Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 30 août 2016, par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours mentionnant le pays de destination.
Par un jugement n° 1610029 du 5 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 mai 2017 M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 avril 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un certificat de résidence algérien au titre de sa vie privée et familiale sur le fondement de l'article 6 4° de l'accord franco-algérien ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les services de la préfecture étaient informés de sa nouvelle adresse et sa demande de première instance était donc recevable ;
- le refus d'admission au séjour est entaché d'erreur de fait ;
- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en rapporte à son mémoire en défense de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gougot a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par arrêté du 30 août 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour que lui avait présentée le 4 février 2016 M. A..., ressortissant algérien, en qualité d'ascendant d'enfant français et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que M. A... interjette appel du jugement du 5 avril 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 [...] et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 [...] peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination ... " ; que la décision préfectorale ne saurait être regardée comme régulièrement notifiée à l'adresse figurant dans la demande d'admission au séjour dès lors que l'étranger avait fait part à la préfecture de son changement d'adresse ; qu'en l'espèce il ressort des pièces du dossier que la décision contestée a été adressée par le préfet des Bouches-du-Rhône à l'adresse portée dans la demande de titre de séjour, au 86 boulevard Pont de Vivaux dans le 10ème arrondissement de Marseille ; que le pli a été présenté le 2 septembre 2016 puis a été retourné par les services postaux avec la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " ; que toutefois, le requérant justifie avoir informé les services de la préfecture par courrier du 5 juillet 2016 adressé par pli recommandé avec accusé de réception de sa séparation avec sa concubine depuis le 16 juin 2016 ; que ce courrier du 5 juillet 2016 portait en en-tête la nouvelle adresse de l'intéressé ; que, par suite, le requérant est fondé à soutenir qu'il avait informé les services de la préfecture de sa nouvelle adresse et que c'est par suite à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande comme irrecevable car tardive, et à demander l'annulation du jugement attaqué ; qu'il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par le requérant devant le tribunal administratif de Marseille ;
Sur les conclusions en annulation de l'arrêté du 30 août 2016 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résident en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ; " ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a reconnu son enfant de nationalité française, né le 8 août 2015, postérieurement à sa naissance, le 28 août 2015, et non le 28 août 2016 comme mentionné par erreur par la décision contestée ; que le préfet ne conteste pas l'existence d'une communauté de vie de l'intéressé avec la mère de l'enfant jusqu'en juin 2016 ; que le requérant est donc présumé jusqu'à cette date avoir subvenu aux besoins de l'enfant ; que ces éléments sont, en outre, corroborés par une attestation du service pédiatrique du pôle parents-enfants Sainte-Monique de l'hôpital Saint-Joseph du 13 juin 2016 selon laquelle les deux parents de l'enfant étaient présents lors des visites médicales pour l'enfant des 27 septembre 2015, 17 novembre 2015 et 31 décembre 2015 ; que le requérant produit en outre des factures d'achat de produits pour l'enfant pour les mois d'avril à juillet 2016, et une remise d'argent sur un livret A ouvert dans un établissement bancaire au nom de l'enfant le 21 juin 2016 ; que dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard notamment au caractère récent de la séparation et au très jeune âge de l'enfant, le requérant doit être regardé comme justifiant subvenir aux besoins de l'enfant depuis sa naissance en application des stipulations précitées de l'accord franco-algérien ; qu'il est, par suite, fondé à soutenir que c'est par une erreur d'appréciation que le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour en application de l'article 6 alinéa 1-4 de l'accord franco-algérien ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'ensemble des moyens, M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; et qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;
6. Considérant qu'eu égard aux motifs du présent arrêt, le présent jugement implique seulement que le préfet des Alpes-Maritimes réexamine la situation du requérant mais n'implique pas nécessairement la délivrance à l'intéressé du titre de séjour sollicité ; que, par suite, les conclusions en injonction du requérant susvisées doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 avril 2017 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 30 août 2016 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2018, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- Mme Gougot, première conseillère,
- M. Silvy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 février 2018.
2
N° 17MA01837