Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 11 mars 2008, présentée pour M. et Mme , demeurant ..., par Me Bauducco, avocat ;
M. et Mme demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604001 en date du 8 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la ville de Nîmes à leur verser une somme de 11 096,13 euros en réparation des préjudices subis à la suite d'inondations dans leur habitation ;
2°) de condamner la ville de Nîmes à leur verser la somme précitée de 11 096,13 euros ;
3°) de mettre à la charge de la ville de Nîmes la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.........................................................................................................
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisées à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2010 :
- le rapport de Mme Bader-Koza, rapporteur ;
- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme sont propriétaires d'une maison à usage d'habitation à Nîmes ; qu'ils ont fait édifier un corps de bâtiment constituant une extension de leur maison dont un mur maître est constitué par un mur soutenant des remblais supportant une voie communale dénommée chemin des piétons ; que se plaignant d'infiltrations au travers de ce mur, les époux en ont imputé la responsabilité à des travaux réalisés sur le domaine public pour le compte d'EDF et de France Télécom au cours desquels une canalisation aurait été endommagée ; qu'après le dépôt du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Montpellier, M. et Mme ont présenté une demande préalable d'indemnisation au maire de la ville de Nîmes avant de saisir le Tribunal administratif de Nîmes d'une demande indemnitaire ; que par un jugement en date du 8 janvier 2008 dont ils relèvent appel, le tribunal a rejeté cette demande ;
Sur le régime de responsabilité applicable :
Considérant qu'en appel, M. et Mme , en leur qualité de riverains d'un ouvrage public, présentent la qualité de tiers par rapport à cet ouvrage ; qu'ils fondent expressément leur demande indemnitaire sur le régime du dommage occasionnel de travaux publics en invoquant des faits précis sur une période précise et non des dommages récurrents en lien avec la seule présence d'un ouvrage public ;
Sur la responsabilité de la ville de Nîmes :
Considérant que même en l'absence de faute, les personnes publiques sont responsables des dommages causés aux tiers par un ouvrage public ou par des travaux publics ; qu'il n'en va différemment que lorsque les dommages sont imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Montpellier que la propriété des requérants est située en contrebas d'un mur de soutènement de la voie desservant la colline de Montaury dénommée chemin des piétons ; que ce mur, réalisé à la fin du 19e siècle - début 20e siècle, est fondé sur le sol naturel rocheux constitué de calcaire du type cruasien et a été établi en pierres sèches, appareillage simple sans protection d'étanchéité sur la face d'appui ; que des remblais ont été appuyés sur ce mur, supportant le corps de la chaussée, lesquels ont une forte teneur en argile ; qu'à compter du mois de décembre 2003, puis en février, avril et août 2004, d'importantes infiltrations d'eau ont été observées par M. et Mme sur ce mur à environ, selon l'expert, 0m10 à 0m30 au dessus du niveau du sol de l'habitation ;
Considérant qu'il résulte de ces constatations qu'il existe donc un lien de causalité entre l'ouvrage public constitué tout à la fois du mur de soutènement, de la voie communale et de ses fondations et les désordres dont se plaignent les requérants, à savoir d'importantes arrivées d'eau dans leur habitation ; que si la ville de Nîmes fait valoir que, selon les mêmes constatations de l'expert, les infiltrations d'eau trouvent leur cause dans le phénomène de sécheresse exceptionnelle des mois de juillet et août 2003 qui ont eu pour conséquence des assèchements importants des superstructures et infrastructures dans les sols argileux, soit un phénomène étranger à l'ouvrage public, il résulte des constatations précitées que si le remblai utilisé pour élever l'ouvrage public est lui-même constitué d'argile, il n'en est pas pour autant étranger à l'ouvrage lui-même, tout au contraire ; que la circonstance, invoquée en défense la ville de Nîmes, qu'une partie de l'habitation de M. et Mme est accolée au mur de soutènement litigieux sans aucun dispositif d'étanchéité demeure sans incidence sur le lien de causalité entre l'ouvrage public et les infiltrations d'eau et ne peut avoir d'influence que sur le lien de causalité entre les désordres et les préjudices dont il est demandé réparation ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin dans la présente instance de rechercher si les travaux publics réalisés sur la voie communale en fin d'année 2003, juste avant l'apparition des premiers sinistres, présentent également un lien avec les désordres, la responsabilité sans faute de la ville de Nîmes est engagée à raison du lien de causalité établi entre l'ouvrage public et les infiltrations d'eau litigieuses ;
Sur les préjudices :
Considérant que M. et Mme font état d'un préjudice matériel qu'ils évaluent à 4 096,13 euros, d'un préjudice de jouissance évalué à 5 000 euros et d'un préjudice moral estimé à 2 000 euros ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que le mur de soutènement du chemin des piétons sert de mur maître pour une partie de l'habitation des requérants abritant la cuisine, l'arrière cuisine et la descente d'escalier conduisant au garage et à la chaufferie et ce, sans qu'aucun dispositif d'étanchéité particulier n'ait été prévu ; que l'expert a d'ailleurs précisé que le mur litigieux est seulement enduit au mortier de chaux dans l'arrière-cuisine et l'escalier et au plâtre dans la cuisine ; que les travaux effectués ou restant à effectuer pour des questions d'habitabilité et de sécurité résultent directement de l'absence d'un mur d'habitation étanche et seulement indirectement des désordres imputées à la collectivité publique ; qu'enfin, si M. et Mme auraient pu être indemnisés des préjudices liés aux importantes arrivées d'eau sur leur propriété, ils ne sauraient obtenir réparation du préjudice de jouissance et du préjudice moral consécutifs à l'impossibilité d'utiliser plusieurs pièces de la maison, dont la cuisine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme ne sont pas fondés à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la ville de Nîmes verse une quelconque somme à M. et Mme au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme la somme que la ville de Nîmes demande en application des mêmes dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jacques-Henri et à la ville de Nîmes.
Copie en sera adressée à Me Bauducco et Me Berthomieu.
''
''
''
''
2
N° 08MA01261