Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 24 septembre 2013 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration lui a appliqué la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail pour le montant de 16 800 euros.
Par une ordonnance n° 1306861 du 31 décembre 2013, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2014, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2013 ;
2°) d'annuler la décision du 24 septembre 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce qui équivaudra à une renonciation à l'aide juridictionnelle conformément à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande comme irrecevable à défaut d'acquittement de la contribution pour l'aide juridique ;
- les deux salariés pour lesquels une infraction aux règles de déclaration a été constatée avaient fait l'objet d'une déclaration d'embauche la veille de l'établissement du procès-verbal ;
- il ignorait qu'un ressortissant algérien résidant légalement en Espagne devait disposer d'une autorisation de travail en France ;
- sa bonne foi ne saurait être contestée ;
- le montant réclamé correspond presque au montant du chantier contrôlé ;
- sa société a cessé toute activité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2015, l'Office de l'immigration et de l'intégration, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 800 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens tirés de l'absence d'élément intentionnel, du montant de l'amende en comparaison de celui du chantier et de la cessation d'activité sont inopérants ;
- les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public.
1. Considérant qu'à l'occasion d'un contrôle du 27 octobre 2011, les services de l'URSSAF assistés d'officiers de police judiciaires ont notamment constaté la présence, sur un chantier où intervenait l'entreprise de peinture de M. B..., d'un ouvrier de nationalité algérienne, M.E..., démuni d'un titre de travail l'autorisant à exercer une activité salariée en France ; que, pour ce motif et par décision du 24 septembre 2013, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a appliqué à M. B... la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail pour le montant de 16 800 euros ; que M. B... relève appel de l'ordonnance du 31 décembre 2013 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 septembre 2013 ;
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-2 du code de justice administrative, applicable à la date d'introduction de la demande de première instance : " Lorsque la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts est due et n'a pas été acquittée, la requête est irrecevable (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le tribunal était en possession, avant l'intervention de l'ordonnance attaquée, de la décision du 15 novembre 2013 accordant l'aide juridictionnelle totale à M. B... ; que ce dernier n'était ainsi pas soumis au paiement de la contribution pour l'aide juridique ; que, par suite, l'appelant est fondé à soutenir que le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille ne pouvait rejeter sa demande comme irrecevable à défaut d'acquittement de cette contribution ; que, dès lors, l'ordonnance est entachée d'irrégularité et doit, pour ce motif, être annulée ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Marseille ;
Sur légalité de la décision :
5. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'art L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France " ; que l'article L. 8253-1 de ce code dispose : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat et est au moins égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger sans titre mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider cette contribution (...) " ;
6. Considérant, en premier lieu, que la décision en litige est seulement relative à l'emploi d'un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, sur le fondement des dispositions des articles L. 8251-1 et L. 8253-1 du code du travail ; que, par conséquent, la circonstance, à la supposer établie, que les deux salariés pour lesquels une infraction aux règles de déclaration aux organismes sociaux et aux services fiscaux a été constatée avaient fait l'objet d'une déclaration d'embauche la veille du contrôle est dépourvue d'influence dans la présente instance ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que M. B..., qui ne conteste pas être l'employeur de M.E..., soutient que celui-ci étant un ressortissant algérien titulaire d'un titre de séjour en Espagne, il ignorait qu'il devait disposer d'une autorisation de travail en France ; que, toutefois, et alors au demeurant que ces allégations sont démenties par ses propres déclarations mentionnées sur le procès-verbal du 2 novembre 2011, M. B... ne peut utilement se prévaloir de sa bonne foi à l'appui de sa discussion de la légalité de la décision du 24 septembre 2013 ;
8. Considérant, en troisième et dernier lieu, que pour contester le montant de la contribution spéciale de 16 800 euros, M. B... se borne à faire valoir que ce montant est presque équivalent à celui du chantier contrôlé et que sa société, déficitaire, a cessé toute activité ; que ces moyens n'ont aucune incidence sur la légalité du montant retenu par l'Office français de l'immigration et de l'intégration en application des dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail, précisées par celles de l'article R. 8253-2 ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 24 septembre 2013 ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui n'est pas la partie principalement perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions de l'Office français de l'immigration et de l'intégration présentées au même titre doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Marseille en date du 31 décembre 2013 est annulée.
Article 2 : La demande de première instance présentée par M. B..., le surplus des conclusions de la requête d'appel et les conclusions de l'Office français de l'immigration et de l'intégration tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à l'Office de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 19 mai 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Chanon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juin 2015.
''
''
''
''
N° 14MA00121 4
acr