Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2006, présenté par la SCP Dessalces-Ruffel, avocats, pour M. Salah X, de nationalité marocaine, élisant domicile chez
M. Ahmed Y, ...) ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 21 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du préfet de l'Hérault en date du 9 février 2004, confirmée par le rejet de son recours gracieux du 21 avril 2004 portant refus de son admission au séjour, d'autre part, à ce qu'il soit fait injonction au préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du préfet de l'Hérault ;
3°) d'ordonner la délivrance d'un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire, d'ordonner le réexamen de sa demande dans le délai de trois mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de condamner l'État à lui verser 700 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille en date du 20 novembre 2006, attribuant à M. X une aide juridictionnelle partielle ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 ;
Vu le décret n° 50-722 du 24 juin 1950 ;
Vu le décret n° 82-389 du 10 mai 1982 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2008 :
- le rapport de M. Gonzales, rapporteur,
- les observations de Me Ruffel, de la SCP Dessalces-Ruffel, pour M. X ;
- et les conclusions de M. Brossier, commissaire du gouvernement ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la compétence du signataire des décisions attaquées devant le tribunal administratif :
Considérant que par arrêté du 31 juillet 2002, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Hérault, M. Philippe Vignes, secrétaire général de la préfecture, a reçu délégation pour signer « tous arrêtés, décisions, circulaires relevant des attributions de l'État dans le département de l'Hérault (...) à l'exception des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 », conformément aux dispositions du décret du 24 juin 1950 et du 10 mai 1982 susvisés ; que le Gouvernement a pu légalement prendre ces dispositions qui ne sont pas au nombre de celles dont la Constitution réserve l'édiction au législateur ; qu'en particulier les dispositions donnant compétence au représentant de l'État pour la délivrance des titres de séjour sont de nature réglementaire ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du décret du 24 juin 1950 en soutenant que la délégation de signature pour les refus de séjour aurait dû être autorisée par une norme législative ; qu'en outre, la délégation de signature litigieuse est conforme à l'article 17 du décret du 10 mai 1982 susvisé, aux termes duquel : « le préfet peut donner délégation de signature... au secrétaire général... en toutes matières» ; qu'enfin, dans les termes où elle est rédigée, la délégation de signature dont justifiait M. Vignes pour prendre l'arrêté en litige était définie avec une précision suffisante ; que contrairement à ce que soutient le requérant, elle ne peut être regardée comme présentant un caractère de généralité excessive ; qu'il en résulte que les décisions attaquées devant le tribunal administratif ne sont pas entachées d'incompétence ;
En ce qui concerne l'application des articles 12 quater, 12 bis 3e et 12 bis 7e de l'ordonnance du 2 novembre 1945 :
Considérant qu'au terme de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 3e) À l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tous moyens résider en France habituellement depuis plus de 10 ans ou plus de 15 ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ; 7e) À l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celle qui ouvre droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ; que l'article 12 quater de la même ordonnance dispose que : « Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). La commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 » ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles 12 bis et 15 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;
Considérant, d'une part, que M. X soutient, sans l'établir, qu'il séjourne en France depuis 1989 ; que notamment la réalité de son séjour entre 1994 et 1999 est insuffisamment attestée par quelques documents permettant de relever une présence sporadique de l'intéressé pendant cette période et par des attestations sur l'honneur rédigées en termes très généraux ; que, dès lors, c'est à juste titre que le tribunal a estimé que le préfet avait fait une exacte application de l'article 12 bis 3e alinéa de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en refusant l'admission au séjour de M. X sur son fondement ;
Considérant, d'autre part, que l'appelant soutient qu'il a établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France ; qu'en particulier, il fait valoir qu'il entretient des relations soutenues avec sa soeur, régulièrement et durablement installée sur le territoire national ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant serait dépourvu de toute attache familiale au Maroc ; qu'il est célibataire et sans charge de famille ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir qu'un titre de séjour aurait dû lui être délivré sur le fondement des dispositions de l'article 12 bis 7e alinéa de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que M. X n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application de l'article 12 bis précité de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet de l'Hérault n'était pas tenu, en application de l'article 12 quater de la même ordonnance, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
En ce qui concerne l'application de l'article 7 du décret du 30 juin 1946 modifié :
Considérant qu'au terme du 2e alinéa de l'article 7 du décret du 30 juin 1946, dans sa rédaction issue du décret du 5 mai 1999 : « L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présent à l'appui de sa demande (...) 2e) les documents mentionnés à l'article 1er du présent décret, justifiant qu'il est entré régulièrement en France (...). Ne sont pas soumis aux dispositions du 2e de l'alinéa premier du présent article les étrangers mentionnés à l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée(...) » ; que dès lors que M. X n'entrait dans aucune des catégories d'étrangers dispensés, en application de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, de produire les documents mentionnés au 2e de l'article 7 du décret du 30 juin 1946, le préfet de l'Hérault pouvait refuser de lui délivrer un titre de séjour au motif qu'il n'était pas muni d'un visa de long séjour ; qu'en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru tenu de refuser le titre de séjour sollicité par cette seule circonstance, ni qu'il ne se soit pas livré à une appréciation de l'ensemble des éléments caractérisant la situation de M. X ; que, dès lors, le moyen tiré d'une méconnaissance de la loi et d'une erreur de droit doit être écarté ;
En ce qui concerne les autres moyens :
Considérant qu'au terme de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, « 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;
Considérant que, pour les motifs susévoqués, la décision du 9 février 2004, confirmée par la décision de rejet du recours gracieux du 21 avril 2004, refusant à M. X la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que M. X n'est dès lors pas fondé à soutenir que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues ;
Considérant que si M. X fait valoir qu'il dispose d'un domicile et d'une promesse d'embauche, et qu'il a fait l'objet d'une agression sur son lieu de travail qui lui laisse des séquelles esthétiques à évaluer, ces circonstances ne sont pas de nature à faire regarder le refus de titre de séjour attaqué comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions litigieuses du préfet de l'Hérault lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
Sur les conclusions présentées à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution particulière ; qu'il en résulte que les conclusions présentées à fin d'injonction sous astreinte par M. X sont irrecevables et doivent être rejetées pour ce motif ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que M. X, qui succombe dans la présente instance, ne peut prétendre au remboursement de ses frais de procédure ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête susvisée de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Salah X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du co-développement.
N° 06MA01900
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