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13/07/2017 | FRANCE | N°15MA02351

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 13 juillet 2017, 15MA02351


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 mai 2012 par lequel le président du centre communal d'action sociale (CCAS) de Roquebrune-Cap-Martin lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours.

Par un jugement n° 1202648 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er juin 2015 et le 24 janvier 2017

, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 mai 2012 par lequel le président du centre communal d'action sociale (CCAS) de Roquebrune-Cap-Martin lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours.

Par un jugement n° 1202648 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er juin 2015 et le 24 janvier 2017, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 mai 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 mai 2012 du président du CCAS ;

3°) de mettre à la charge du CCAS de Roquebrune-Cap-Martin la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée méconnaît les dispositions du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a été l'objet de brimades, constitutives de harcèlement moral.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 18 janvier 2017 et le 2 février 2017, le CCAS de Roquebrune-Cap-Martin, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme D... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me F... représentant Mme D....

1. Considérant que Mme D..., employée en qualité d'assistante de service social par le CCAS de la commune de Roquebrune-Cap-Martin, s'est vu infliger, par décision du 14 mai 2012, une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours ; qu'elle relève appel du jugement du 20 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, repris à l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ;

3. Considérant qu'aucune disposition légale ou réglementaire, ni aucun principe, pas même les énonciations de la décision contestée elle-même, ne faisaient obligation au centre communal d'action sociale de Roquebrune-Cap-Martin de notifier à Mme D... l'original de cette décision ; que la circonstance selon laquelle l'ampliation, qui a valablement été notifiée le 24 mai 2012 à Mme D... et qui a été certifiée conforme à l'original par la vice-présidente du centre communal d'action sociale, n'était pas revêtue de la signature de son auteur, est sans influence sur la légalité de ladite décision ; que, par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que, à défaut d'être signée, l'ampliation de la décision du 14 mai 2012 aurait méconnu les dispositions du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, désormais codifié à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / - infligent une sanction (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que la décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée ; que ces dispositions imposent à l'autorité qui prononce la sanction de préciser elle-même, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de l'agent concerné, de telle sorte que ce dernier puisse, à la seule lecture de cette décision, connaître les motifs de la sanction qui le frappe ;

5. Considérant qu'il ressort des énonciations de la décision contestée " qu'il est reproché à Mme D... d'avoir, le 28 février 2012, proféré des menaces verbales à l'encontre du directeur du centre communal d'action sociale, à l'occasion d'un entretien au cours duquel des propos d'une particulière violence ont été tenus " et que " ces faits constituent un manquement au respect du pouvoir hiérarchique et ont fortement perturbé le bon fonctionnement du service public " ; que cette décision comportait ainsi de manière suffisamment précise et circonstanciée les griefs retenus à l'encontre de l'intéressée, la mettant à même de connaître les motifs de la sanction en litige, alors même qu'elle ne mentionne pas les propos exacts que l'administration a estimé constitutifs de menaces ou de violences verbales ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; / le blâme ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours (...) " ; qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, particulièrement du rapport établi par Mme A..., exerçant au sein du service des ressources humaines du CCAS et qui a assisté à l'entretien du 28 février 2012, qui s'est tenu également en présence de Mme G..., chef de ce service, que Mme D... s'est adressée au directeur de l'établissement au cours dudit entretien, sur un ton très agressif, l'accusant notamment de manipuler les agents, arguant du fait qu'elle était victime de harcèlements, et faisant preuve à son égard d'une attitude menaçante ; que Mme D... ne conteste pas l'affirmation du CCAS selon laquelle le personnel présent sur les lieux a pu entendre ses propos ; que, dans ces conditions, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la sanction qui lui a été infligée était fondée sur des faits non établis ; que son comportement est constitutif d'un manquement aux règles régissant les rapports entre un subordonné et son supérieur hiérarchique et notamment au devoir de respect qu'elles impliquent ; qu'en lui infligeant, pour les motifs rappelés ci-dessus, une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours, le président du CCAS n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de la loi du 26 janvier 1984 ;

8. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) " ;

9. Considérant qu'il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, par ailleurs, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ;

10. Considérant qu'en se bornant à relater des faits et la perception qu'elle en a eue, sans apporter le moindre commencement de preuve de la réalité des brimades qu'elle affirme avoir subies, Mme D... n'établit pas avoir fait l'objet de mesures répétées, vexatoires et déstabilisantes, caractérisant l'existence d'un harcèlement moral au sens des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 et dont la sanction en litige serait, comme elle l'allègue, le point culminant d'une entreprise de déstabilisation professionnelle engagée depuis novembre 2008 ; que la plainte qu'elle a déposée devant le tribunal de grande instance de Nice pour la commission de tels faits à son encontre a été classée sans suite le 3 juin 2013 pour " insuffisance caractérisée " ; que l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de faits survenus en 2014 et 2015, soit postérieurement à la date de la décision contestée ; qu'à défaut, pour Mme D..., d'apporter des éléments de nature à faire présumer l'existence du harcèlement moral dont elle se dit victime de la part de sa hiérarchie, il y a lieu d'écarter ce moyen ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par suite, sa requête doit être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CCAS de Roquebrune-Cap-Martin, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme D..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du Mme D... la somme demandée par le CCAS de Roquebrune-Cap-Martin, au même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du CCAS de Roquebrune-Cap-Martin tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D...et au centre communal d'action sociale de Roquebrune-Cap-Martin.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Chanon, premier conseiller,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 13 juillet 2017.

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N° 15MA02351

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02351
Date de la décision : 13/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : CABINET MSELLATI-BARBARO

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-07-13;15ma02351 ?
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