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09/05/2016 | FRANCE | N°15MA01984

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 09 mai 2016, 15MA01984


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...B...A...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2014 par lequel le préfet de la Haute-Corse a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 1500029 du 16 avril 2015, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2015, M. B...A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 16 avril 2015 ;

2°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...B...A...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2014 par lequel le préfet de la Haute-Corse a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Par un jugement n° 1500029 du 16 avril 2015, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mai 2015, M. B...A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 16 avril 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2014 du préfet de la Haute-Corse ;

3°) d'ordonner la délivrance d'un titre de séjour ;

4°) de condamner le préfet de la Haute-Corse à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des frais d'instance.

Il soutient que :

- les premiers juges ont fait une mauvaise appréciation des éléments de fait qui leur étaient soumis en rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse refusant de l'admettre au séjour ;

- l'arrêté du préfet méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du préfet méconnaît les stipulations de l'article 7 b de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- l'arrêté du préfet est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté du préfet méconnaît les stipulations des articles 3, 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 décembre 2015, le préfet de la Haute-Corse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...A...ne sont pas fondés.

M. B...A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Massé-Degois a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. B...A..., ressortissant algérien, relève appel du jugement du 16 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 18 novembre 2014 refusant son admission au séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il sera reconduit ;

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 18 novembre 2014 :

2. Considérant, en premier lieu, que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales " ; qu'en ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France ; que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7.(...) " ; que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale ; que, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ces conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national ; que, par suite, M. B...A...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 18 novembre 2014 refusant son admission au séjour méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, des modalités d'admission exceptionnelle au séjour semblables à celles prévues par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; que, toutefois, en dehors des cas où il satisfait aux conditions fixées par la loi, ou par un engagement international, pour la délivrance d'un titre de séjour, un étranger ne saurait se prévaloir d'un droit à l'obtention d'un tel titre ;

4. Considérant, d'une part, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière ne constituent pas des lignes directrices dont les intéressés peuvent utilement se prévaloir devant le juge, mais de simples orientations générales adressées par le ministre de l'intérieur aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ; que, dès lors, M. B...A...ne peut utilement soutenir que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle au regard des énonciations de cette circulaire, ni que sa décision refusant l'admission au séjour méconnaîtrait ces énonciations ;

5. Considérant, d'autre part, que l'étranger peut, à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision préfectorale refusant de régulariser sa situation par la délivrance d'un titre de séjour, soutenir que la décision du préfet, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'ainsi, M. B...A...fait valoir qu'il est présent en France depuis plus de cinq années à la date du dépôt de sa demande de titre de séjour présentée le 21 févier 2014, qu'il justifie d'un contrat de travail à durée indéterminée depuis le 14 mars 2013, qu'il donne entière satisfaction à son employeur, que sa présence au sein de l'entreprise est indispensable à son bon fonctionnement et qu'il a tissé des liens sur le territoire national où il a élu domicile et où se trouvent tant son environnement professionnel que social et familial ; que, cependant, à supposer même que M. B...A..., né le 22 juillet 1983 en Algérie, puisse être regardé comme résidant de manière habituelle en France depuis le début de l'année 2009, et si le requérant se prévaut de la présence de son oncle sur le territoire français, il n'est pas contesté qu'il est célibataire et sans charge de famille, et il n'est pas établi qu'il serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident ses parents ainsi que sa fratrie ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en estimant ne pas devoir accorder à l'intéressé un titre de séjour dans le cadre de son pouvoir de régularisation, le préfet de la Haute-Corse aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien susvisé du 31 décembre 1968 : " (...) b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du "ministre chargé de l'emploi ", un certificat de résidence valable un an pour toutes les professions et toutes les régions, renouvelable et portant la mention "salarié" ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 9 du même accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis, alinéa 4 "(lettres c et d)", et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...) " ;

7. Considérant qu'il est constant que M. B... A...ne disposait pas, à la date de sa demande, du visa long séjour requis à l'article 9 de l'accord franco-algérien susmentionné ; que, dès lors, et alors même qu'il soutient être prêt à se soumettre au contrôle médical d'usage, il ne remplissait en tout état de cause pas les conditions du b) de l'article 7 de cet accord ouvrant droit à la délivrance du certificat de résidence, sans qu'il soit besoin d'apprécier son expérience et les conditions de son insertion professionnelle en France ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que si M. B... A..., âgé de trente et un ans à la date du refus litigieux, fait valoir qu'il vit en France depuis 2009, que son oncle y réside, qu'il exerce une activité salariée, qu'il dispose d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'agent de cuisine depuis le 14 mars 2013 et qu'il donne entière satisfaction à son employeur, il ressort toutefois des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 5, qu'il est célibataire sans charge de famille et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie et où résident ses parents, son frère ainsi que sa soeur ; qu'il ne démontre pas une particulière insertion en France ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour contestée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'alors que M. B... A...invoque une violation par l'arrêté attaqué du préfet de la Haute-Corse de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte, à l'appui de ce moyen, aucune précision permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé ;

10. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que, d'une part, le moyen tiré de ce que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français en date du 18 novembre 2014 méconnaîtraient les stipulations ci-dessus rappelées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de décisions qui, par elles-mêmes, n'impliquent pas le retour de l'intéressé dans son pays d'origine ; que, d'autre part, en se bornant à alléguer que sa situation est régularisable eu égard aux justificatifs produits, qu'un possible placement en rétention administrative auraient des conséquences disproportionnées compte tenu de la durée de son séjour en France durant laquelle il a été autorisé à demeurer par la remise de récépissés dans l'attente de la délivrance d'un titre de séjour et, enfin, qu'il a établi le centre de ses intérêts privés, familiaux et professionnels sur le territoire national, M. B... A...ne démontre pas que le préfet de la Haute-Corse aurait méconnu ces mêmes stipulations en fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il doit être éloigné ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 18 novembre 2014 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B...A..., n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B...A...la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Corse.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2016, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Massé-Degois, première conseillère,

- MmeD..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 mai 2016.

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N° 15MA01984

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01984
Date de la décision : 09/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : SECONDI

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-05-09;15ma01984 ?
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