Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1510412 du 6 avril 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I - Par une requête enregistrée le 29 avril 2016 sous le n° 16MA01702 et un mémoire enregistré le 27 mai 2016, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 6 avril 2016 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2015 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de cette même notification ;
4°) de mettre la somme de 1 800 euros à la charge de l'État au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- il méconnait les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors qu'il est présent en France depuis 2002 ;
- il méconnait les stipulations du 5) de l'article 6 du même accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 mai 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
II - Par une requête enregistrée le 29 avril 2016 sous le n° 16MA01703, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 6 avril 2016 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'État au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la mise à exécution de la décision de première instance risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;
- l'insuffisante motivation de la décision et la méconnaissance des stipulations du 1) et du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 constituent des moyens sérieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 mai 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- les rapports de M. Sauveplane,
- et les observations de Me B..., représentant M. C....
1. Considérant que les requêtes n° 16MA01702 et n° 16MA01703, présentées pour M. C..., présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que M. C..., ressortissant algérien né en 1964, est entré en France en juin 2002 sous couvert d'un visa Schengen établi par le consulat de France à Alger ; qu'il a sollicité le bénéfice de l'asile territorial en juin 2002 ; que celui-ci lui a été refusé le 27 juin 2003 ; qu'il a fait l'objet d'une première mesure de reconduite à la frontière le 9 juin 2005, qui n'a pu être mise à exécution ; qu'il a présenté une nouvelle demande d'admission au séjour sur le fondement de son état de santé le 30 novembre 2006 ; qu'après avis du médecin inspecteur de santé publique, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour par arrêté du 25 juillet 2007 ; qu'il a présenté de nouvelles demandes d'admission au séjour en mars 2009 et en août 2012 auxquelles le préfet des Bouches-du-Rhône a opposé des refus ; qu'il a sollicité, en dernier lieu, son admission au séjour le 2 octobre 2014 ; que, par un arrêté du 16 juillet 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ; que, par sa requête enregistrée sous le n° 16MA01702, M. C... relève appel du jugement du 6 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ; que, par sa requête enregistrée sous le n° 16MA01703, il demande le sursis à exécution du même jugement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Considérant que, pour refuser à M. C... l'admission au séjour, le préfet des Bouches-du-Rhône s'est fondé notamment sur la circonstance que ce dernier ne pouvait se prévaloir d'une présence effective et continue sur le territoire français depuis dix ans ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;
5. Considérant que M. C... produit pour la période allant de juillet 2005 à juillet 2015 de nombreuses pièces pour chaque année telles que des relevés bancaires attestant d'opérations liées à la vie courante, des ordonnances médicales, des factures d'un centre hospitalier ou des relevés de la caisse primaire d'assurance maladie attestant de façon probante sa présence en France aux dates des soins reçus ; qu'au vu de ces documents, M. C... doit être regardé comme apportant la preuve de sa présence en France depuis dix ans à la date du 16 juillet 2015 ; qu'ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône a méconnu les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 en refusant de lui délivrer un certificat de résidence ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;
8. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Bouches-du-Rhône délivre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, à M. C... un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " en application des stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
9. Considérant que la Cour, statuant par le présent arrêt sur la requête de M. C... tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de ce dernier tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que l'État étant partie perdante dans la présente instance, il y a lieu de mettre à sa charge la somme totale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1510412 du 6 avril 2016 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 16 juillet 2015 du préfet des Bouches-du-Rhône sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. C... un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : La somme totale de 1 500 euros est mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 16MA01703 de M. C....
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2016, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Sauveplane, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.
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N° 16MA01702, 16MA01703