Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2009, présentée pour M. Sakir A, élisant domicile ... par la SCP d'avocats Dessalces-Ruffel ; M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0903796 du 6 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 août 2009 par lequel le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault, a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 5 août 2009 susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant mention vie privée et familiale à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai, à titre subsidiaire d'ordonner le réexamen de sa demande dans un délai de trois mois, dans les mêmes conditions ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 196 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à la SCP Dessalces Ruffel en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme du 4 novembre 1950 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2011 :
- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;
- les conclusions de Mme Fédi, rapporteure publique ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A, de nationalité turque, tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 août 2009 par lequel le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault, a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
Considérant, en premier lieu, que, par arrêté du 2 avril 2009, régulièrement publié le même jour, le préfet de l'Hérault a accordé à M. Latron, sous préfet hors classe, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault, délégation à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault (...) à l'exception des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 (...), conformément aux dispositions du décret du 29 avril 2004, dont l'article 43, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée, dispose : Le préfet de département peut donner délégation de signature : 1° En toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services des administrations civiles de l'Etat dans le département, au secrétaire général et aux chargés de mission (...) ; que, dans les termes où elle est rédigée, la délégation de signature dont justifiait, pour prendre la décision litigieuse, M. Latron, était définie avec une précision suffisante ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision litigieuse doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de l'examen de la décision portant refus de titre de séjour opposée à M. A, qui vise certaines dispositions, et notamment l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles, opposables en l'espèce, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet a rappelé les considérations de droit qui en constituent le fondement ; que l'arrêté mentionne également les éléments en possession de l'administration sur la date d'entrée et les conditions de séjour en France et sur la situation privée et familiale de l'intéressé ; qu'ainsi, la décision contestée est suffisamment motivée en fait et en droit ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de la situation du requérant ;
Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit (... ) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ;
Considérant que M. A déclare être entré en France en 2004 ; que son épouse, de nationalité turque, et leur premier enfant l'ont rejoint en France en 2005 ; que M. A a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 1er février 2006, exécutée le 16 février 2006, et est revenu en France en mars 2006 sous couvert d'un visa de court séjour portugais ; qu'il a fait l'objet le 29 mars 2007 d'une obligation de quitter le territoire ; que son épouse a fait l'objet de cette même mesure le 8 juin 2007 ; qu'ainsi, les deux époux étaient en situation irrégulière sur le territoire national à la date du refus de titre litigieux ; que la circonstance que le couple ait eu deux autres enfants nés en 2007 et en 2009 sur le sol français ne fait pas obstacle à ce que la famille se reconstitue dans son pays d'origine ; que la circonstance que son épouse soit enceinte de huit mois à la date de la décision litigieuse ne suffit pas non plus à établir l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ; que la scolarisation de son fils aîné en France en 2005 ne lui permet pas à elle seule d'établir que la famille a constitué le centre de ses intérêts en France ; que M. A n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'age de 31 ans ; que les dispositions précitées ne consacrent pas le droit des étrangers de choisir le lieu pour développer leur vie familiale ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant, le refus de titre de séjour ne méconnaît, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ni l'article L 311-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle et familiale de M. A ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ; qu'il résulte des dispositions précitées que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que M. A n'étant pas en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en France notamment au titre de l'article L. 313-11 ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
Considérant en cinquième lieu que, dès lors que M. A ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la condition prévue à l'article L. 311-7 du même code était exigible ; que, par suite, le préfet, qui ne s'est pas cru tenu par cette seule circonstance, n'a pas commis d'erreur de droit en fondant aussi son refus de titre de séjour sur l'absence de détention d'un visa de long séjour par M. A ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire :
Considérant d'abord qu'en vertu des dispositions de l'article L. 511-1, dans sa rédaction alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à être motivée ; que dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision est inopérant ;
Considérant ensuite que pour les mêmes motifs que précédemment, le signataire de la décision litigieuse, M. Latron, est compétent ;
Considérant aussi que, pour les mêmes motifs que précédemment et en l'absence de moyens spécifiques dirigés contre l'obligation de quitter le territoire, cette décision ne méconnaît ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ni l'article L. 313-11 7° dans sa rédaction alors applicable du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur la situation familiale et personnelle du requérant ;
Considérant enfin qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces dispositions, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre une mesure d'éloignement, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A et son épouseA ne justifient d'aucun droit au séjour en France ; que la décision litigieuse n'a pas pour effet de séparer les enfants, dont les deux derniers sont au demeurant en bas âge, de leurs parents ; qu'il n'est pas soutenu que son fils aîné, scolarisé en France, ne pourrait pas suivre hors du territoire national une scolarité normale ; qu'il suit de là que la décision portant obligation de quitter le territoire ne méconnaît pas l'article 3-1° de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de M. AX tendant à ce que la cour enjoigne sous astreinte au préfet de délivrer un titre de séjour ou à défaut, de réexaminer sa demande, doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement au conseil de M. AX de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
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N° 09MA04457