Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2011, présentée pour M. Mohamed A, demeurant au ..., par Me Conciatori-Bouchard ;
M. A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100781 du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 6 janvier 2011 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt en application des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1500 euros au profit de Me Conciatori-Bouchard qui s'engage à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mai 2012 :
- le rapport de Mme Carotenuto, rapporteur,
- et les observations de Me Conciatori, avocat, représentant M. A ;
Considérant que M. A, de nationalité tunisienne, a présenté le 11 juin 2010 à la préfecture des Bouches-du-Rhône une demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 6 janvier 2011, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ; que l'intéressé relève appel du jugement du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision du 6 janvier 2011 ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que les modalités de notification d'un jugement sont sans conséquence sur sa régularité ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification du jugement au regard des dispositions de l'article R. 751-2 du code de justice administrative doit, en tout état de cause, être écarté comme inopérant ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens en vertu de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11º A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. " ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 11 mai 1998, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l' article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
Considérant qu'il ressort de l'avis du médecin inspecteur de santé publique du 12 octobre 2010, que l'état de santé de M. A, souffrant de dépression majeure réactionnelle à des pathologies médicales et à son échec d'insertion, de diabète et d'hypertension artérielle, nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que l'intéressé devait pouvoir bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque ; que si le certificat médical du docteur B du 8 juillet 2010 produit indique que l'état de santé de M. A nécessite sa présence en France, il ne comporte aucune précision de nature à démontrer que son auteur aurait disposé d'informations précises et fiables concernant les structures sanitaires, les médicaments et soins disponibles en Tunisie et ne saurait dès lors suffire à démontrer que le médecin inspecteur aurait à tort estimé que M. A pouvait bénéficier dans son pays des soins et du suivi appropriés à son état de santé ; que si M. A soutient que, faute notamment de disposer de revenus ou d'une couverture sociale en Tunisie, il ne pourrait pas bénéficier effectivement des soins qui lui sont nécessaires, il n'apporte aucun élément de nature à justifier de l'impossibilité de bénéficier d'un tel traitement en Tunisie alors que le préfet a produit en première instance diverses pièces établissant l'existence d'une offre de soins suffisante ainsi que l'accessibilité et la gratuité desdits soins en Tunisie concernant les familles nécessiteuses et une liste d'affections prises en charge intégralement, notamment celles dont souffre M. A ; qu'ainsi, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article précité ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7°A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
Considérant que M. A soutient que le centre de ses intérêts privés, familiaux et professionnels est sur le territoire français ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France le 17 novembre 2007 à l'âge de 50 ans ; que s'il soutient avoir une compagne en France depuis deux ans il ne l'établit pas, alors qu'il ressort notamment du rapport médical du Dr B du 8 juillet 2010 que l'intéressé est séparé de cette dernière ; qu'en outre, dans son pays d'origine résident son épouse et ses six enfants ainsi que ses parents et cinq de ses sept frères et soeurs ; que, dans ces conditions, et alors même que deux de ses frères et soeurs résident sur le territoire national, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas porté une atteinte excessive au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'un tel moyen n'est opérant qu'à l'encontre de la décision qui fixe le pays de destination de son éloignement ; que si M. A soutient que l'impossibilité d'accès à des soins appropriés en Tunisie l'exposerait à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 précité, comme il a été dit ci-dessus, l'intéressé n'établit pas qu'il ne pourrait bénéficier dans son pays des soins et du suivi appropriés à son état de santé ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mohamed A et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
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N° 11MA01767 2
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