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10/06/2014 | FRANCE | N°14MA00189

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 10 juin 2014, 14MA00189


Vu, I, sous le n° 14MA00189, la requête enregistrée au greffe de la Cour le

8 janvier 2014 (télécopie régularisée par l'envoi de l'original reçu le 20 janvier 2014), présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me D...B... ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302177 du 4 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

8 avril 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire f

rançais dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, à...

Vu, I, sous le n° 14MA00189, la requête enregistrée au greffe de la Cour le

8 janvier 2014 (télécopie régularisée par l'envoi de l'original reçu le 20 janvier 2014), présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me D...B... ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302177 du 4 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du

8 avril 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet sous astreinte de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 avril 2013 susmentionné ;

3°) d'enjoindre sous astreinte au préfet de lui délivrer une carte de séjour "vie privée et familiale" au titre de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , ou un titre de séjour à titre "exceptionnel ou humanitaire" en application de l'article L. 313-14, ou en qualité d'étranger malade au titre de l'article L. 313-11-11°, ou en qualité de "visiteur", dans un délai de dix jours à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard ;

4°) de mettre la somme de 1 200 euros à la charge de l'État sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu, II, sous le n° 14MA00190, la requête enregistrée au greffe de la Cour le

8 janvier 2014 (télécopie régularisée par l'envoi de l'original reçu le 20 janvier 2014), présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me D...B..., ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'ordonner la suspension de l'arrêté du 8 avril 2013 du préfet des Alpes-Maritimes qui lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation de séjour, dans l'attente de l'arrêt au fond ;

3°) de mettre la somme de 1 200 euros à la charge de l'État sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 8 avril 2013 dont la suspension est demandée ;

Vu les autres pièces de chacun des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu le décret n° 2011-1950 du 23 décembre 2011 modifiant le code de justice administrative, notamment les dispositions de ses articles 1er à 11 relatives à la dispense de conclusions du rapporteur public et au déroulement de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2014 :

- le rapport de M. Renouf, rapporteur ;

1. Considérant que M.C..., de nationalité tunisienne, né le 21 septembre 1974, entré en France en 2009 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un premier titre de séjour par courrier du 28 décembre 2012 ; que, par un arrêté du 8 avril 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que, par un jugement du 4 octobre 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation de cet arrêté du 8 avril 2013 ;

Sur la jonction :

2. Considérant que, dans la requête enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 14MA00189, M. C...demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 octobre 2013 susmentionné, et dans la requête enregistrée sous le n° 14MA00190, il demande à la Cour d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 avril 2013 en litige dans l'instance n 14MA00189 ; qu'il y a lieu de joindre les deux requêtes pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 14MA00189 :

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 8 avril 2013 en tant qu'il porte refus de séjour :

3. Considérant qu'aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile , la carte de séjour vie privée et familiale est délivrée : " A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

4. Considérant que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de la demande de titre de séjour en date du 28 décembre 2012 présentée pour M.C..., que l'intéressé n'a alors pas sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement de l'article L. 311-13-11° précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour "vie privée et familiale" sur le fondement de l'article L. 313-14 du même code qui permet à l'administration de délivrer un tel titre pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels ; qu'il n'a par ailleurs produit aucun certificat médical attestant que son état de santé nécessitait la poursuite de son séjour en France ; qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu de saisir pour avis le médecin de l'agence régionale de santé avant de statuer sur sa demande ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 avril 2013 aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que si M. C...fait valoir qu'à la suite de l'agression dont il a été victime le 21 septembre 2012, il a subi un grave un traumatisme physique et psychique, que son état n'est pas consolidé après deux opérations chirurgicales, qu'il devra se rendre aux convocations de l'expert ainsi qu'à celle du tribunal, que la régularisation de sa situation administrative est nécessaire afin de lui permettre de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions, ces circonstances ne sont pas à elles-seules de nature à faire regarder la demande de titre de séjour présentée par le requérant comme ressortissant à des considérations humanitaires ou justifiant de motifs exceptionnels tels que prévus à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en troisième lieu, que M. C...soutient devant la Cour qu'il demeure atteint de troubles qui nécessitent un suivi tant sur le plan physique que psychiatrique, qu'il est pris en charge en France par d'excellents spécialistes et ne saurait trouver une telle qualité de soins dans son pays d'origine ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être rejeté ;

8. Considérant enfin qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que si M. C...fait valoir qu'il est entré en France en 2009 et qu'il y réside depuis cette date, qu'il y a tissé des liens amicaux et sentimentaux, qu'il vit avec sa compagne, il ressort des pièces du dossier qu'il ne justifie pas de la date de son entrée sur le territoire national, qu'il est célibataire, sans enfant à charge, qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales en Tunisie où réside sa mère et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 avril 2013 n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que la circonstance, à la supposer établie, que M. C...soit bien intégré à la société française n'est pas de nature à faire regarder l'arrêté du préfet comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 8 avril 2013 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. C...n'établit pas que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne pourrait bénéficier de la prise en charge médicale qui lui est nécessaire dans son pays d'origine ; que par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Alpes-Maritimes aurait méconnu les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 8 avril 2013 en tant qu'il fixe la Tunisie comme pays de destination :

11 Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant que M. C...se borne à soutenir que la situation politique est instable en Tunisie et que l'insécurité règne dans le pays ; que, toutefois, il n'apporte, à l'appui de ses allégations, aucun élément de nature établir la réalité des risques actuels et personnels auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, en désignant ce pays comme pays de destination, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que les conclusions en annulation de M. C...doivent, dès lors, être rejetées ; que, par suite, ses conclusions à fin d'astreinte de même que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la requête n° 14MA00190 :

14. Considérant que la Cour statue par le présent arrêt sur les conclusions de la requête formée par M. C...contre le jugement du tribunal administratif de Nice du 4 octobre 2013 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du

8 avril 2013 ; que, par suite, les conclusions de la requête n° 14MA00190 tendant à ce que la Cour ordonne la suspension de l'exécution de cet arrêté sont devenues sans objet ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 14MA00189 de M. C...est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 14MA00190 de M.C....

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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N° 14MA00189, 14MA001902


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00189
Date de la décision : 10/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe RENOUF
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : COHEN ; COHEN ; COHEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-06-10;14ma00189 ?
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