Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par un jugement n° 1200951 du 11 mars 2014 le tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de M. et Mme C... tendant à l'annulation de l'article 2 de l'arrêté du 15 octobre 2012 par lequel le maire de Ville-di-Pietrabugno leur a opposé des prescriptions à la réalisation du mur de clôture qu'ils envisageaient de réaliser sur leur propriété, ainsi que par voie de conséquence, celle de la réserve prévue à l'article 1er de cet arrêté leur faisant obligation de respecter cet article 2.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 mai 2014, et un mémoire enregistré le 27 octobre 2014, M. et Mme C..., représentés par Me D..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 11 mars 2014 ;
2°) d'annuler l'article 2 de l'arrêté du 15 octobre 2012 du maire de Ville-di-Pietrabugno en tant qu'il soumet à des prescriptions la réalisation du mur de clôture sur leur propriété ainsi que par voie de conséquence, celle de la réserve prévue à l'article 1er de cet arrêté leur faisant obligation de respecter cet article 2 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Ville-di-Pietrabugno une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur seconde note en délibéré déposée le 28 février 2014 n'a pas été visée par le jugement, qui est de ce fait entaché d'irrégularité ;
- les travaux en cause n'étaient pas soumis à autorisation car, premièrement, la réalisation des murs de soutènement est dispensée de toute formalité en vertu de l'article R. 421-3 du code de l'urbanisme, deuxièmement, à la date de sa réalisation le mur de clôture n'était pas soumis à autorisation par le plan local d'urbanisme, troisièmement, la construction du mur de clôture avait été autorisée par le permis de construire leur maison ;
- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles 640 et 641 du code civil ;
- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Un courrier du 22 septembre 2014 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 7 octobre et 31 décembre 2014, la commune de Ville-di-Pietrabugno représentée par son maire en exercice, représenté par la SCP Tomasi-Santini-B... de Caraffa-Taboureau, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge des requérants du versement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Une ordonnance du 10 avril 2015 a fixé la clôture de l'instruction à la date de son émission en application des dispositions des articles R. 613-1 et R. 611-11-1 du code de justice administrative.
Un nouveau mémoire, enregistré le 23 avril 2015, a été présenté pour M. et Mme C... après la clôture de l'instruction et n'a pas fait l'objet d'une communication en application des dispositions de l'article R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport M. Argoud,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- les observations de Me D...représentant M. et Mme C... et celles de Me B... représentant la commune de Ville-di-Pietrabugno.
Une note en délibéré, enregistrée le 13 octobre 2015, a été présentée pour la commune de Ville-di-Pietrabugno.
1. Considérant que, par un arrêté du 15 octobre 2012, le maire de Ville-di-Pietrabugno a assorti de prescriptions l'autorisation délivrée à M. et Mme C... pour la construction d'un mur de clôture de leur terrain ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que celle-ci ne comporte pas le visa de la seconde note en délibéré qui a été présentée, par courrier postal, par M. et Mme C... et enregistrée au greffe du tribunal administratif de Bastia le 28 février 2014 ; que les requérants sont donc fondés à soutenir que le jugement est irrégulier et à en demander pour ce motif l'annulation ;
3. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Bastia ;
Sur la légalité des prescriptions de l'arrêté du 15 octobre 2012 :
4. Considérant, en premier lieu, que l'administration ne peut assortir une autorisation d'urbanisme de prescriptions qu'à la condition que celles-ci, entraînant des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d'un nouveau projet, aient pour effet d'assurer la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect ; que le titulaire d'une autorisation d' urbanisme est recevable à demander l'annulation d'une ou de plusieurs prescriptions dont celle-ci est assortie ; qu'il peut utilement soulever à l'appui de telles conclusions tout moyen relatif au bien-fondé des prescriptions qu'il critique ou au respect des exigences procédurales propres à leur édiction ; que, toutefois, le juge ne peut annuler ces prescriptions, lorsqu'elles sont illégales, que s'il résulte de l'instruction qu'une telle annulation n'est pas susceptible de remettre en cause la légalité de l'autorisation d'urbanisme et qu'ainsi ces prescriptions ne forment pas avec elle un ensemble indivisible ;
5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-4 du code de l'urbanisme, en vigueur depuis le 1er octobre 2007 : " Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, en raison de leurs dimensions, de leur nature ou de leur localisation, ne justifient pas l'exigence d'un permis et font l'objet d'une déclaration préalable. " ; qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code, dans sa rédaction issue du décret du 19 novembre 2009 en vigueur du 1er décembre 2009 au 15 janvier 2012 : " Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, sauf lorsqu'ils sont implantés dans un secteur sauvegardé ou dans un site classé : (...). g) Les clôtures, en dehors des cas prévus à l'article R. 421-12, ainsi que les clôtures nécessaires à l'activité agricole ou forestière.. " ; qu'aux termes de l'article R. 421-12 de ce code, dans sa rédaction issue du décret du 5 janvier 2007 en vigueur du 1er octobre 2007 au 22 décembre 2011 : " Doit être précédée d'une déclaration préalable l'édification d'une clôture située : (...) d) Dans une commune ou partie de commune où le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme a décidé de soumettre les clôtures à déclaration " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la lettre du maire de la commune du 17 avril 2012, invitant les intéressés à régulariser la construction du mur de clôture de leur propriété, que ce mur a été construit en février 2010 ; qu'à cette date, les murs de clôtures, projetés dans un secteur n'étant ni un secteur sauvegardé ni un site classé comme c'est le cas en l'espèce, étaient, en vertu des dispositions précitées des articles R. 421-2 et R. 421-12 du code de l'urbanisme, dispensés de toute formalité, sous réserve que les prescriptions du plan local d'urbanisme n'imposent pas, dans un secteur déterminé, le dépôt d'une déclaration préalable ; qu'il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme de la commune, qui a d'ailleurs été modifié le 5 novembre 2010 pour soumettre les clôtures à déclaration préalable, ne comportait pas de dispositions règlementant les murs de clôture ; que dès lors qu'aucune déclaration préalable n'était imposée pour la réalisation du mur en cause, le maire de Ville-di-Pietrabugno ne pouvait ni légalement s'opposer à la déclaration déposée par M. et Mme C... ni, comme il l'a fait par l'arrêté contesté du 15 octobre 2012, assortir d'une quelconque prescription la décision de ne pas s'y opposer ; qu'il suit de là que les prescriptions en cause, qui sont divisibles de ladite autorisation, sont entachées d'illégalités ; que, dès lors, M. et Mme C... sont recevables et fondés à demander l'annulation de l'article 2 de l'arrêté du 15 octobre 2012 du maire de Ville-di-Pietrabugno en tant qu'il soumet à des prescriptions la réalisation du mur de clôture sur leur propriété ainsi que par voie de conséquence, celle de la réserve prévue à l'article 1er de cet arrêté leur faisant obligation de respecter cet article 2 ;
7. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens invoqués par M. et Mme C... ne sont de nature à fonder également l'annulation desdites prescriptions ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8 Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de Ville-di-Pietrabugno une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise sur leur fondement à la charge des requérants qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par la commune et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1200951 du 11 mars 2014 du tribunal administratif de Bastia est annulé.
Article 2 : L'article 2 de l'arrêté du 15 octobre 2012 par lequel le maire de Ville-di-Pietrabugno a émis des prescriptions concernant la réalisation du mur de clôture réalisé par M. et Mme C... et la réserve prévue à l'article 1er de cet arrêté leur faisant obligation de respecter cet article 2 sont annulés.
Article 3 : La commune de Ville-di-Pietrabugno versera à M. et Mme C... une somme de 2 000 (deux mille) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Ville-di-Pietrabugno sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... C...et à la commune de Ville-di-Pietrabugno.
Copie en sera adressée au préfet de Haute-Corse.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2015, à laquelle siégeaient :
Mme Buccafurri, présidente,
M. Portail, président assesseur,
M. Argoud, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 6 novembre 2015.
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N° 14MA02066