme Nicole X, élisant domicile ... ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9808914 en date du 23 juin 2003, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989 à 1991 et des pénalités y afférentes et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er septembre 1988 au 31 août 1991 et des pénalités y afférentes ;
2°) de la décharger desdites impositions ;
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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la loi du 6 fructidor an II ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2007 :
- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteur ;
- les observations de Me Krasnopolski pour Mme X ;
- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1989 à 1991 et des pénalités y afférentes et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er septembre 1988 au 31 août 1991 et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité de la procédure :
Concernant le moyen tiré de la méconnaissance des articles L.47 et L.51 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu'aux termes de l'article L.47 du livre des procédures fiscales : « Une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ... » ;
qu'aux termes de l'article L.51 du livre des procédures fiscales : « Lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période ... » ; qu'il résulte notamment de ces dispositions que l'interdiction édictée doit être appréciée année d'imposition par année d'imposition et qu'une vérification doit être regardée comme étant achevée à la date de la dernière intervention sur place ou, au plus tard, à la date à laquelle l'administration adresse la notification de redressements ;
Considérant que Mme X a reçu un avis de vérification qui lui a été adressé le
1er octobre 1992 concernant les exercices clos en 1989, 1990 et 1991 ; que l'administration lui a adressé, d'une part, une notification de redressement le 17 décembre 1992 concernant l'exercice clos en 1989 et, d'autre part, une notification de redressement le 13 octobre 1993 concernant les exercices clos en 1990 et 1991 ; que Mme X soutient que l'administration devait lui adresser un nouvel avis de vérification pour les exercices clos en 1990 et 1991 avant l'envoi de la notification de redressement du 13 octobre 1993 ; que, toutefois, dès lors que la notification de redressement du 17 décembre 1992 portait sur le seul exercice clos en 1989 et que Mme X a réceptionné le 8 décembre 1992 un courrier du service lui précisant la date de la tenue d'une dernière réunion afférente au seul exercice clos en 89, celle-ci ne saurait soutenir que la procédure est entachée d'irrégularité ; que, par suite, et ainsi que l'a jugé le tribunal, l'envoi de la notification de redressement du 17 décembre 1992 ne peut être regardée comme mettant fin à la vérification annoncée par l'avis du 1er octobre 1992 susmentionné ; qu'en outre, Mme X n'allègue pas avoir été privée d'une quelconque garantie ;
Concernant le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 6 fructidor an II :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 6 fructidor an II : « Il est expressément défendu à tout fonctionnaire public de désigner les citoyens dans les actes autrement que par le nom de famille, les prénoms portés en l'acte de naissance, ou les surnoms maintenus par l'article 2, ni d'en exprimer d'autres dans les expéditions et extraits qu'ils délivreront à l'avenir. » ; qu'aux termes de l'article 6 du code général des impôts : «1 Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérés comme étant à sa charge au sens des articles 196 et 196 A bis. /Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles et ceux de leurs enfants et des personnes à charge mentionnées au premier alinéa ; cette imposition est établie au nom de l'époux, précédée de la mention « Monsieur ou Madame ». » ;
Considérant qu'en application des dispositions de l'article 6 du code général des impôts, la seule circonstance que l'administration a adressé les actes de la procédure d'imposition en litige à « Mme X », sans préciser le nom et le prénom de cette dernière figurant sur son acte de naissance est sans incidence sur la régularité de la procédure ; que, compte tenu de ces dispositions spécifiques, la requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 6 fructidor an II ;
Concernant le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des notifications de redressements :
Considérant que Mme X soutient que les notifications de redressements méconnaîtraient les dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales dès lors que le vérificateur s'est abstenu de préciser les motifs pour lesquels il a considéré que les avances sans intérêt avaient été consenties dans son intérêt personnel ; que toutefois, il résulte de l'examen de ces pièces, que si le vérificateur a précisé que ces avances n'avaient pas été faites dans l'intérêt direct de l'exploitation mais dans l'intérêt personnel de M. ou Mme X, il a également indiqué qu'en toute hypothèse, ces prêts avaient privé l'entreprise d'une recette sans être justifiés par les intérêts de l'exploitation commerciale et que de ce fait, l'acte anormal de gestion était caractérisé ; que, par suite, le moyen sera rejeté ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
Concernant les renonciations à recettes :
Considérant que l'abandon de créances ou l'octroi d'avances consentis par une entreprise au profit d'un tiers ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon d'intérêts constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve si l'auteur de l'abandon n'est pas en mesure de justifier l'existence de contreparties ;
Considérant que Mme X fait valoir que les avantages consentis à la société CCSF sous la forme d'avances sans intérêts étaient justifiés par la nécessité commerciale de venir en aide à un partenaire en difficulté lui assurant diverses missions de gestion et d'assurer la pérennité de cette dernière pour le maintien de sa propre activité ; qu'en dépit des liens professionnels entre l'entreprise individuelle de la requérante et la Société CCSF, Mme X n'établit ni l'existence d'une contrepartie aux avantages consentis à ladite société ni l'existence des difficultés alléguées de cette société ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme ayant rapporté la preuve dont la charge lui incombe de ce que les minorations de recettes et les avances sans intérêts consenties par Mme X à la société CCSF constituent des actes étrangers à une gestion commerciale normale ;
Concernant le passif qualifié de fictif par l'administration :
Considérant que le vérificateur a réintégré dans les résultats de l'exercice clos en 1989 une somme de 165 000 francs dont le montant était inscrit au passif du bilan de l'exercice et correspondant à une dette de l'entreprise envers M. X, en l'absence de justifications sur la nature et l'origine de la somme ; qu'en appel, Mme X qui soutient détenir une créance sur l'entreprise Senziani et qui supporte la charge de la preuve en raison de la nature de cette écriture comptable, verse aux débats, outre la copie d'un « journal des opérations diverses », une attestation de l'expert-comptable de l'entreprise certifiant que l'écriture de 330 000 francs correspond à une créance de Mme X sur l'entreprise Senziani et que cette créance a été financée par moitié par elle-même et pour l'autre par son époux, M. X ; que toutefois, ces éléments ne sont pas de nature à justifier que la somme de 165 000 francs pouvait être, à bon droit, inscrite au passif de l'entreprise personnelle de Mme X ;
Concernant les provisions :
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 5° du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celle-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (…) 5º Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seraient supportées qu'ultérieurement par l'entreprise, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, et qu'elles apparaissent en outre comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la clôture de l'exercice ;
Considérant que contrairement à ce que soutient la requérante, celle-ci n'établit pas par les pièces versées aux débats en appel, que les pertes envisagées qu'elle a portées en provisions le 31 août 1989 étaient justifiées en raison du risque de non-recouvrement de créances détenues ; qu'ainsi, le caractère irrécouvrable des sommes correspondant au prêt consenti le 30 août 1989 à Mme Bon pour un montant de 100 000 francs, au prêt accordé aux éditions du Bolmon pour un montant de 65 000 francs dans le cadre d'une SEP et au prêt consenti aux époux Bon pour une somme de 150 000 francs en raison d'un litige l'opposant à ce couple n'est pas démontré à la date de la clôture de l'exercice, soit au 31 août 1989 ;
Concernant la taxe sur la valeur ajoutée injustifiée :
Considérant que Mme X ayant déduit à tort au titre des mois de septembre et octobre 1988, la taxe sur la valeur ajoutée afférente à l'activité des Editions du Bolmon, l'administration a réintégré la somme correspondante, soit un montant de 245 889 francs, dans les résultats de l'exercice clos en 1989 ; que si Mme X fait valoir qu'une somme de
48 960 francs, représentant la TVA due au titre de son activité et de celle des Editions du Bolmon, a été débitée sur son compte bancaire professionnel le 26 octobre 1988, il ne résulte toutefois pas de l'instruction qu'elle a déposé une déclaration rectificative afin de régulariser la déduction erronée ; qu'en tout état de cause, la circonstance à la supposer établie que la requérante a acquitté le montant rappelé, est sans incidence sur le bien-fondé du redressement litigieux ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nicole X et au ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.
Copie en sera adressée à au cabinet Mathieu et Dallest.
N° 03MA01803 2