Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Solé et Fils a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner les établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD) d'Arles-sur-Tech et Nostra Casa à lui verser :
- la somme de 69 386 euros toutes taxes comprises au titre du solde du lot n° 1A du marché de construction et de rénovation de la maison de retraite d'Arles-sur-Tech et la somme de 8 956,02 euros au titre des intérêts moratoires dus pour les retards de paiement, majorées des intérêts au taux légal et de leur capitalisation à compter du 4 septembre 2014 ;
- la somme de 495 380,36 euros au titre des travaux supplémentaires et des conséquences de l'allongement du délai d'exécution.
Par un jugement n° 1404224 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'EHPAD d'Arles-sur-Tech à verser à la société Solé et Fils :
- la somme de 78 342,31 euros TTC au titre du solde du marché et des intérêts moratoires, assortie des intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2014, ces intérêts étant capitalisés à partir du 29 janvier 2015 ;
- et la somme de 89 691,01 euros hors taxes au titre des travaux supplémentaires.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 février 2016 et 20 mars 2017, l'EHPAD d'Arles et l'EHPAD Nostra Casa, représentés par la SCP Nicolau-Malavialle-Gadel-Capsie, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 décembre 2015 ;
2°) de rejeter la demande et les conclusions d'appel incident présentées par la société Solé et Fils ;
3°) de mettre à la charge de la société Solé et Fils une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par l'EHPAD d'Arles-sur-Tech et non compris dans les dépens.
Ils soutiennent que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'omission à statuer ;
- les premiers juges ont méconnu le caractère contradictoire de la procédure ;
- le paiement du solde du marché correspond à l'application de pénalités ;
- la société ne justifie pas de l'intégralité des retards allégués de règlement des acomptes mensuels ;
- seuls les travaux supplémentaires portant sur la réalisation d'une jardinière, la démolition et la réalisation d'une cloison et d'un faux-plafond, la dépose de faïence, la réalisation d'une descente en zinc au droit de l'ascenseur et de démolitions ont vocation à être indemnisés ;
- les autres travaux dont l'indemnisation est sollicitée sont prévus contractuellement ou ne sont pas indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ;
- certains d'entre eux n'ont pas fait l'objet d'ordres de service ;
- la société Solé et Fils ne justifie pas des préjudices résultant de l'allongement de la durée d'exécution du marché.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2016, la société Solé et Fils conclut :
- au rejet de la requête ;
Par la voie de l'appel incident :
- à la réformation du jugement en tant qu'il ne lui a pas donné entière satisfaction ;
- à la condamnation de l'EHPAD d'Arles-sur-Tech à lui verser la somme de 336 378,42 euros en réparation des préjudices résultant de l'allongement de la durée d'exécution du marché ;
- à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de l'EHPAD d'Arles-sur-Tech et de l'EHPAD Nostra Casa de Saint-Laurent-de-Cerdans au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par l'EHPAD d'Arles-sur-Tech ne sont pas fondés ;
- l'allongement de la durée du chantier est la conséquence de fautes du maître d'ouvrage dans la définition de ses besoins et dans la direction du chantier ;
- elle justifie des préjudices résultant de cet allongement.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que les conclusions de la société Solé et Fils tendant au paiement du solde du marché étaient devenues sans objet.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Héry,
- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la société Solé et Fils.
Une note en délibéré présentée par Me A..., représentant la société Solé et Fils a été enregistrée le 28 juin 2017.
1. Considérant que dans le cadre de l'extension et de la rénovation de la maison de retraite Baptiste Pams, l'établissement d'accueil de personnes âgées dépendantes (EHPAD) d'Arles-sur-Tech a confié le 6 mars 2009 l'exécution du lot n° 1 A " gros oeuvre, démolition et VRD " du marché à la société Solé et Fils, pour un prix global et forfaitaire, après avenants, de 1 980 312,18 euros hors taxes ; que les EHPAD d'Arles-sur-Tech et Nostra Casa relèvent appel du jugement du 18 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a fait partiellement droit à la demande de la société Solé et Fils en condamnant l'EHPAD d'Arles-sur-Tech à lui verser les sommes de 69 386,29 euros TTC au titre du solde du marché, 8 956,02 euros au titre des intérêts moratoires contractuels et 89 691,01 euros hors taxes au titre de travaux supplémentaires ; que par la voie de l'appel incident, la société Solé et Fils relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions indemnitaires portant sur les conséquences de l'allongement de la durée du chantier ;
Sur la portée du litige de première instance :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance et notamment du décompte général notifié à la société Solé et Fils que si des pénalités d'un montant de 69 386,29 euros lui ont été appliquées à titre provisoire au titre des situations n° 22 et 23, celles-ci n'ont pas été reprises, leur montant définitif étant fixé à 0 ; que le montant provisoire des pénalités a ensuite été réintégré dans le solde du marché, au crédit de la société Solé et Fils ; que, dès lors que le solde du marché a été réglé à cette dernière en cours d'instance le 10 février 2015, ses conclusions de première instance tendant au règlement dudit solde étaient privées d'objet ; que, par suite, le jugement doit être annulé en tant qu'il a statué sur ces conclusions ;
3. Considérant que pour les motifs qui précèdent, il convient, par la voie de l'évocation, de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions de la société Solé et Fils tendant au versement du solde du marché ;
Sur l'appel principal :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-3 du code de justice administrative : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) " ;
5. Considérant que dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci ; qu'il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser ; que, s'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser ; que, dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que les EHPAD d'Arles-sur-Tech et Nostra Casa ont présenté un mémoire en défense le 25 juin 2015, aux termes duquel ils ont seulement soulevé une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande de la société Solé et Fils, du fait du caractère définitif du décompte général, sans discuter du bien-fondé des demandes indemnitaires de la société ; que ce n'est que dans un second mémoire en défense, enregistré au greffe du tribunal administratif le 1er décembre 2015, postérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 13 octobre 2015, puis dans une note en délibéré, que les EHPAD ont contesté sur le fond les demandes de la société ; que si les premiers juges se sont bornés à viser ce mémoire et cette note en délibéré sans les analyser et se sont par ailleurs abstenus de les communiquer, ils n'ont entaché leur jugement d'aucune irrégularité de ce fait, dès lors que ces écritures ne comportaient l'exposé d'aucune circonstance de fait ni d'aucun élément de droit dont les défendeurs n'auraient pas été en mesure de faire état avant cette clôture ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; que les premiers juges ont indiqué avec suffisamment de précision les motifs pour lesquels la société Solé et Fils avait droit au paiement de la somme de 89 691,01 euros hors taxes au titre de travaux supplémentaires et de celle de 8 956,02 euros au titre des intérêts moratoires ;
8. Considérant, en revanche, que le tribunal administratif a omis de statuer sur les conclusions de la société Solé et Fils dirigées contre l'EHPAD Nostra Casa ainsi que sur celles de cet établissement tendant à sa mise hors de cause et à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions et d'y statuer, par la voie de l'évocation ;
En ce qui concerne les conclusions de première instance de la société Solé et Fils dirigées contre l'EHPAD Nostra Casa :
9. Considérant que la société Solé et Fils a sollicité dans son mémoire introductif d'instance la condamnation des EHPAD d'Arles-sur-Tech et Nostra Casa à l'indemniser des conséquences de l'exécution du marché conclu avec le seul EHPAD d'Arles-sur-Tech ; que, toutefois, par un mémoire enregistré le 6 octobre 2015 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, elle a demandé qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle n'entendait plus rechercher la responsabilité de l'EHPAD Nostra Casa ; que la société Solé et Fils doit ainsi être regardée comme s'étant désistée purement et simplement de ses conclusions dirigées contre l'EHPAD Nostra Casa ; qu'il y a lieu de lui en donner acte ;
En ce qui concerne le fond :
10. Considérant que les appelants indiquent expressément dans leur requête ne pas contester la somme de 2 813,12 euros mise à la charge de l'EHPAD d'Arles-sur-Tech au titre de travaux supplémentaires réalisés par la société Solé et Fils et portant sur la réalisation d'une jardinière, la démolition et la réalisation d'une cloison et d'un faux plafond, la dépose de faïence, la réalisation d'une descente en zinc au droit de l'ascenseur et des travaux de démolition ; qu'ils doivent donc être regardés comme contestant le jugement, en tant seulement qu'il porte sur les autres condamnations prononcées ;
S'agissant des travaux supplémentaires :
11. Considérant que le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise cocontractante sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ;
12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'implantation du bâtiment à construire, telle que reportée dans le plan de masse établi par le maître d'oeuvre, était inexacte, un mur d'angle et des poteaux empiétant de vingt centimètres sur le mur d'un local existant ; que par lettre du 8 juillet 2009, la société Solé et Fils a demandé à l'architecte de modifier ce plan de masse ou de préconiser une solution alternative permettant l'insertion du bâtiment projeté sur le site ; qu'il ressort des comptes rendus des réunions de chantier des 17 juillet 2009 et 11 septembre 2009 qu'à la suite de la modification de ce plan de masse, la société Solé et Fils a dû procéder à l'élaboration d'un nouveau plan d'exécution ; que cette modification étant indispensable à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art, les premiers juges étaient fondés à indemniser la société Solé et Fils par le versement de la somme de 2 800 euros hors taxes ;
13. Considérant que le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) prévoyait dans son article 4.2.2. la dépose d'une cuve à fioul enterrée, ce poste ayant été chiffré par la société Solé et Fils lors de la remise de son offre ; que l'étude de sol réalisée antérieurement au marché par le CEBTP et intégrée dans les documents de la consultation mentionne la présence de cette cuve, tout en précisant que son implantation et sa profondeur sont inconnues et en conseillant au maître d'ouvrage de procéder à des sondages ; que si l'EHPAD d'Arles-sur-Tech n'a pas réalisé ces sondages, il appartenait toutefois à la société Solé et Fils, qui avait connaissance de cette étude et de l'absence de sondage complémentaire, de solliciter des renseignements complémentaires auprès du maître d'ouvrage avant de déterminer son prix ; que, par suite, elle n'est pas fondée à réclamer la somme de 8 095,25 euros hors taxes à ce titre ;
14. Considérant que l'article 1.6 du CCTP met à la charge du titulaire du lot les éléments de structure porteuse des bâtiments, parmi lesquels les longrines, dont les caractéristiques du béton à mettre en oeuvre sont précisées par les articles 2.2.3, 4.3.2 et 5.3.3 ; que, toutefois, ces dispositions ne prévoyaient pas de réalisation des longrines au niveau du radier ; que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; que, par suite, le tribunal administratif était fondé à mettre la somme de 26 328,54 euros à la charge de l'EHPAD d'Arles-sur-Tech du fait de la mise en oeuvre de ces longrines ;
15. Considérant que si la société Solé et Fils soutient avoir été contrainte de modifier les plans initiaux d'exécution de la poutre cintrée pour tenir compte des réserves émises par le contrôleur technique, il résulte toutefois de l'instruction que l'article 3.2 du CCTP met à sa charge toutes les études d'exécution et que la société était informée avant l'élaboration de son offre, par l'article 4.2.1.2 du rapport initial de contrôle technique, lequel est au demeurant une pièce constitutive du marché, du fait que cette poutre serait à revoir au stade de l'exécution ; qu'elle n'est donc pas fondée être indemnisée à ce titre ;
16. Considérant que la société Solé et Fils justifie notamment par la production des comptes rendus des réunions de chantier des 18 décembre 2009, 29 janvier 2010 et 19 mars 2010 de la demande qui lui a été faite de réaliser des études complémentaires, de poser des témoins pour vérifier la stabilité du bâtiment existant et de modifier le mode de réalisation des fondations des constructions nouvelles du fait de la trop grande proximité du bâtiment existant, par leur reprise en sous-oeuvre ; que ces travaux, chiffrés au montant non contesté de 20 009,93 euros hors taxes, étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ;
17. Considérant que la réalisation d'une souche de cheminée, destinée à assurer l'étanchéité des gaines émergentes, était prévue par l'article 5.8.3. du CCTP ; que la circonstance que sa localisation n'était pas précisée et que ni le bordereau de décomposition des prix ni les plans d'architecte ne la prévoyaient, n'est pas, en elle-même, de nature à ouvrir droit à l'indemnisation de l'entrepreneur ;
18. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des comptes rendus des réunions de chantier des 18 décembre 2009, 22 janvier 2010, 18 avril 2010, 25 juin 2010 et 17 septembre 2010 que le maître d'ouvrage a fait procéder à plusieurs modifications de la cour de service, parmi lesquelles la création de deux rampes d'accès, et a demandé à la société Solé et Fils de mettre en oeuvre les études d'exécution supplémentaires nécessaires et de réaliser les travaux ; que quand bien même la société Solé et Fils n'aurait pas attendu la validation de ses plans d'exécution par le bureau de contrôle et le maître d'oeuvre et sans qu'y fasse obstacle le fait que le maître d'ouvrage n'a pas régularisé ses demandes par l'émission d'un ordre de service ou la conclusion d'un avenant, elle a ainsi droit à être indemnisée des surcoûts résultant de ces travaux supplémentaires, d'un montant non contesté de 10 145,80 euros hors taxes ;
19. Considérant que si le maître d'oeuvre a demandé à la société Solé et Fils lors de la réunion de chantier du 9 septembre 2011 d'établir un devis en urgence portant sur la réalisation de travaux sur la toiture, du fait du débord des installations nouvellement créées sur celle-ci, il résulte de l'instruction que ces travaux étaient mentionnés dans les plans d'architecte figurant dans les pièces contractuelles ; que la société Solé et Fils ne peut ainsi prétendre à leur indemnisation ;
20. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les modifications apportées par le maître d'ouvrage aux fenêtres, telles qu'elles ressortent des ordres de service des 31 mai et 6 juin 2012, aient entraîné des coûts supplémentaires pour la société Solé et Fils par le seul fait que ces fenêtres ont été installées dans une zone différente de celle initialement prévue, ce d'autant que ces travaux figurent sur les plans d'architecte annexés au dossier de consultation des entreprises ;
21. Considérant que le raccordement de gaines entre le bâtiment existant et le bâtiment restructuré était contractuellement prévu ; que la modification des accès de l'extension par le maître d'ouvrage a conduit la société Solé et Fils à modifier le passage des gaines ; que la société Solé et Fils doit donc être indemnisée du surcoût de 600 euros résultant de la prise en compte de cette modification ;
22. Considérant que la réalisation de raccords en plâtre au droit de cloisons existantes ainsi qu'au niveau 3, la dépose de plinthes initialement conservées et la pose d'un enduit en plâtre au droit de ces plinthes déposées pour permettre la remontée du sol souple ne constituent pas des travaux indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; qu'il en est de même pour le bouchement d'une aération, la pose d'un enduit sur les murs des sanitaires du personnel au niveau 1 et la dépose des parties endommagées d'un mur, la reprise d'embrasure et la passivation d'acier ;
23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'indemnité mise à la charge de l'EHPAD d'Arles-sur-Tech au titre des travaux supplémentaires exécutés par la société Solé et Fils doit être ramenée à la somme de 62 697,39 euros hors taxes ;
S'agissant des intérêts moratoires et de leur capitalisation :
En ce qui concerne les retards de paiement des décomptes mensuels :
24. Considérant qu'aux termes de l'article 98 du code des marchés publics : " Le délai global de paiement d'un marché public ne peut excéder:/ (...) 3° 50 jours pour les établissements publics de santé (...)/ Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou les sous-traitant, le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai (...) " ; que l'article 3.4.4. du cahier des clauses administratives particulières dispose : " Les projets de décompte seront présentés conformément à l'article 13.1 du C.C.A.G. travaux et selon le modèle qui sera fourni à l'entreprise au début des travaux. Les comptes seront réglés mensuellement./ Les sommes dues au(x) titulaire(s) seront payées dans un délai global de 50 jours à compter de la date de réception des factures ou des demandes de paiement équivalentes./ Le taux des intérêts moratoires sera celui de l'intérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts moratoires auront commencé à courir, augmenté de deux points. " ;
25. Considérant que la production par la société Solé et Fils de tableaux rédigés par elle-même ne permet pas, à défaut de justifier de la date effective de réception par le maître d'ouvrage ou son représentant des demandes de paiement, que celui-ci ne serait pas intervenu dans le délai de 50 jours prescrit par les dispositions précitées du code des marchés publics ; qu'il ressort en outre des mentions portées sur l'état d'acompte n° 1 pour le paiement des prestations exécutées au mois de mai 2009 que le mandataire du maître d'ouvrage a reçu la demande de paiement le 21 juillet 2009 et que la somme correspondante a été versée sur le compte bancaire de la société le 11 août suivant, soit dans un délai inférieur à 50 jours ; que l'état d'acompte n° 2 pour le paiement des prestations réalisées en juillet 2009 ne comporte aucune mention justifiant de sa date de présentation au mandataire du maître d'ouvrage ; que, par suite, la société Solé et Fils ne saurait percevoir des intérêts moratoires à ce titre ;
En ce qui concerne le paiement du solde du marché :
26. Considérant qu'aux termes de l'article 13.42 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux : " Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci-après :/ - quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final ; trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde (...) " ;
27. Considérant que le décompte final a été remis par la société Solé et Fils le 23 septembre 2013 ; que la publication de l'index de référence permettant la révision du solde étant le 30 décembre 2013, le décompte général aurait dû lui être notifié le 29 janvier 2014 puis le paiement du solde intervenir au plus tard le 20 mars 2014 ;
28. Considérant que le paiement de la somme de 76 124,31 euros TTC, correspondant au solde du marché arrêté par l'EHPAD d'Arles-sur-Tech, a été versé à la société Solé et Fils le 10 février 2015 ; que, par conséquent, cette dernière a droit au versement d'intérêts moratoires contractuels pour la période allant du 20 mars 2014 au 10 février 2015 ; que compte tenu du taux légal au 1er janvier 2014 de 0,04 % et du retard de paiement de 327 jours, ces intérêts s'élèvent à la somme de 1 391,26 euros ;
Sur l'appel incident :
29. Considérant que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à prix forfaitaires ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du marché soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché ;
30. Considérant que la durée contractuelle du marché était de 32 mois, outre une période de préparation d'un mois ; que l'ordre de service de démarrage des travaux ayant été notifié à la société Solé et Fils le 9 mars 2009, la fin théorique du marché était le 10 décembre 2011 et non le 11 août 2011 comme soutenu par l'entreprise ; que la dernière phase de travaux a été réceptionnée avec effet au 21 juin 2013, soit un dépassement d'un an, six mois et onze jours ; que sont toutefois à déduire de cette durée 123,48 jours au titre des intempéries, ainsi que l'admet la société Solé et Fils dans ses écritures, ainsi que la prolongation par avenant des délais de 78 jours ; qu'il n'y a pas lieu non plus de prendre en compte 107 jours correspondant au retard causé par l'effondrement d'un mur de soutènement par suite de l'enlèvement d'une cuve à fioul enterrée par le sous-traitant de la société Solé et Fils et de la survenue de pluies importantes, ce retard n'étant pas la conséquence d'une faute du maître d'ouvrage ; que, par suite, le dépassement du délai d'exécution du marché doit être ramené à 8 mois et 8 jours ;
31. Considérant qu'en produisant uniquement des tableaux réalisés par elle et en l'absence de pièces comptables ou de justificatifs de dépense, la société Solé et Fils ne justifie pas plus en appel qu'en première instance de la réalité et du quantum des préjudices qu'elle invoque, constitués selon elle par des frais de suivi de chantier, de location d'installations de chantier et des pertes d'exploitation ; qu'ainsi, à supposer même que les nombreuses modifications demandées par le maître d'ouvrage pendant les travaux et le temps mis par celui-ci pour procéder au remplacement d'une entreprise défaillante aient contribué à l'allongement de la durée d'exécution du marché, ses conclusions à fin d'indemnisation ne peuvent qu'être rejetées ;
32. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions d'appel incident de la société Solé et Fils doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
33. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge des parties les sommes demandées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 décembre 2015 est annulé, d'une part, en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de la société Solé et Fils dirigées contre l'EHPAD Nostra Casa et sur celles de l'EHPAD Nostra Casa tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions de la société Solé et Fils tendant au versement du solde du marché.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de la société Solé et Fils tendant au versement du solde du marché.
Article 3 : Il est donné acte du désistement des conclusions de la demande de la société Solé et Fils dirigées contre l'EHPAD Nostra Casa.
Article 4 : L'indemnité de 89 691,01 euros hors taxes mise à la charge de l'EHPAD d'Arles-sur-Tech par l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 décembre 2015 est ramenée à la somme de 62 697,39 euros hors taxes.
Article 5 : Les intérêts moratoires dus par l'EHPAD d'Arles-sur-Tech sur le règlement du solde du marché sont fixés à la somme de 1 391,26 euros.
Article 6 : Les articles 1 et 2 du jugement du 18 décembre 2015 sont annulés en tant qu'ils sont contraires au présent arrêt.
Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à l'EHPAD d'Arles-sur-Tech, à l'EHPAD Nostra Casa et à la société Solé et Fils.
Délibéré après l'audience du 26 juin 2017, où siégeaient :
- Mme Steinmetz-Schies, président,
- Mme Héry, premier conseiller,
- M. Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2017.
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N° 16MA00428