Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 à 2006 ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1103457 du 2 juillet 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 août 2013 et un mémoire complémentaire enregistré le 23 avril 2014, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 juillet 2013 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- s'agissant de la reconstitution du chiffre d'affaires et des taux de réfaction retenus par le service, la charge de la preuve incombe à l'administration ; le tribunal ne pouvait en conséquence estimer que l'évaluation des offerts par la SARL Le Cosmos ne correspondait pas à la réalité au motif qu'elle n'était étayée par aucun élément probant ; que le seuil de gratuité de 5 % pour les jus de fruits, l'eau pétillante en canettes, les sodas et l'alcool en canettes ne peut être retenu dès lors que 95 % de ces produits sont offerts ; s'agissant des tarifs de vente, l'administration fiscale a retenu à tort un ratio de rentabilité de six à sept points ; l'administration a la charge de prouver les différents éléments de la reconstitution dont la marge pratiquée par l'entreprise ; s'agissant des achats affectés à un usage privé, l'attestation du gérant fait preuve par elle-même ;
- il n'a pas été partie au débat oral et contradictoire lors de la vérification de la société alors que l'administration le regarde par ailleurs comme le maître de l'affaire ;
- s'agissant de l'appréhension des revenus réputés distribués, il ne peut être regardé avec son épouse comme attributaire des distributions qui correspondent à des sommes appréhendées par le gérant ; la confusion de patrimoine entre la SARL Le Cosmos et la SARL Les Thermes, à la supposer établie, n'implique pas qu'ils aient la disposition des fonds qui transitaient par les comptes financiers de la SARL Les Thermes ; il n'a jamais été démontré que son épouse et lui-même aient disposé d'un quelconque revenu en provenance de la SARL Le Cosmos ou de la SARL Les Thermes au cours des années 2004 à 2006 ;
- les majorations ne sont ni fondées ni motivées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2014, et un mémoire complémentaire enregistré le 18 décembre 2014, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le contrôle s'est déroulé dans les locaux professionnels de la société en présence du représentant légal et du comptable ; le requérant n'établit pas que le vérificateur se serait refusé à établir un débat oral et contradictoire ; en tout état de cause, et en vertu du principe d'indépendance des procédures, le requérant ne peut se prévaloir d'une éventuelle irrégularité ayant affecté la procédure de vérification de la société ;
- la comptabilité de la société était entachée de graves irrégularités de nature à lui ôter toute valeur probante ; la reconstitution des recettes a été effectuée à partir des informations communiquées par l'entreprise ; s'agissant des achats qui auraient été effectués à titre privé par le gérant, qui auraient représenté de 20 à 25 % des achats effectués en 2005 et 2006, la production d'une attestation du gérant établie pour les besoins du contrôle est insuffisante pour les établir ;
- les sommes réputées distribuées sont constituées des minorations de chiffre d'affaires constatées dans la SARL Le Cosmos et doivent être regardées comme ayant été appréhendées par le requérant ;
- le moyen relatif à la majoration de 40 % est irrecevable ; l'application de cette majoration est fondée.
Par un mémoire, enregistré le 27 juillet 2015, M. D..., représenté par Me E..., conclut aux mêmes fins que sa requête et porte à 2 000 euros ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire, enregistré le 25 novembre 2015, le ministre conclut aux mêmes fins que précédemment.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Markarian,
- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., substituant Me E..., pour M. D....
1. Considérant qu'à la suite de la vérification de la comptabilité de la SARL Le Cosmos, exploitante d'une discothèque, portant sur les exercices clos de 2004 à 2006, dont M. et Mme D... détenaient chacun 50 % des parts, l'administration fiscale a procédé à l'imposition entre leurs mains, des revenus réputés distribués sur le fondement des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts selon la procédure contradictoire ; que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme D... ont été assujettis au titre des années 2004 à 2006 ont été assorties de pénalités pour manquement délibéré ; que M. D... relève appel du jugement du 2 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et celle de son épouse tendant à la décharge de ces impositions ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant que M. D... invoque, en appel, l'irrégularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre de la SARL Le Cosmos au motif que son épouse et lui-même auraient été privés d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ; que, toutefois, l'irrégularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de la SARL Le Cosmos, à la supposer établie, n'a d'incidence ni sur la régularité de la procédure suivie à l'égard de M. et Mme D... ni sur le bien-fondé des impositions auxquelles ils ont été assujettis ; que ce moyen ne peut, par suite, qu'être écarté comme inopérant ;
Sur le bien-fondé des impositions :
3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital " ; et qu'aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. " et que l'article 47 de l'annexe II du même code précise que : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées. " ; qu'en cas de refus des redressements par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence et du montant des revenus distribués et, d'autre part, de leur appréhension par le contribuable ;
4. Considérant que M. D... n'ayant pas accepté les rectifications découlant du rattachement à son revenu global des bénéfices de la SARL Le Cosmos, regardés comme distribués à la suite de la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence et du montant des revenus distribués et, d'autre part, de leur appréhension par M. D... et son épouse ;
5. Considérant, en premier lieu, que les rectifications notifiées à M. et Mme D... correspondent aux revenus évalués à partir d'une reconstitution des recettes de la SARL Le Cosmos à laquelle a procédé, à défaut de comptabilité probante, le service et qui n'avaient pas été déclarées ; que pour procéder à cette reconstitution du chiffre d'affaires, le service a tenu compte des achats comptabilisés et procédé à des réfactions afin de tenir compte de la casse, des vols, des consommations du personnel et des offerts ; que, pour déterminer les tarifs applicables, le service a ainsi admis une contenance de quatre centilitres des verres d'alcool et réparti les boissons selon qu'elles étaient vendues au prix du billet d'entrée ou aux tarifs indiqués par la société en retenant une proportion de moitié en l'absence de pièces justificatives de recettes, de carnets de réservation, de billetterie payante ou gratuite et de doubles de notes clients ; que si le requérant conteste les taux de réfaction retenus, le service a admis l'intégralité des propositions de la SARL Le Cosmos relatives à la répartition entre les ventes de boissons au verre et à la bouteille et s'est fondé sur les éléments communiqués par le contribuable ; que l'affirmation selon laquelle il serait habituel de mélanger des alcools avec des jus de fruits ou des sodas ne permet pas de justifier que ces jus de fruits et sodas seraient offerts ; que si le requérant conteste également le taux de marge retenu par le service, celui-ci a retenu les prix de vente communiqués par l'entreprise alors même que certains de ces prix étaient inférieurs à ceux constatés lors du relevé de prix effectué le 29 novembre 2007 avec le gérant ; qu'enfin, si le requérant soutient que les achats effectués par le gérant auprès de la société Métro l'ont été à titre privé, il ne le justifie pas par la production d'une attestation établie par le gérant le 6 novembre 2008 pour les besoins du contrôle alors au demeurant que ces achats hors taxes, effectués en 2005 et 2006 et représentant 20 à 25 % du chiffre d'affaires, étaient significatifs, comme le relève l'administration ; que l'administration justifie ainsi de l'existence et du montant des revenus distribués du fait de ces minorations de chiffre d'affaires ;
6. Considérant, en second lieu, que le requérant soutient que son épouse et lui-même n'assuraient pas la gestion de la SARL Le Cosmos durant les années en litige dans la mesure où lui-même s'occupait de la gestion d'un autre établissement, la SARL Les Thermes, et où son épouse, atteinte de la maladie d'Alzheimer, a été admise dans un établissement spécialisé de soins en 2005 jusqu'à son décès le 16 janvier 2012 ; que, toutefois, la SARL Le Cosmos ne disposait pas de compte bancaire, les recettes et les dépenses transitant par le compte de la SARL Les Thermes dont M. et Mme D... étaient les seuls associés et Mme D... la gérante ; que la SARL Le Cosmos ne disposait pas non plus de personnel, lequel était mis à sa disposition par la SARL Les Thermes ; qu'en outre, le gérant de droit de la SARL Le Cosmos, qui n'était ni associé ni salarié, n'effectuait aucun achat seul et ne disposait pas d'une procuration bancaire ; que, dans ces conditions, l'administration établit que le requérant et son épouse étaient les maîtres de l'affaire et pouvaient, seuls, sans contrôle, disposer des fonds de la société et, par suite, que les sommes regardées comme distribuées ont été appréhendées par M. D... et son épouse ;
Sur l'application des pénalités :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
8. Considérant que, si M. D... est recevable à contester, en appel, la majoration de 40 % qui lui a été appliquée en application de l'article 1729 du code général des impôts dès lors qu'il a entendu contester dans le courrier du 15 janvier 2008, adressé en réponse à la proposition de rectification qui lui avait été notifiée, l'ensemble des rectifications proposées, lesquelles englobent les pénalités, l'administration justifie, en établissant la qualité de maîtres de l'affaire de M. D... et de son épouse et en soulignant le caractère délibéré et répété des minorations de recettes auxquels ils ont participé, la mauvaise foi des contribuables et leur volonté d'éluder l'impôt ; que l'administration doit, en conséquence, être regardée comme établissant le bien-fondé des pénalités pour manquement délibéré ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande et celle de son épouse ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré à l'issue de l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- Mme Markarian, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 février 2016.
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N° 13MA03472 2