Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2008 (télécopie régularisée par l'envoi de l'original reçu le 10 mars 2008), présentée pour M. Jaouad X, demeurant chez M. Hassan X, ..., par Me Ferraiuolo, avocat ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800277 du 5 février 2008 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 1er février 2008 par lequel le préfet de Vaucluse a décidé sa reconduite à la frontière, fixé le pays de destination, et l'a placé en rétention administrative, d'autre part, à enjoindre au préfet, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation et de lui accorder une autorisation provisoire de séjour ;
2°) d'annuler l'arrêté de reconduite à la frontière précité ainsi que la décision distincte fixant le pays de destination et celle le plaçant en rétention ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans le délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-marocain du 10 novembre 1983 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Vu la décision du président de la Cour administrative d'appel de Marseille en date du
1er septembre 2008 donnant délégation à M. Guy Fédou, président, pour statuer sur les appels formés contre les jugements statuant sur des recours en annulation d'arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2008 :
- le rapport de M. Fédou, magistrat désigné ;
- les conclusions de M. Brossier, commissaire du gouvernement ;
Sur l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité » ; que M. X, de nationalité marocaine, n'a pu justifier d'une entrée régulière ni de l'obtention d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que, par un arrêté du 26 décembre 2007, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet de Vaucluse a donné à M. François-Xavier Lauch, directeur de cabinet, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que M. Lauch n'aurait pas été compétent pour signer l'arrêté attaqué du 1er février 2008 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X manque en fait ;
Considérant qu'en mentionnant que l'intéressé est entré sur le territoire français muni d'un document transfrontière non revêtu du visa requis, qu'il ne justifie pas être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, et en visant le 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté en litige comporte l'exposé des faits et des considérations de droit sur lequel il se fonde et est ainsi suffisamment motivé ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne saurait être accueilli ;
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi nº 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix (...) - Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : - (...) 3º Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ; qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et, notamment, des articles L. 511-1 à L. 511-3 et L. 512-1 à L. 512-5, qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours, et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière et, ainsi, exclure l'application des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 selon lesquelles les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites ou orales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision du préfet de Vaucluse en date du 1er février 2008, ordonnant la reconduite à la frontière de M. X serait illégale faute d'avoir été précédée du recueil des observations de l'intéressé, doit être écarté ;
Considérant que si M. X, dont une première de demande de titre de séjour a fait l'objet le 8 août 2003 d'un rejet devenu définitif, soutient qu'il a présenté le 24 juillet 2007 une nouvelle demande de titre et qu'il aurait dû se voir délivrer un récépissé valant autorisation provisoire de séjour, cette circonstance n'obligeait pas le préfet à surseoir à l'édiction d'un arrêté de reconduite à la frontière jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande de titre de séjour, dès lors que les conditions légales de la reconduite se trouvaient réunies ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L.511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi, ou une convention internationale, prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit :(...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; »
Considérant que si M. X soutient qu'il est entré en France pour la dernière fois en 2002, que toute sa famille y réside en situation régulière et qu'il y a ses amis, il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant ne justifie pas de la date de son entrée en France, qu'il est âgé de vingt huit ans à la date de l'arrêté attaqué, célibataire sans charge de famille, qu'il n'établit pas, par les documents qu'il verse à l'appui de sa requête et en l'absence du livret de famille, être dépourvu d'attaches familiales au Maroc où, selon ses propres déclarations au cours de son audition par les services de police, sa mère résidait encore à la date de l'arrêté attaqué ; que l'attestation établie postérieurement à l'arrêté attaqué et produite en cours d'instance indiquant que la mère de M.X ne résiderait plus au Maroc est sans influence sur la décision contestée ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté en date du 1er février 2008 du préfet de Vaucluse n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, il n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France pour une durée d'un an au minimum (...) reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an, renouvelable et portant la mention salarié (...) Après trois ans de séjour continu en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent pourront obtenir un titre de séjour de 10 ans ; que si M. X fait valoir que deux sociétés sont prêtes à l'employer, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a pas produit un contrat de travail visé par les autorités compétentes et ne s'est pas présenté au contrôle médical d'usage ; que par suite, il n'est pas fondé, en tout état de cause, à invoquer l'application de ces stipulations ;
Sur la décision distincte fixant le pays de destination :
Considérant que, pour les raisons exposées ci- dessus, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ne peut qu'être écarté ;
Sur la décision de placement en rétention :
Considérant que M. X n'apporte aucun élément à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de placement en rétention ; qu'elles ne sauraient dès lors être accueillies ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions en injonction assortie d'astreinte :
Considérant que la présente décision qui rejette la requête de M. X n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. Jaouad X est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jaouad X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
N° 08MA01179 2