Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2012, présentée pour Mme A...C..., demeurant au..., par MeB... ;
Mme C... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1206039 du 15 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes de Haute-Provence en date du 10 août 2012 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes de Haute-Provence de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à défaut, d'instruire à nouveau sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 15 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2015 :
- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, rapporteur,
- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme C..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 15 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes de Haute-Provence en date du 10 août 2012 portant refus de renouvellement de son titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
Sur la légalité de la décision de refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ;
3. Considérant que la décision de refus de séjour contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui démontrent, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, que le préfet, lequel n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des circonstances relatives à la situation personnelle de la requérante, a procédé à un examen particulier de cette situation ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que, si les dispositions de l'article L. 313-14 du code susmentionné permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ressort des termes mêmes de cet article, et notamment de ce qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour, que le législateur n'a pas entendu déroger à la règle susrappelée ni imposer à l'administration, saisie d'une demande d'une carte de séjour, quel qu'en soit le fondement, d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article ; que, dès lors qu'il n'est pas contesté que la demande présentée le 2 juillet 2012 par la requérante, tendait au renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjointe de français, l'intéressée, qui ne justifie ni même n'allègue avoir alors fait état de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14, ne peut utilement soutenir que le préfet des Alpes de Haute-Provence aurait dû faire porter son examen de sa situation personnelle au regard de tels motifs et aurait dû en faire mention dans l'arrêté en litige et se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en troisième lieu, que l'article 9 de l'accord franco-marocain susvisé stipule que : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux États sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations que ledit accord ne fait pas obstacle à l'application aux ressortissants marocains des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lorsque ces dispositions régissent des situations non traitées par cet accord ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été dit plus haut, la demande présentée le 2 juillet 2012 par Mme C...auprès des services du préfet des Alpes de Haute-Provence tendait au renouvellement de la carte de séjour temporaire qui lui avait été délivrée le 28 juillet 2011 en qualité de conjoint de français ; que, dès lors que ce point n'est pas spécifiquement traité par l'accord franco-marocain susvisé, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Alpes de Haute-Provence aurait commis une erreur de droit en prenant l'arrêté critiqué sur le fondement des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français... " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 dudit code : " La carte délivrée au titre de l'article L. 313-11 donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle. / Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement (...) " ; que les violences psychologiques constituent des violences conjugales au sens de l'article L. 313-12 précité ; qu'en outre, un étranger peut se prévaloir des dispositions de cet article lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de son conjoint ;
7. Considérant que la requérante, qui a épousé à Casablanca, le 10 février 2009, M. C..., de nationalité française, soutient qu'elle n'est pas à l'origine de la rupture de la vie commune avec son époux de nationalité française, et qu'ayant été évincée et expulsée du domicile conjugal par son époux et la famille de celui-ci, elle a subi des violences conjugales au sens de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, si de tels faits, commis par le conjoint, sont susceptibles d'entrer dans le champ d'application dudit article, les pièces produites par la requérante, qui témoignent d'une situation de rupture conflictuelle, ne sont toutefois pas suffisantes pour établir que la rupture de la communauté de vie avec son époux serait consécutive à des violences conjugales au sens du deuxième alinéa de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
9. Considérant que MmeC..., qui déclare être entrée en France le 2 août 2009, à l'âge de 43 ans, fait valoir qu'elle y a fixé le centre de ses intérêts privés et familiaux, dès lors que son frère et l'épouse de celui-ci y résident et qu'elle justifie d'une volonté d'insertion socio-économique révélée notamment par ses progrès en langue française et par ses contrats de travail à temps partiel à durée déterminée en qualité d'agent de service logistique au sein d'une maison de retraite de Digne-les-Bains ; que, toutefois, la requérante, en instance de divorce, est sans enfant et non dépourvue de liens familiaux dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'en 2011 ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en méconnaissance des dispositions et des stipulations précitées, le refus de séjour contesté porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ni que ce refus procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
10. Considérant, enfin, que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, les dispositions précitées de L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile n'imposaient pas au préfet des Alpes de Haute-Provence de soumettre le cas de Mme C...à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant que Mme C...se borne à soutenir, ainsi qu'elle l'avait fait devant les premiers juges, que la décision portant obligation de quitter le territoire français insuffisamment motivée, méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale, est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et que l'examen de sa situation personnelle et familiale faisait obstacle à l'adoption d'une mesure d'éloignement, l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ; que ces moyens, qui ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par la requérante devant le tribunal, ont été écartés à bon droit par les premiers juges ; qu'il y a lieu, dès lors, par adoption des motifs retenus par ceux-ci, d'écarter lesdits moyens ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à et à demander l'annulation desdits jugement et arrêté ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes de Haute-Provence.
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N° 12MA04782
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