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19/06/2014 | FRANCE | N°12MA04637

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 19 juin 2014, 12MA04637


Vu, enregistrée le 4 décembre 2012, la requête présentée pour Mme C...B...A..., demeurant ... par Me Murugan, avocate ; Mme B...A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202567 du 5 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 mai 2012 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 23 mai 2012 susmentionnée ;

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) à titre principal, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant...

Vu, enregistrée le 4 décembre 2012, la requête présentée pour Mme C...B...A..., demeurant ... par Me Murugan, avocate ; Mme B...A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202567 du 5 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 mai 2012 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 23 mai 2012 susmentionnée ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant mention "vie privée et familiale" dans le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, dans le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt, sous la même condition d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à Me Murugan en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide ;

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Vu le jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 12 février 2013, admettant Mme B... A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation du jugement a, sur le fondement de l'article L. 732-1 du code de justice administrative, décidé, sur proposition du rapporteur public, de dispenser celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2014 le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

1. Considérant que Mme B...A..., de nationalité capverdienne, interjette appel du jugement du 5 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 mai 2012 par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...A...a demandé au préfet des Alpes-Maritimes, par courrier du 24 juin 2009, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette demande a été rejetée par décision du 23 juillet 2009 ; qu'elle a déposé une nouvelle demande de titre de séjour par un courrier notifié au préfet le 6 janvier 2012, qui a fait l'objet d'un classement sans suite le 18 avril 2012, au motif que cette demande n'était pas accompagnée des timbres fiscaux exigés par l'article L. 311-13 D du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, statuant sur cette même demande, le préfet a, par la décision litigieuse du 23 mai 2012, refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que, si la requérante soutient que la décision litigieuse serait irrégulière pour être fondée sur une demande irrecevable pour le motif susmentionné et qui avait déjà fait l'objet d'un classement sans suite, la circonstance que sa nouvelle demande était irrecevable, résultant d'ailleurs de son fait, ne faisait pas obstacle à ce que le préfet, s'il le jugeait préférable en l'espèce, procède à l'examen de sa demande pour la rejeter au fond et pour l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français, ainsi que l'ont estimé à juste titre les premiers juges ; qu'en tout état de cause, la décision litigieuse du 23 mai 2012 a implicitement mais nécessairement retiré la décision de classement sans suite susmentionnée du 18 avril 2012 ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que Mme B...A...soutient qu'elle établit être présente en France depuis l'année 2001 ; que, toutefois, à défaut notamment de produire l'intégralité de son passeport depuis cette date, elle n'établit pas la continuité de son séjour en France depuis 2001 ; que la requérante ne peut utilement soutenir que le préfet aurait conservé les pièces, qu'elle aurait versées à l'appui de sa demande de titre de séjour, justifiant de sa présence en France en 2002 ; que ni sa demande d'aide médicale de l'Etat datée du 11 janvier 2003, ni la prescription médicale du 20 août 2004 n'établissent à elles-seules sa présence continue en France en 2003 et 2004 ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, pour apprécier la réalité de sa vie privée et familiale en France, qu'elle ne justifiait pas d'une résidence ininterrompue en France depuis plus de 10 ans à la date de la décision litigieuse ; que si Mme B...A..., célibataire, fait aussi valoir qu'elle a une vie commune depuis la fin de l'année 2009 avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour portugais, dont elle a eu un enfant le 12 juin 2012, postérieurement à la décision litigieuse, il ressort des pièces du dossier que ce titre de séjour est temporaire, d'une durée d'un an ; que, si elle soutient également que son concubin s'occuperait quotidiennement avec elle de cet enfant, ainsi que du premier enfant, né en 2007, que la requérante a eu avec un autre compatriote en situation régulière, la seule attestation de son compagnon ne suffit pas à établir la réalité de ces dires ; qu'elle n'établit cette vie commune qu'à compter de février 2011, par des quittances de loyer établies à leurs deux noms ; qu'elle n'établit pas non plus que le père de son premier enfant contribue régulièrement à l'éducation et à l'entretien de ce dernier ; qu'elle n'établit pas, ni même n'allègue que sa fille ainée, scolarisée en classe de maternelle, ne pourrait suivre une scolarité normale dans son pays d'origine ; que la circonstance que sa soeur et ses neveux soient en situation régulière en France ne lui ouvre pas, par elle-même, droit au séjour ; que les dispositions susvisées ne consacrent pas un droit aux étrangers de choisir librement le pays où établir leur vie familiale ; qu'elle ne soutient pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 20 ans ; que, dans ces conditions, elle n'établit pas avoir constitué le centre de sa vie privée et familiale en France ; qu'ainsi, et alors même qu'elle ne constituerait pas une menace à l'ordre public et qu'elle serait bien intégrée en France, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions d'entrée et de séjour, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de ce que le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des doits de l'homme et des libertés fondamentales en lui refusant un titre de séjour devait être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des éléments qui précèdent que le préfet des Alpes-Maritimes n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour prévue aux articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que Mme B...A...ne remplissait pas les conditions permettant la délivrance de plein droit d'un titre de séjour au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, d'abord, que les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée prévoient que la décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français doit être motivée et qu'elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ; que la décision de refus de titre de séjour est suffisamment motivée en fait et en droit ; qu'il en résulte qu'ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire serait insuffisamment motivée doit être écarté ;

7. Considérant, ensuite, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dispositions, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la requérante n'établit pas que les deux pères de ses deux enfants participeraient effectivement à l'entretien et à l'éducation de leur enfant respectif ; que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas pour objet ni pour effet de séparer les enfants de leur mère ; que la requérante n'établit pas que sa fille ainée ne pourrait pas suivre une scolarité normale au Cap Vert ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français faite à Mme B...A...méconnaîtrait l'article 3-1° de la convention relative aux droits de cette enfant a été écarté à bon droit par les premiers juges ;

9. Considérant, enfin, qu'en l'absence d'argumentation spécifique invoquée par la requérante à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus lors de l'examen de la légalité du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de Mme B...A...tendant à ce que la Cour enjoigne sous astreinte au préfet de délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme B... A...de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...A..., à Me Murugan et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04637
Date de la décision : 19/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : MURUGAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-06-19;12ma04637 ?
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