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20/12/2010 | FRANCE | N°08MA02392

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2010, 08MA02392


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 mai 2008 sous le n° 08MA02392, présentée pour Mme Martine A, demeurant ...), par Me Beaugrand, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601867 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail de la première section du Var en date du 13 février 2006 et de la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement en date du 3 août 2006 ayant

autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de me...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 mai 2008 sous le n° 08MA02392, présentée pour Mme Martine A, demeurant ...), par Me Beaugrand, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601867 du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail de la première section du Var en date du 13 février 2006 et de la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement en date du 3 août 2006 ayant autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 435,20 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2010 :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, premier conseiller,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- les observations de Me Crémona, représentant la société Dolce Frégate ;

Considérant que Mme A a été recrutée le 24 avril 1995 par la société Hôtel Frégate, devenue la société Dolce Frégate, en qualité d'aide comptable ; qu'elle a été promue responsable des ressources humaines à compter du 1er juin 2001, puis a été désignée en qualité de représentante syndicale au comité d'entreprise par le syndicat F.O. le 26 janvier 2005 ; qu'au égard aux termes de sa requête et aux pièces qui y sont jointes, Mme A doit être regardée comme relevant appel du jugement du 13 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail de la première section du Var en date du 13 février 2006 et de la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement en date du 3 août 2006 ayant autorisé son licenciement pour insuffisance professionnelle ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société Dolce Frégate à la demande de première instance :

Considérant que la décision du 3 août 2006 prise par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement à la suite du recours hiérarchique formé par Mme A à l'encontre de la décision du 13 février 2006 prise par l'inspectrice du travail de la première section du Var, décision qui n'était pas définitive, ne peut être regardée, contrairement à ce que soutient la société Dolce Frégate, comme étant confirmative de cette dernière décision ; que, dès lors, les conclusions de Mme A dirigées contre la décision ministérielle du 3 août 2006, contenues dans un mémoire enregistré au greffe du Tribunal administratif de Nice le 30 septembre 2006, ne sont pas irrecevables ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des membres du comité d'entreprise, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonnée à une autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'insuffisance professionnelle, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si ladite insuffisance est telle qu'elle justifie le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont le salarié est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant que la société Dolce Frégate a, dans le cadre d'une réorganisation de ses services initiée par le groupe Dolce à la suite du rachat de la société par celui-ci en 2003, recruté, au début du mois de janvier 2005, un directeur des ressources humaines ; que cette circonstance factuelle se trouve à l'origine de la décision de la société de changer Mme A de poste de travail ; que, dans cette perspective, la société Dolce Frégate a formulé, en mai 2005, en direction de Mme A, une proposition pour le poste de superviseur comptabilité fournisseurs achats , puis une proposition pour le poste de responsable facturation ; que ces propositions ont été toutes deux refusées par Mme A ; que, dans un courrier ultérieur, en date du 9 novembre 2005, la société Dolce Frégate a, pour la première fois, reproché à la requérante des manquements dans l'exercice de ses fonctions de responsable des ressources humaines, occupées depuis le mois de juin 2001; que la société Dolce Frégate a alors consulté le comité d'entreprise, puis saisi l'inspection du travail de la section du Var de la demande litigieuse d'autorisation de licenciement de l'intéressée, au motif de son refus de la modification de poste de travail rendue nécessaire par la restructuration du service des ressources humaines et de son insuffisance professionnelle qui résulterait, en particulier, de l'omission de mise en place d'un accord de participation, de la non attribution des jours de fractionnement pour congés payés, de l'oubli de consultation et d'informations obligatoires au comité d'entreprise, de l'omission d'information du directeur général, à la suite de sa désignation en tant que représentante syndicale au comité d'entreprise, de la possibilité de contester cette désignation, et de l'assignation du directeur général pour délit d'entrave ; que pour autoriser, par la décision contestée du 13 février 2006, le licenciement de Mme A, l'inspectrice du travail de la première section du Var a retenu, s'agissant du grief d'insuffisances professionnelles, que celles-ci avaient été mises en lumière au fil des mois ; que le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, dans sa décision confirmative du 3 août 2006, a estimé que l'insuffisance professionnelle de l'intéressée était avérée dès lors que ses divers manquements en matière de gestion des ressources humaines ont été révélés à la suite de la création de la direction des ressources humaines et du recrutement d'un directeur des ressources humaines et qu'il lui est notamment reproché l'assignation de la société, au cours de l'année 2004, pour délit d'entrave ainsi que l'absence de mise en place d'un accord de participation et d'information correcte du directeur général ;

Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la société Dolce Frégate n'a, pendant plus de quatre ans, formulé aucun reproche à l'encontre de Mme A dans l'exercice de ses fonctions de responsable des ressources humaines ; qu'elle n'assortit ses allégations d'insuffisance professionnelle concernant chacun des griefs allégués d'aucun document ni d'aucun élément de nature à établir leur réalité ou leur imputabilité à Mme A ; que celle-ci qui a, contrairement à ce que soutient la société, contesté les manquements en cause, produit en revanche des courriels et des attestations émanant de salariés de l'entreprise tendant à démentir certaines des allégations de la société Dolce Frégate ; que, par ailleurs, les refus opposés par la salariée aux deux propositions de poste émanant de son employeur, qu'ils soient ou non fautifs, ne peuvent en tout état de cause être regardés comme démontrant son insuffisance professionnelle ; que, dans ces conditions, la matérialité des faits d'insuffisance professionnelle n'est pas établie ; qu'ainsi l'inspectrice du travail, laquelle, au surplus, n'a pas vérifié si l'insuffisance alléguée était telle qu'elle justifiait le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressée et des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle aurait été constatée, puis le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, n'ont pu légalement autoriser le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspectrice du travail de la première section du Var en date du 13 février 2006 et de la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement en date du 3 août 2006 et à demander l'annulation desdits jugements et décisions ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que, d'une part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 435,20 euros que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, d'autre part et en revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la société Dolce Frégate au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 13 mars 2008, la décision de l'inspectrice du travail de la première section du Var en date du 13 février 2006 et la décision du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement en date du 3 août 2006 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 435,20 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la société Dolce Frégate présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Martine A, au ministre du travail, de l'emploi et de la santé et à la société Dolce Frégate.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02392
Date de la décision : 20/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BEAUGRAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-20;08ma02392 ?
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