Vu la requête, enregistrée le 9 décembre 2004, présentée pour la SARL MARIE-LYS, représentée par son gérant, dont le siège social est situé Le Marjolaine, Bâtiment B, avenue Koenig à Aix-en-Provence (13 100), par Me Mathieu et Me Dallest ;
La SARL MARIE-LYS demande à la Cour :
11) d'annuler l'article 2 du jugement n° 00-0623 en date du 4 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir constaté, par l'article 1er de son jugement un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en première instance, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaire de 10 % sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994 à 1996 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période correspondant aux mêmes années ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et intérêts de retard restant à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2007 ;
- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, la SARL MARIE-LYS, qui exploite un fonds de commerce de sandwichs et de pizzas, a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaire de 10 % sur cet impôt au titre des années 1994 à 1996, un complément de taxe sur la valeur ajoutée lui étant réclamé pour la période correspondant aux mêmes années ; que la société demande à la Cour d'annuler l'article 2 du jugement en date du 4 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir constaté, par l'article 1er de son jugement, un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en première instance en ce qui concerne les pénalités de mauvaise foi qui avaient assorti les impositions contestées, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des impositions et des intérêts de retard laissés à sa charge ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L.10 du livre des procédures fiscales : « Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L.12 et L.13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration » ; que le paragraphe 5 du chapitre III de ladite charte précise : « Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...). Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur » ;
Considérant qu'un contribuable qui n'a, à aucun moment de la procédure de vérification, demandé à bénéficier de la garantie offerte par la charte du contribuable permettant d'obtenir un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur sur tous les points où persiste un désaccord avec ce dernier, ne saurait soutenir utilement devant le juge de l'impôt qu'il aurait été privé de cette garantie et que la procédure d'imposition serait, pour ce motif, irrégulière ;
Considérant qu'il est constant que la SARL MARIE-LYS, si elle a demandé à rencontrer l'interlocuteur départemental, demande qui a été satisfaite le 23 septembre 1998, n'a pas demandé à rencontrer le supérieur hiérarchique du vérificateur ; qu'en outre, contrairement à ce que soutient la société requérante, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait tenté de la dissuader de porter le différend qui l'opposait au vérificateur devant le supérieur hiérarchique de celui-ci et l'aurait privée d'une garantie substantielle prévue par la charte du contribuable vérifié ; que, plus particulièrement, l'utilité du débat que pouvait obtenir la société avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, en application des dispositions précitées de la charte, ne pouvait être affectée par la circonstance que le vérificateur a indiqué à la société que sa position correspondait également à celle de son chef de brigade, dès lors que l'existence d'un recours hiérarchique garantissait un nouvel examen du dossier ;
Considérant, en second lieu, qu'en indiquant à la société dans la notification de redressement datée du 22 décembre 1997 que les tarifs des consommations retenus pour la reconstitution de ses recettes des années 1994, 1995 et 1996 seraient ceux en vigueur en 1997, diminués de 5 à 10 % selon les consommations et en mentionnant en annexe I de la notification de redressement les tarifs retenus pour chacun des vingt-deux produits vendus par la société, le vérificateur a suffisamment précisé les modalités de calcul de la reconstitution des recettes à laquelle il procédait ; qu'en indiquant que « la consommation personnelle a été évaluée à 5 % », le vérificateur a apporté à la société une information suffisante que celle-ci était en mesure de discuter ; que l'annexe IV de la notification de redressement apportait également à la société toutes informations utiles quant aux achats pris en compte par le vérificateur, qui étaient chiffrés pour chaque produit acheté et pour chaque mois des années vérifiées ; qu'ainsi, alors même que la notification de redressement ne mentionnait pas les dates et les montants des factures retenues par le vérificateur, la société a été mise à même d'engager utilement un dialogue sur ce point avec l'administration ; qu'il en va de même en ce qui concerne le prix de 17 francs retenu par le vérificateur pour les sandwichs vendus par la société requérante ; que, contrairement à ce que soutient celle-ci, le vérificateur a indiqué de façon suffisante que ce prix était un prix moyen calculé en tenant compte tant des sandwichs garnis les plus chers vendus entre 19 et 24 francs que des sandwichs ordinaires ; que la société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution de ses recettes s'appuierait sur des éléments dont le mode de calcul ne lui aurait pas été suffisamment communiqué dans la notification de redressement, qui est suffisamment motivée ; que, par voie de conséquence, la procédure d'imposition ne saurait être regardée comme entachée d'un vice substantiel au sens de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article L.192 du livre des procédures fiscales : « Lorsque l'une des commissions visées à l'article L.59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge (...) » ;
Considérant, en premier lieu, que l'administration soutient sans être utilement contredite que les recettes de la société étaient globalisées en fin de journée, qu'aucun document détaillant les recettes globalisées tels qu'un brouillard de caisse ou une bande de caisse enregistreuse n'a pu être produit par la société et qu'aucun détail des stocks de marchandise n'a été présenté ; qu'un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité constatant ces irrégularités a d'ailleurs été établi le 4 novembre 1997 ; que la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir des termes de la réponse ministérielle faite à M. Berger, député, publiée au Journal Officiel (Débats de l'Assemblée Nationale) du 22 juin 1972, qui subordonne la comptabilisation globale des recettes quotidiennes à la condition que les commerçants puissent en justifier le détail par la présentation de fiches de caisse ou d'une main courante correctement remplie dès lors qu'elle n'a présenté aucune pièce justificative du détail de ses recettes quotidiennes et ne remplissait donc pas les conditions posées par la doctrine invoquée ; que l'administration fiscale apporte donc la preuve qui lui incombe que la comptabilité de la société comportait de graves irrégularités ;
Considérant, en second lieu, que les impositions ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires réunie le 5 novembre 1998 ; que la société requérante ne saurait utilement reprocher à la commission de ne pas s'être prononcée au sujet de la valeur régulière et probante de sa comptabilité dès lors qu'elle n'a pas entendu la saisir de cette question ; qu'il appartient en conséquence à la société d'apporter la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste ;
En ce qui concerne le montant des rehaussements :
Considérant, en premier lieu, que, comme il a été dit, le vérificateur a retenu pour la reconstitution des recettes des années 1994, 1995 et 1996 de la société les tarifs en vigueur en 1997, seule information dont il disposait, diminués de 5 à 10 % selon les consommations ; que la société requérante n'établit pas que les tarifs de vente des consommations retenus pour les trois années en litige, à partir des données internes à l'entreprise, auraient été surévalués ou que ses conditions d'exploitation auraient subi entre les trois années vérifiées, d'une part, et l'année 1997, d'autre part, des transformations telles que les réfactions auxquelles s'est livré le vérificateur seraient erronées ; que, plus particulièrement, la société requérante n'établit pas que le prix de vente retenu en ce qui concerne les sandwichs par référence à la moyenne des prix de vente des sandwichs les plus chers et des sandwichs ordinaires aurait été surévalué ;
Considérant, en second lieu que le vérificateur, a déterminé un prix de vente unitaire moyen des pizzas de 51,17 francs TTC à partir des prix des seize variétés de ce produit offertes à la clientèle, seule donnée dont il disposait ; que, si la société requérante soutient que le prix ainsi obtenu aurait dû être pondéré pour tenir compte de la prépondérance des ventes des pizzas les moins chères, elle se borne sur ce point à présenter de simples allégations non assorties d'un commencement de justification ; que le coefficient de marge de 1,93 retenu par le vérificateur en ce qui concerne la reconstitution des ventes de confiserie et de glaces, à partir des prix d'achat et de vente de ces produits tels que conseillés par les fournisseurs, n'est pas davantage utilement critiqué par la société ; qu'enfin, contrairement à ce que soutient la requérante, le vérificateur a pris en considération, pour chaque produit, la proportion de ce produit utilisée par les exploitants pour leur consommation personnelle, les pertes et les offerts ; que le vérificateur a accepté notamment, d'une part, de diminuer de 5 % le chiffre d'affaires retiré de la vente des pizzas pour tenir compte des cartes de fidélité remises à certains clients, de retenir un pourcentage de produits de confiserie offerts de 20 % au cours de la première année d'exploitation et de 10 % au cours des deux années suivantes pour tenir compte de l'inexpérience des exploitants, les cafés offerts ayant été quant à eux retenus pour 28 % du chiffre d'affaires lié à ce produit au titre des trois années vérifiées et, d'autre part, de retenir un taux de consommation personnelle par les exploitants de 6 % en ce qui concerne le pain et de 5 % en ce qui concerne les autres produits ;
Considérant, par suite, que la société requérante, qui ne propose pas de méthode de reconstitution de ses recettes et de ses résultats plus probante que celle adoptée par l'administration fiscale, n'est pas fondée à soutenir que cette dernière méthode serait radicalement viciée ou même excessivement sommaire ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL MARIE-LYS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL MARIE-LYS est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MARIE-LYS et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie en sera adressée à la Direction de contrôle fiscal Sud-Est.
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N° 04MA02489