Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1202720 du 28 novembre 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 janvier 2015, le 9 mars 2016 et le 26 septembre 2016, M. A..., représenté par la société d'avocats Helouet-Salvignol et associés, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 novembre 2014 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la proposition de rectification du 22 décembre 2008 n'a pas interrompu la prescription ;
- le document remis était en partie illisible et la remise à l'huissier d'une copie de la proposition de rectification méconnaît la confidentialité protégée par l'article R. 103-1 du livre des procédures fiscales ;
- la réponse aux observations du contribuable du 29 juillet 2011 a annulé la proposition de rectification du 22 décembre 2008 ;
- la déclaration de plus-value adressée à l'administration le 12 septembre 2008 n'est pas interruptive de prescription ;
- aucune information n'a été donnée par le service concernant le droit de communication exercé auprès de la SARL Alqui le 2 mars 2009 ;
- la rectification du report déficitaire effectuée au titre de l'année 2005 n'est pas fondée ;
- la rectification portant sur la plus-value relative à la cession d'un bateau en 2006 n'est pas fondée et son montant taxable ne saurait excéder la somme de 3 201 euros ;
- les pénalités appliquées à cette plus-value sont infondées.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 septembre 2015, le 16 septembre 2016 et le 11 octobre 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de procédure civile ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Haïli,
- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.
1. Considérant que M. A..., qui exerce une activité de loueur en meublé, relève appel du jugement du 28 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 à la suite d'un examen contradictoire d'ensemble de sa situation fiscale personnelle ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; que l'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ;
3. Considérant que la proposition de rectification du 20 avril 2009, relative à l'année 2006, mentionne en page 9 que l'administration a exercé son droit de communication auprès de la SARL Alqui, dont l'adresse était indiquée, et comporte en annexe la copie du contrat de vente du bateau Le Péri transmise en réponse par cette société et utilisée par le service pour imposer et chiffrer la plus-value résultant de la cession de ce bateau ; qu'ainsi, l'administration fiscale n'a pas méconnu son obligation d'informer le contribuable quant à la teneur et l'origine des documents utilisés et obtenus auprès de tiers pour lui permettre de discuter utilement sa provenance et de mettre à sa disposition sur sa demande ces documents ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
Sur la prescription du droit de reprise de l'administration fiscale en ce qui concerne l'année 2005 :
4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales : " (...) lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts (...), les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 169 du même livre : " Pour l'impôt sur le revenu (...), le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) " et qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun " ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 651 du code de procédure civile : " Les actes sont portés à la connaissance des intéressés par la notification qui leur en est faite. La notification faite par acte d'huissier de justice est une signification. La notification peut toujours être faite par voie de signification alors même que la loi l'aurait prévue sous une autre forme " ; qu'aux termes de l'article 653 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " La date de la signification d'un acte d'huissier de justice (...) est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence, au parquet ou, dans le cas mentionné à l'article 659, celle de l'établissement du procès-verbal " ; qu'aux termes de l'article 654 du même code : " La signification doit être faite à personne (...) " ; qu'aux termes de l'article 655 du même code : " Si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence. (...) La copie peut être remise à toute personne présente, au domicile ou à la résidence du destinataire. La copie ne peut être laissée qu'à la condition que la personne présente, le gardien ou le voisin l'accepte, déclare ses nom, prénoms, qualité. L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise " et qu'aux termes de l'article 658 du même code : " Dans tous les cas prévus aux articles 655 et 656, l'huissier de justice doit aviser l'intéressé de la signification, le jour même ou au plus tard le premier jour ouvrable, par lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et rappelant, si la copie de l'acte a été remise en mairie, les dispositions du dernier alinéa de l'article 656. La lettre contient en outre une copie de l'acte de signification. (...) Le cachet de l'huissier est apposé sur l'enveloppe. " ; qu'il résulte des termes mêmes de l'article 651 du code de procédure civile que l'administration peut notifier des redressements par voie de signification par huissier ;
6. Considérant que le droit de reprise prévu par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales expirait le 31 décembre 2008 s'agissant des impositions dues au titre de l'année 2005 ; que M. A... soutient qu'il n'a été destinataire de la proposition de rectification n° 3924 du 22 décembre 2008 relative aux impositions de l'année 2005 que le 8 janvier 2009 ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, dans un premier temps, l'administration fiscale a envoyé par voie postale la proposition de rectification du 22 décembre 2008 ; qu'en l'absence de retour de l'accusé de réception du pli recommandé à la date du 30 décembre 2008, l'administration a fait signifier le pli par voie d'huissier le 31 décembre 2008 à 13 heures à l'adresse du domicile du contribuable ; que la preuve que l'huissier a effectué les démarches successives prévues à l'article 655 du code de procédure civile résulte des mentions de l'acte établi par ses soins ; qu'en l'absence de M. A..., un avis de passage daté du 31 décembre 2008 a été laissé à son domicile mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant et le fait que la copie de l'acte devait être retirée à l'étude de l'huissier ; que la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile a été adressée le premier jour ouvrable suivant la signification de cet acte ; que la circonstance que le requérant a signé le 26 décembre 2008 un contrat de réexpédition avec la Poste est sans incidence sur la régularité de l'information du contribuable par voie de signification au domicile par huissier ; que, par suite, celle-ci a été régulièrement effectuée dans les formes prévues par le code de procédure civile le 31 décembre 2008 ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que l'original de la proposition de rectification adressée par voie postale qui a été retiré par M. A... le 8 janvier 2009 remplit les conditions dont dépend la régularité d'une proposition de rectification et comporte les mêmes mentions obligatoires que la copie de la proposition de rectification signifiée, soit la signature de l'agent, son titre et son nom dactylographié ; que le requérant ne soutient ni que la signature apposée sur ce document ne serait pas celle de l'agent dont le nom est dactylographié ni que la copie dont s'agit ne serait pas conforme à l'original ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la copie de la proposition de rectification du 22 décembre 2008 que l'administration fiscale lui a fait signifier serait dépourvue d'authenticité ;
9. Considérant, en troisième lieu, que si le requérant soutient que la proposition de rectification signifiée est en partie illisible du fait de surcharges dues à l'impression de références de télécopie, il ne l'établit pas en produisant une copie reçue par télécopie le 5 janvier 2009 et non de la proposition de rectification signifiée ; qu'en tout état de cause, la proposition de rectification présentée par le contribuable est lisible et exploitable ;
10. Considérant, en quatrième lieu, que, si la réponse aux observations du contribuable du 29 juillet 2011 porte la mention " annule et remplace les réponses aux observations du contribuable du 22 décembre 2008 et du 20 avril 2009 ", il résulte de l'instruction que cette mention erronée de la date du 22 décembre 2008, qui est celle de la proposition de rectification interruptive de prescription, procède d'une erreur de plume et que seules les réponses antérieures aux observations du contribuable ont été annulées ; qu'au surplus, une proposition de rectification régulièrement notifiée, alors même qu'elle aurait été annulée et remplacée, conserve son caractère interruptif de prescription ;
11. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 103 du livre des procédures fiscales : " L'obligation de secret professionnel, telle qu'elle est définie aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal, s'applique à toutes les personnes appelées à l'occasion de leurs fonctions ou attributions à intervenir dans l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts (...) " et qu'aux termes de l'article R. 103-1 du même livre : " Les correspondances de toute nature échangées entre les agents de l'administration des impôts (...) ou adressées par eux aux contribuables doivent être transmises sous enveloppe fermée, en application de l'article L. 103 " ;
12. Considérant que la notification de la proposition de rectification a été effectuée par exploit d'huissier et qu'il n'est pas contesté que le reçu signé par M. A... lors de la remise du document le 8 janvier 2009 indique " copie sous pli fermé d'un acte " ; qu'en outre, la circonstance que l'huissier, lui-même tenu au secret professionnel, a ouvert le pli contenant cette pièce de procédure afin d'en envoyer un exemplaire à un conseil de M. A..., sur la demande expresse de ce dernier, ne constitue pas une méconnaissance des obligations qui s'imposent à l'administration fiscale en matière de secret professionnel ;
13. Considérant que, dans ces conditions, la proposition de rectification du 22 décembre 2008, signifiée le 31 décembre suivant, dernier jour du délai de reprise, a interrompu la prescription au titre de l'année 2005 sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le caractère interruptif de prescription que présenterait la déclaration de plus-value déposée le 12 septembre 2008 par le contribuable au titre de l'année 2005 ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le déficit global reportable :
14. Considérant que M. A... ne conteste la remise en cause par l'administration fiscale d'une partie du déficit global reportable exposé depuis l'année 1999 qu'au motif que la proposition de rectification du 22 décembre 2008 serait " frappée de nullité " ; que ce moyen ne peut être qu'écarté par voie de conséquence de ce qui été dit aux points 4 à 13 ;
En ce qui concerne la plus-value relative à la cession d'un bateau en 2006 :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 150 UA du code général des impôts : " I. (...) les plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de biens meubles ou de droits relatifs à ces biens, par des personnes physiques, domiciliées en France au sens de l'article 4 B (...) sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH (...) " ;
16. Considérant que l'administration fiscale a relevé que M. A... avait acquis le 24 avril 2005 auprès de la société Knidos au prix de 244 966 euros le navire Le Péri qu'il a ensuite cédé le 1er juin 2006 pour un montant de 300 000 euros à M. B... et que le requérant n'avait pas déclaré la plus-value réalisée pour un montant de 55 034 euros ;
17. Considérant, en premier lieu, que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait jamais été propriétaire du bateau au vu des nombreux éléments de fait recueillis par l'administration fiscale qui le désignent comme le propriétaire du bien tels que le contrat conclu le 24 avril 2005 avec la société Knidos pour la mise à la disposition de celle-ci du bateau en l'absence de son propriétaire, l'acte de cession du bateau du 1er juin 2006 par lequel " M. A... vend à M. B... le bateau Le Péri " ou des demandes de transfert de fonds à l'étranger effectuées par M. A... au profit du directeur de la société Knidos pour un total de 244 966 euros correspondant au prix de vente du navire ;
18. Considérant, en second lieu, que le requérant n'est pas fondé à demander, pour la détermination du montant de la plus-value, que soient ajoutées au prix d'acquisition du navire des dépenses d'entretien à hauteur de 48 833 euros et d'achat d'une " annexe " pour 11 000 euros en l'absence de toute facture ou document probant justifiant du paiement de ces dépenses ;
Sur les intérêts de retard appliqués à l'imposition de la plus-value de cession du bateau :
19. Considérant, qu'aux termes des dispositions du II de l'article 1727 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " L'intérêt de retard n'est pas dû : (...) / 3. Sauf manquement délibéré, lorsque l'insuffisance des chiffres déclarés, appréciée pour chaque bien, n'excède pas le dixième de la base d'imposition en ce qui concerne les droits d'enregistrement ou la taxe de publicité foncière ; 4. Sauf manquement délibéré, lorsque l'insuffisance des chiffres déclarés n'excède pas le vingtième de la base d'imposition en ce qui concerne l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés " ;
20. Considérant que, compte tenu du montant de l'insuffisance de déclaration, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir de la tolérance légale instituée par le 3. du II de l'article 1727 du code général des impôts ;
Sur l'application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses :
21. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : (...) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, en cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable, la preuve des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;
22. Considérant que M. A... soutient que les majorations pour manoeuvres frauduleuses ne sont pas fondées dans leur taux et dans leur principe ; que ce moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications des situations fiscales.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Haïli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 avril 2017.
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N° 15MA00337