Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2014 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Par un jugement n° 1401150 du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 7 août 2014, M.B..., représenté par MeD..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 juin 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Hautes-Alpes du 15 janvier 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Hautes-Alpes de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous les mêmes conditions d'astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car il a reconnu par anticipation son enfant, de nationalité française, le 23 janvier 2014 ;
- le préfet des Hautes-Alpes devait saisir la commission du titre de séjour avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour ;
- la décision en litige porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en France depuis six ans, qu'il est bien inséré dans la société française et qu'il est marié avec une ressortissante de nationalité française, avec laquelle il a eu un enfant ;
- cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant car elle aura pour conséquence de le séparer de son enfant ;
- ladite décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; les premiers juges ont commis une erreur de droit en estimant que le préfet n'était pas tenu de réexaminer sa demande sur un tel fondement ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la même décision viole les dispositions de l'article L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- ladite décision méconnaît en outre les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 septembre 2014, le préfet des Hautes-Alpes conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Chenal-Peter, rapporteur.
1. Considérant que, par jugement en date du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.B..., de nationalité guinéenne, tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2014 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que M. B...relève appel de ce jugement ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a reconnu par anticipation, le 23 janvier 2014, l'enfant issu de sa relation avec MmeA..., de nationalité française, lequel est né le 30 juin 2014 ; que, dans ces conditions, l'intéressé ne peut se prévaloir de la qualité de parent d'enfant français à la date du 15 janvier 2014 à laquelle est intervenu l'arrêté préfectoral attaqué ; que le requérant, qui en outre n'établit pas avoir sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut ainsi utilement soutenir que ces dispositions auraient été méconnues ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., entré en France le 10 octobre 2008 sous couvert d'un visa de long séjour en qualité d'étudiant, a bénéficié d'une carte de séjour temporaire valable jusqu'au 15 décembre 2009 puis de récépissés de demande de titre de séjour jusqu'au 1er août 2011 ; que le requérant fait valoir qu'il réside en France de manière habituelle depuis fin 2008, qu'il est bien intégré dans la société française et se prévaut de sa vie familiale avec son épouse et sa fille, toutes deux de nationalité française ; que toutefois, si M. B...a conclu un pacte civil de solidarité le 31 octobre 2013 avec MmeA..., avec laquelle il s'est marié le 1er mars 2014, et si le couple a eu un enfant le 30 juin 2014, il ne peut se prévaloir que d'une vie familiale n'excédant pas quelques mois à la date de l'arrêté attaqué ; qu'en outre, l'intéressé, qui se borne à produire deux certificats de scolarité pour les années 2008 à 2010 et des avis d'imposition ne mentionnant aucun revenu, n'apporte pas assez d'éléments pour justifier de sa présence habituelle sur le territoire français depuis 2008 ; qu'enfin, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt et un ans ; que dès lors, eu égard au caractère récent de sa relation avec MmeA..., le préfet des Hautes-Alpes n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'arrêté contesté ; que par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) " ;
7. Considérant que si M. B...fait valoir qu'il travaille au centre hospitalier d'Aiguilles dans le cadre de contrats à durée déterminée depuis le mois d'octobre 2013, il n'établit pas avoir, dans sa demande du 2 décembre 2013 sur laquelle s'est prononcé l'arrêté critiqué, sollicité un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet des Hautes-Alpes n'était pas tenu, contrairement à ce qui est soutenu, d'examiner sa demande sur un tel fondement ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut être utilement invoqué à l'encontre de l'arrêté attaqué ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
9. Considérant que l'enfant de M. B...n'était pas né à la date de la décision attaquée ; que par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention internationale des droits de l'enfant, alors même qu'il a reconnu sa fille par anticipation ;
10. Considérant que les articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile disposent que : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...). / La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12 (...) " ;
11. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles précités auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;
12. Considérant que M. B...n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu, en application de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). " ;
14. Considérant que M.B..., qui ne peut justifier d'un séjour régulier en France depuis le 1er août 2011, date de l'expiration du dernier récépissé dont il a bénéficié, et auquel la délivrance d'un titre de séjour a été refusée par l'arrêté en litige, entre dans le champ d'application des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement desquelles le préfet des Hautes-Alpes pouvait légalement prendre une décision l'obligeant à quitter le territoire français, et ce alors même qu'il est entré en France de manière régulière le 10 octobre 2008 ;
15. Considérant qu'il suit de ce qui a été dit précédemment que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ; qu'il ne peut par suite se prévaloir de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions en annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
16. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, qui reprennent ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés ; qu'en outre, M. B...ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de ladite convention, qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits à leurs ressortissants ;
17. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) " ; que M. B...n'étant pas le père d'un enfant français à la date de l'arrêté contesté, ainsi qu'il a été dit précédemment, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise en violation des dispositions précitées doit être écarté ;
18. Considérant que les éléments de la vie privée et familiale de M. B...exposés ci-dessus ne suffisent pas à démontrer que le préfet des Hautes-Alpes aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant ;
En ce qui concerne la décision fixant un délai de départ volontaire :
19. Considérant que si M. B...se prévaut de ses qualités de conjoint d'une ressortissante française et de parent d'enfant français, ces circonstances ne sont pas à elles-seules de nature, alors que son mariage et la naissance de sa fille sont postérieurs à la décision critiquée, à démontrer que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en limitant à trente jours le délai de départ volontaire qui lui a été accordé ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
21. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M.B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les conclusions à fin d'injonction formées par le requérant ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
22. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
23. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. B...quelque somme que ce soit au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Alpes.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015 où siégeaient :
- M. Cherrier, président de chambre,
- M. Martin, président assesseur,
- Mme Chenal-Peter, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 22 septembre 2015.
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N° 14MA03541 2
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