Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du
3 novembre 2004 par lequel le recteur de l'académie d'Aix-Marseille l'a classé au 5ème échelon du corps des professeurs de lycée professionnel à compter du 1er septembre 2004, ainsi que la décision implicite dudit recteur rejetant sa demande de retrait de l'arrêté du 3 novembre 2004, formée le 21 février 2013, et d'enjoindre au recteur de reconstituer sa carrière.
Par un jugement n°s 1101947, 1304049 du 28 mai 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté, après les avoir jointes, les demandes de M.B....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 juin 2014, M.B..., représenté par
MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 mai 2014 ;
2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du 3 novembre 2004 étant nul et non avenu dès lors qu'il aurait dû être reclassé au 7ème échelon au lieu du 5ème, le recours qu'il a introduit contre un acte inexistant peut donc l'être sans condition de délai ;
- cet arrêté est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît le principe d'égalité entre agents publics dès lors qu'un professeur se trouvant dans une situation identique à la sienne a été promu au 7ème échelon ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il est entaché d'erreur de droit dès lors qu'il n'a pas été admis à concourir en qualité d'enseignant certifié ou de cadre en vertu des dispositions de l'article 6.1 du décret du
6 novembre 1992 mais en considération de ses années de pratique et d'expérience professionnelles et d'un diplôme de niveau V en application de l'article 6.4 dudit décret ; il appartenait dès lors au recteur de prendre en compte la totalité de ses années d'activité professionnelle soit un total de vingt et sept mois rapporté au 2/3.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2005, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 3 novembre 2004 sont irrecevables car tardives ;
- la décision contestée n'avait pas à être motivée au sens de l'article 1er de la loi du
11 juillet 1979 ;
- le reclassement de M. B...n'est en rien entaché d'erreur de droit dès lors qu'ayant été admis à concourir sur la base des dispositions de l'article 6.1 du décret du
6 novembre 1992, il revenait à l'administration de strictement appliquer les dispositions relatives au reclassement prévues par ledit article ; dans ce dispositif, les années d'activité professionnelle exercées alors qu'il n'était pas cadre ne pouvaient être prises en compte ;
- la décision attaquée n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le moyen tiré de la rupture d'égalité n'est pas fondé, M. B...ne pouvant se prévaloir de la situation d'un autre agent.
Par ordonnance du 30 juin 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 17 juillet 2015 à 12h00.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;
- le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel ;
- le décret n° 51-1423 du 5 décembre 1951 portant règlement d'administration publique pour la fixation des règles suivant lesquelles doit être déterminée l'ancienneté du personnel nommé dans l'un des corps de fonctionnaires de l'enseignement relevant du ministère de l'éducation nationale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Pena,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.
1. Considérant que, lauréat à la session 2003 du concours externe de recrutement de professeurs de lycée professionnel section " métiers de l'alimentation " option " pâtisserie ",
M. B...a été affecté en septembre 2004 dans l'académie d'Aix-Marseille ; que, par arrêté du 3 novembre 2004, le recteur de ladite académie l'a classé à compter du 1er septembre 2004 au 5ème échelon du grade des professeurs de lycée professionnel, avec une ancienneté d'un an,
sept mois et onze jours ; que M. B...relève appel du jugement du 28 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de cet arrêté ainsi que de la décision implicite du recteur de l'académie d'Aix-Marseille rejetant sa demande de retrait dudit arrêté formée le 21 février 2013, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de reconstituer sa carrière ;
Sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal administratif :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ;
3. Considérant que, si l'arrêté du 3 novembre 2004 classant M. B...au
5ème échelon du grade des professeurs de lycées professionnels mentionnait le délai de recours contentieux dont l'intéressé disposait à l'encontre de cet arrêté, il ne comportait en revanche aucune indication des voies de recours contentieux ; qu'aucune des décisions expresses du recteur de l'académie d'Aix-Marseille, qu'il s'agisse de celle du 14 décembre 2004 ou de celle du 3 novembre 2010 rejetant les deux recours gracieux formés par l'intéressé les
23 novembre 2004 et 20 septembre 2010, ne contenait d'indication des voies et délais de recours contentieux ; qu'ainsi, en vertu des dispositions précitées et contrairement à ce que lui oppose le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, M. B...n'était pas forclos à demander l'annulation de l'arrêté du 3 novembre 2004 dans sa demande enregistrée le 16 mars 2010 au greffe du tribunal administratif ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du décret du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel : " Le concours externe donnant accès au corps des professeurs de lycée professionnel est ouvert : / 1. Aux candidats justifiant d'une licence ou d'un titre ou diplôme équivalent sanctionnant au moins trois années d'études après le baccalauréat, délivré par un établissement d'enseignement ou une école habilitée par la commission des titres d'ingénieur, ou d'un titre ou diplôme de l'enseignement technologique homologué aux niveaux I et II en application de la loi du 16 juillet 1971 susvisée ou d'un autre titre ou diplôme permettant de se présenter au concours externe du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement technique ; / 2. Aux candidats ayant ou ayant eu la qualité de cadre au sens de la convention collective du travail dont ils relèvent ou relevaient et justifiant de cinq années d'activité professionnelle effectuées en leur qualité de cadre ; [...] 4. Dans les spécialités pour lesquelles il n'existe pas de diplôme supérieur au niveau IV au sens de la loi du 16 juillet 1971 susvisée, aux candidats justifiant de sept années de pratique professionnelle ou d'enseignement de cette pratique dans la spécialité pour laquelle ils concourent et d'un diplôme de niveau IV ou de huit ans de pratique professionnelle ou d'enseignement de cette pratique dans la spécialité pour laquelle ils concourent et d'un diplôme de niveau V ; [...] " ; qu'aux termes de l'article 22 de ce même décret : " Les professeurs de lycée professionnel sont reclassés conformément aux dispositions du décret du 5 décembre 1951 susvisé [...] Les candidats mentionnés aux 1 et 2 de l'article 6 et au 1 de l'article 7 ci-dessus justifiant d'au moins cinq années d'activité professionnelle en qualité de cadre, sont classés dans le corps des professeurs de lycée professionnel à un échelon déterminé en prenant en compte les années d'activité professionnelle qu'ils ont accomplies en cette qualité avant leur nomination comme stagiaire, dans les conditions prévues par le présent décret, conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 7 du décret du 5 décembre 1951 susvisé " ; et qu'aux termes de l'article 7 du décret du 5 décembre 1951 susvisé : " Les années d'activité professionnelle que les fonctionnaires chargés des enseignements techniques théoriques ou pratiques ont accomplies avant leur nomination, conformément aux conditions exigées par leur statut particulier, sont prises en compte dans l'ancienneté pour l'avancement d'échelon, à raison des deux tiers de leur durée à partir de la date à laquelle les intéressés ont atteint l'âge de vingt ans. " ;
5. Considérant que, pour justifier le classement d'échelon de M. B...lors de son admission au concours externe d'accès au grade de professeur de lycée professionnel en pâtisserie, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche indique avoir fait application de l'article 6.1 du décret du 6 novembre 1992 susmentionné combiné avec les dispositions de l'article 22 du même décret, lesquelles ne permettent de prendre en considération au titre de l'ancienneté pour le classement à un échelon déterminé, que les seules années d'activité professionnelle accomplies en tant que cadre ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de confirmation d'inscription au concours signée et datée par l'intéressé mais pré-remplie par l'administration, que M. B...a été admis à concourir en justifiant de huit années de pratique professionnelle et d'un diplôme de niveau V, titres requis par les dispositions de l'article 6.4 du décret du 6 novembre 1992 ; que la restriction prévue par l'article 22 dudit décret ne trouvant pas à s'appliquer dans ce cadre, il appartenait dès lors au recteur de prendre en compte, ainsi que le fait valoir le requérant, la totalité de ses années d'activité professionnelle, soit un total de vingt ans et sept mois rapporté au 2/3, en application des dispositions de l'article 7 du décret du 5 décembre 1951 ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 novembre 2004, ensemble la décision implicite du recteur de l'académie d'Aix-Marseille rejetant sa demande de retrait dudit arrêté formée le
21 février 2013 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche procède au reclassement de M.B..., à compter du 1er septembre 2004, date de son affectation au sein de l'académie d'Aix-Marseille, ainsi qu'à la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux à compter de cette même date, conformément aux énonciations du présent arrêt ; qu'il y a lieu d'enjoindre audit ministre de prendre les mesures nécessaires à cette fin, dans un délai de
trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. B...;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 mai 2014, l'arrêté du
3 novembre 2004 par lequel le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a classé M. B...au 5ème échelon du corps des professeurs de lycée professionnel, ainsi que la décision implicite dudit recteur rejetant sa demande de retrait de l'arrêté du 3 novembre 2004, sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de procéder au reclassement de M.B..., à compter du 1er septembre 2004, date de son affectation au sein de l'académie d'Aix-Marseille, ainsi qu'à la reconstitution de sa carrière et de ses droits sociaux à compter de cette même date, conformément aux énonciations du présent arrêt. Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche adressera au greffe de la Cour, dans les meilleurs délais, copie des actes justifiant de l'accomplissement de l'injonction prononcée au présent article.
Article 3 : L'Etat versera à M. B...une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie d'Aix-Marseille.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2015 à laquelle siégeaient :
- M. Gonzales, président de chambre,
- MmeD..., première conseillère,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 24 novembre 2015.
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N° 14MA031004