Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 avril 2014 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.
Par jugement n° 1403316 du 24 novembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 décembre 2014, M. A..., représenté par Me Dilly-Pillet, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 novembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 avril 2014 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire en application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, avec paiement d'une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au visa des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, dont Me Dilly-Pillet, avocate, pourra poursuivre personnellement le recouvrement en renonçant à la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- concernant la décision de refus de séjour, le préfet n'a pas procédé à un examen circonstancié de sa situation au regard des lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012, qu'il n'a par ailleurs pas visée ;
- il entre dans les prévisions des points 2.1.1 et 2.1.2. de la circulaire ;
- le refus du préfet est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision porte atteinte à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'intérêt supérieur des enfants, nés et scolarisés en France, fait obstacle à ce que la famille s'installe au Maroc ; le refus de titre a pour conséquence de séparer les enfants de leur père et méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le refus de l'admettre exceptionnellement au séjour, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation et d'une erreur d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête et fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 février 2015.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Haïli.
1. Considérant que M. A..., né le 1er janvier 1979 de nationalité marocaine, déclare être entré en France le 29 décembre 2013 muni d'un visa D à entrée unique délivré par les autorités italiennes, pour y rejoindre son épouse, Mme C...A..., de même nationalité, titulaire d'une carte de résident, qu'il avait épousée au Maroc le 16 juillet 2005 et avec laquelle il a eu trois enfants, nés en France en 2006, 2008 et 2012 ; qu'il a sollicité, en février 2014, son admission au séjour ; que, par arrêté du 30 avril 2014, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que le requérant interjette appel du jugement du 24 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande à fin d'annulation dudit arrêté ;
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant qu'à l'appui de sa requête, le requérant soutient que le couple qu'il forme avec Mme C...A..., ressortissante marocaine, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 10 février 2024, aurait tenté sans succès, par des demandes de visa pour M. A... ainsi qu'une demande de regroupement familial, d'être réuni depuis le mariage célébré le 16 juillet 2005 à Rabat et que de cette union sont issus trois enfants nés en 2006, 2008 et 2012 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... ne vit en France que depuis quatre mois à la date de la décision attaquée et qu'il a vécu dans son pays d'origine, où résident ses parents et sept frères et soeurs, jusqu'à l'âge de trente-quatre ans et pendant plus de huit ans à la suite de son mariage ; que, dans ces conditions, et alors que le requérant n'établit par aucun élément justificatif les démarches alléguées de régularisation de sa situation, notamment par la procédure de regroupement familial, compte tenu du caractère très récent de la vie commune des époux et de la constitution de la cellule familiale, la décision portant refus de séjour n'a pas porté, eu égard aux buts qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale que lui garantit l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de l'intéressé ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;
5. Considérant que si M. A... soutient que l'intérêt supérieur de ses enfants, nés sur le territoire français, serait méconnu par la décision en litige, la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour n'a pas, par elle-même, pour effet de séparer le requérant des enfants du couple ; qu'en tout état de cause, il est constant que les enfants du couple ont toujours vécu séparés de leur père, ces derniers ne vivant effectivement auprès de lui que depuis quatre mois à la date de la décision contestée ; qu'au demeurant, il est loisible pour l'épouse du requérant de déposer une demande de regroupement familial ; que, dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault n'aurait pas pris en considération l'intérêt supérieur des enfants et qu'il aurait, par suite, méconnu les stipulations de cet article ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'en se prévalant de sa situation personnelle et familiale, telle que décrite aux points précédents, M. A... ne justifie d'aucun motif exceptionnel susceptible de lui donner droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il n'avait d'ailleurs pas invoquées à l'appui de sa demande ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de ces dispositions doit être écarté ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne constituent pas des lignes directrices dont les intéressés peuvent utilement se prévaloir devant le juge ; que M. A... ne saurait ainsi se prévaloir utilement de cette circulaire dépourvue de toute valeur réglementaire ;
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. Considérant, en premier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus en ce qui concerne le refus de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;
9. Considérant, en second lieu, que, compte tenu du caractère très récent de la présence de M. A... auprès de ses enfants, de l'ordre de quatre mois à la date de la décision attaquée, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter également ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Me Dilly-Pillet et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 janvier 2016.
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N° 14MA05091 2