Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il serait le cas échéant éloigné.
Par une ordonnance n° 1408941 en date du 5 février 2015, le président délégué de la première chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 17 avril 2015, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 5 février 2015 du président de la première chambre du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de Me C..., qui s'engage à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat, la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'ordonnance est irrégulière, sa demande n'étant pas tardive puisque le délai de recours contentieux avait été prolongé par la demande d'aide juridictionnelle ;
- il peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; en effet il est père d'un enfant français à l'éducation et à l'entretien duquel il pourvoit ; cet enfant a été reconnu à sa naissance ; il envoie des mandats de 20 euros par mois à sa mère et celle-ci atteste de son implication dans l'éducation de l'enfant.
M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 12 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Paix.
1. Considérant que M. D..., de nationalité comorienne, demande l'annulation de l'ordonnance en date du 5 février 2015 par laquelle le président délégué de la première chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2014 du préfet du département des Bouches-du-Rhône portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il serait le cas échéant éloigné ;
Sur la régularité de l'ordonnance du 5 février 2015 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) " et qu'aux termes de l'article 39 du décret du 19 décembre 1991 : " Lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle en vue de se pourvoir en matière civile devant la Cour de cassation est adressée au bureau d'aide juridictionnelle établi près cette juridiction avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires, ce délai est interrompu. Un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle (...) Les délais de recours sont interrompus dans les mêmes conditions lorsque l'aide juridictionnelle est sollicitée à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou une juridiction administrative statuant à charge de recours devant le Conseil d'Etat " ;
3. Considérant que le président délégué de la première chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté les conclusions de la demande de M. D... dirigées contre la décision du 14 octobre 2014 comme manifestement irrecevables, en se fondant sur le 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, au motif que la décision du préfet des Bouches-du-Rhône, qui comportait l'indication des voies et délais de recours, lui avait été notifiée le 17 octobre 2014 et n'avait pas fait l'objet d'un recours contentieux dans le délai d'un mois imparti par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le premier juge a considéré, en conséquence, que les conclusions tendant à l'annulation de cette décision étaient tardives et, par suite, entachées d'une irrecevabilité manifeste ; que, toutefois, il résulte des pièces du dossier que la décision en date du 14 octobre 2014 du préfet des Bouches du Rhône a été notifiée à M. D... le 17 octobre 2014, que celui-ci a présenté dès le 29 octobre 2014 une demande d'aide juridictionnelle qui lui a été accordée par décision du président du bureau d'aide juridictionnelle le 28 novembre 2014 ; qu'en application des dispositions combinées des articles R. 421-1 du code de justice administrative et 39 du décret du 19 décembre 1991, le délai de recours contentieux n'était pas expiré à la date du 15 décembre 2014, à laquelle M. D... a introduit sa demande devant le tribunal administratif de Marseille ; que M. D... est donc fondé à soutenir que l'ordonnance rendue le 5 février 2015 est irrégulière et doit être annulée ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Marseille et sur ses conclusions devant la Cour ;
Sur la légalité du refus de séjour :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D..., entré en France le 1er février 2012, a reconnu le 2 avril 2013, l'enfant Nadjoi Ali, de nationalité française né d'une relation avec une ressortissante française Mme B... ; que, toutefois, si M. D... soutient contribuer à l'entretien et à l'éducation de son enfant, il ne produit que des virements du 10 novembre 2014, donc postérieurs à la date de la décision attaquée, comme l'est également l'ordre de virement permanent de 20 euros établi au profit de la mère de l'enfant ; qu'il précise lui même ne pas vivre avec son fils ; que, dans ces conditions, et nonobstant l'attestation rédigée par la mère de l'enfant, insuffisante à elle seule pour établir qu'il contribue à l'entretien de celui-ci, il ne remplit nullement les conditions pour être admis au séjour au titre du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que M. D..., âgé de vingt-trois ans à la date de la décision attaquée, soutient être entré en France en 2012 mais n'a formulé une demande d'amission au séjour que le 7 novembre 2013 ; qu'il ne justifie pas de l'ancienneté de son séjour sur le territoire français ; qu'il est célibataire, sans charge de famille et ne vit pas avec son fils de nationalité française ; qu'il ne fournit pas de précisions sur ses liens dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
10. Considérant que, eu égard à ce qui été dit aux points 6 et 8, la décision du préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas pour effet de séparer M. D... de son fils avec lequel il ne vit pas ; qu'il en résulte que, eu égard à ce qui été dit aux points 6, 8 et 9, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2014 ; que l'ensemble des conclusions en ce y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doit donc être rejeté ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1408941 du 5 février 2015 du président délégué de la première chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : La demande de M. D... présentée devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2015 à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- Mme Markarian, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 janvier 2016.
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N° 15MA01614 3