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06/04/2017 | FRANCE | N°15MA01104

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre - formation à 3, 06 avril 2017, 15MA01104


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 31 mai 2012 par lequel le maire de Saint-Raphaël a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la régularisation de la démolition et de la reconstruction à l'identique d'une partie d'une villa existante sur les parcelles cadastrées section BN n° 22 et 23, lieudit " Le Trayas " ensemble le rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1202793 du 14 janvier 2015, le tribunal administratif de Toulon a annulé

l'arrêté précité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 31 mai 2012 par lequel le maire de Saint-Raphaël a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la régularisation de la démolition et de la reconstruction à l'identique d'une partie d'une villa existante sur les parcelles cadastrées section BN n° 22 et 23, lieudit " Le Trayas " ensemble le rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1202793 du 14 janvier 2015, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté précité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 mars 2015, le 28 octobre 2015 et le 1er décembre 2016, la commune de Saint-Raphaël, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 14 janvier 2015 ;

2°) de rejeter la demande de M. E... ;

3°) de mettre à la charge de M. E... une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les travaux entrepris par M. E... ne remplissent pas les conditions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme car le bâtiment reconstruit n'a pas été régulièrement édifié ;

- le bâtiment reconstruit n'est pas à l'identique ;

- l'article N2-14 du plan local d'urbanisme (PLU) dans sa version applicable lors de l'instruction de la demande de permis autorise seulement la reconstruction à l'identique d'une construction démolie à la suite d'un sinistre ;

- l'article L. 146-4 III du code de l'urbanisme faisait obstacle au droit à reconstruction ;

- l'autorité administrative peut s'opposer au droit de reconstruire en se fondant sur l'existence d'un risque pour la sécurité publique et sur l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme qui est d'ordre public ;

- en l'espèce, le risque d'incendie est avéré dans la zone en litige ;

- elle justifie d'une autorisation d'ester en justice.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 juin 2015, le 29 juin 2016 et le 6 janvier 2017, M. E... conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la commune de Saint-Rapahël la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la commune ne justifie pas d'une autorisation d'ester en justice ;

- la requête est tardive ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi d'urbanisme n° 324 du 15 juin 1943 relative au permis de construire ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gougot,

- les conclusions de Mme Giocanti,

- et les observations de Me A..., substituant Me B..., représentant la commune de Saint-Raphaël, et de Me F..., représentant M. E....

Deux notes en délibéré, présentées respectivement par M. E...et par la commune de Saint-Raphaël, ont été enregistrées les 27 et 28 mars 2017.

1. Considérant que le maire de Saint-Raphaël a, par arrêté du 31 mai 2012, refusé d'accorder à M. E... un permis pour la régularisation de la démolition et de la reconstruction à l'identique d'une partie de sa villa existante située sur les parcelles cadastrées BN n° 22 et 23, lieudit " Le Trayas " ; que la commune de Saint-Raphaël interjette appel du jugement du 14 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Toulon a, à la demande de M. E..., annulé cet arrêté de refus ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 28 août 2012 et lui a enjoint de procéder à une nouvelle instruction dans un délai de deux mois ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Considérant que le maire de Saint-Raphaël bénéficie d'une autorisation d'ester en justice accordée par délibération du conseil municipal du 3 avril 2014 ; que M. E... n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la requête d'appel serait irrecevable en raison du défaut de qualité pour agir de son auteur ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que si le permis de construire sollicité qui intervient après le commencement des travaux présente le caractère d'un permis de régularisation, cette circonstance n'est pas de nature, par elle-même, à influer sur sa régularité ; que, par suite, la commune de Saint-Raphaël ne peut utilement se prévaloir du fait que, par un arrêt du 7 avril 2009, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, statuant en matière correctionnelle a constaté que M. E... avait réalisé de gros travaux de réparation de structures et de réaménagement sans avoir au préalable obtenu de permis de construire et l'a condamné pour cette infraction au versement d'une amende de 10 000 euros ainsi qu'à la démolition de l'ouvrage irrégulièrement construit, dans un délai de 12 mois, sous peine d'astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme dans sa version issue de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 applicable à la date de la décision contestée, dispose que : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié.... " ; que selon l'article N 1 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Raphaël, dans sa rédaction également applicable à la date de la décision en cause, sont interdites toutes constructions non mentionnées à l'article N2 ; que l'article N 2.14 précise que " ne sont autorisées, en cas de sinistre, que les reconstructions à l'identique (sur justificatif par tous moyens de l'existant antérieur à ce sinistre) des constructions existantes à la date d'approbation du présent plan local d'urbanisme, en état d'habitation et de leurs annexes, ou occupées par des activités de services, à l'exception de celles soumises à des risques géologiques ou hydrauliques. " ;

5. Considérant, d'une part, que ces dispositions sont issues d'une délibération du conseil municipal du 13 juin 2005, antérieure à la modification de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme issue de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 qui autorise la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli quelle que soit l'origine du sinistre et ne conditionne plus le droit de reconstruire à l'existence d'un sinistre ; que l'article N2.14 du PLU, qui doit être regardé comme faisant obstacle à l'application de la loi uniquement en cas de sinistre, ne saurait, en l'absence de mention expresse du document d'urbanisme en ce sens, faire obstacle à l'application de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme aux reconstructions à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli ; que, par suite, c'est à tort que le maire de Saint-Raphaël s'est fondé, pour refuser l'autorisation sollicitée, sur le fait que le projet méconnaissait les dispositions de l'article N2.14 du PLU, applicables seulement en cas de sinistre, et alors qu'en l'espèce il est constant qu'aucun sinistre n'est à l'origine de la démolition partielle de la construction concernée ;

6. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que la démolition partielle de la construction évoquée au point 5 est intervenue à l'occasion de l'exécution de travaux autorisés par la décision de non-opposition à déclaration préalable du 12 juin 2003, soit depuis moins de dix ans à la date du dépôt de la demande de permis de construire de régularisation le 10 avril 2012 ; qu'il ressort de la notice de la demande de permis de construire que l'acte notarié d'acquisition du bien par M E...du 12 décembre 2001 fait état d'une propriété précédemment achetée le 29 juin 1940 ; que la commune ne conteste pas sérieusement que le bâtiment a été édifié avant la loi du 15 juin 1943 relative au permis de construire ; que le projet doit donc être regardé comme portant sur une construction régulièrement édifiée au sens des dispositions précitées de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ; que la commune ne peut ainsi utilement se prévaloir du fait que la demande d'autorisation viserait à régulariser des travaux réalisés sans permis ; qu'il ressort des pièces du dossier de la demande de permis de construire que le projet, qui porte sur une surface de plancher identique à l'existant et ne modifie ni le volume, ni l'implantation ni la destination de la construction initiale, concerne une reconstruction à l'identique du bâtiment ; que la circonstance que le juge pénal a constaté que des travaux réalisés en 2003 avaient modifié la structure du bâtiment ne démontre pas par elle-même que la reconstruction ne serait pas effectuée à l'identique ; que, par suite, le maire de Saint-Raphaël ne pouvait légalement refuser de délivrer le permis de construire sollicité en se fondant sur le fait que les conditions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme n'étaient pas remplies ;

7. Considérant, en troisième lieu, que sauf les cas de risque d'atteinte à la sécurité des biens et des personnes, les dispositions de l'article L. 146-4 III du code de l'urbanisme, en vertu desquelles en dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres, ne peuvent justifier un refus de permis de construire délivré sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme qui s'appliquent " nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire " ; que par suite, c'est à tort que le maire de la commune de Saint-Raphaël s'est fondé sur la méconnaissance de ces dispositions pour refuser l'autorisation sollicitée ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ; que l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme n'a ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application de celles des dispositions d'urbanisme qui ont pour but d'éviter aux occupants d'un bâtiment, objet d'une demande de reconstruction, d'être exposés à un risque certain et prévisible de nature à mettre gravement en danger leur sécurité ; qu'en l'espèce, il est constant que la destruction partielle de la villa existante ne résulte pas d'un incendie mais de travaux effectués courant 2003 par M. E... sur certains éléments de la structure du bâtiment ; que la commune n'établit pas que les parcelles cadastrées BN n° 22 et 23 situées au lieu-dit " Le Trayas " seraient classées dans un secteur d'aléa très fort de feu de forêt ainsi qu'il est mentionné par la décision contestée ; que M. E... se prévaut, en revanche, d'une carte d'aléa de feu de forêt qui révèle que la parcelle d'assiette du projet se situe en secteur jaune, d'aléa moyen ; qu'en outre, compte tenu de la portée limitée de ces travaux, effectués sur une construction existante à l'usage d'habitation individuelle et ne créant pas de surface de plancher supplémentaire, et de la situation proche du littoral du terrain, séparé du massif forestier par une route départementale et une voie de chemin de fer, le maire ne pouvait, sans erreur d'appréciation, refuser la délivrance d'un permis de régularisation au motif que le projet était de nature à porter atteinte à la sécurité publique ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Raphaël n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté du 31 mai 2012 ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de Saint-Raphaël dirigées contre M. E... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Raphaël la somme de 2 000 euros à verser à M. E... en application de ces dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Raphaël est rejetée.

Article 2 : La commune de Saint-Raphaël versera à M. E... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E...et à la commune de Saint-Raphaël.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2017, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- Mme Josset, présidente assesseure,

- Mme Gougot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 6 avril 2017.

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N° 15MA01104


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