Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I - La SARL STPME a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2010 et le 31 décembre 2011.
Par un jugement n° 1402572 du 4 février 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
II - La SARL STPME a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011.
Par un jugement n° 1402574 du 4 février 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Procédure suivie devant la Cour :
I - Par une requête, enregistrée le 3 avril 2016 sous le n° 16MA01271, la SARL STPME, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402572 du 4 février 2016 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision d'admission partielle du 5 mai 2014 est insuffisamment motivée ;
- la rectification relative à un passif injustifié est insuffisamment motivée ;
- la réponse aux observations du contribuable ne mentionne pas la possibilité pour le contribuable de présenter ses observations dans le délai de trente jours et de se faire assister d'un conseil ;
- les conséquences financières des redressements n'ont pas été indiquées ;
- l'obligation d'information prévue à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales a été méconnue ;
- l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, relatif à la déduction en cascade, a été méconnu ;
- les sanctions fiscales ne sont ni motivées ni fondées.
II - Par une requête, enregistrée le 3 avril 2016 sous le n° 16MA01272, la SARL STPME, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402574 du 4 février 2016 du tribunal administratif de Toulon ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle reprend les moyens soulevés dans la requête enregistrée sous le n° 16MA01271 et soutient que l'administration lui a refusé à tort le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur certaines factures.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 2 septembre 2016, le ministre chargé du budget conclut au rejet des requêtes.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL STPME ne sont pas fondés.
Par deux lettres du 16 mars 2017, Me E... déclare se constituer en lieu et place de Me D... et indique à la Cour que Me B... a été désignée comme liquidateur judiciaire de la SARL SPTME par jugement du tribunal de commerce de Fréjus du 13 mars 2017.
Par deux lettres du 27 septembre 2017, Me B... a été invitée à régulariser les requêtes de la SARL SPTME.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'application de l'article 1756 du code général des impôts.
Vu :
- les autres pièces des dossiers ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme C... Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- les rapports de Mme Paix,
- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.
1. Considérant que les requêtes n° 16MA01271 et 16MA01272 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un même arrêt ;
2. Considérant que la SARL STPME relève appel des jugements du 4 février 2016 par lesquels le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos le 31 décembre 2010 et le 31 décembre 2011 et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011 à la suite d'une vérification de comptabilité de son activité de maçonnerie et de travaux de bâtiment ;
Sur l'étendue du litige :
3. Considérant que par décision du 23 mars 2017 l'administration fiscale a en application de l'article 1756 du code général des impôts accordé à la SARL STPME la décharge d'une somme de 7 702 euros des intérêts de retard dont étaient assortis les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de 5 668 euros des intérêts de retard dont étaient assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle a également remis la pénalité prévue par l'article 1759 du code général des impôts pour un montant total de 352 437 euros (96 331 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et 256 106 euros au titre de l'exercice clos en 2011) ; que les conclusions de la requête de la SARL STPME sont, dans cette mesure, devenus sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur la régularité des décisions d'admission partielle des réclamations de la société :
4. Considérant que les irrégularités susceptibles d'entacher la décision par laquelle l'administration rejette une réclamation tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition sont sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de cette imposition ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les décisions d'admission partielle du 5 mai 2014 des réclamations de la société seraient insuffisamment motivées ne peut qu'être écarté ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article " ; que l'article L. 11 du même livre dans sa rédaction alors applicable prévoit que : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification " et que l'article L. 54 B du même livre prévoit que : " La notification d'une proposition de rectification doit mentionner, sous peine de nullité, que le contribuable a la faculté de se faire assister d'un conseil de son choix pour discuter la proposition de rectification ou pour y répondre " ;
6. Considérant, d'une part, que l'obligation pour l'administration de mentionner, sur la proposition de rectification adressée au contribuable, le délai prévu par l'article L. 11 du livre des procédures fiscales et la possibilité d'être assisté d'un conseil, ne s'étend pas à la réponse aux observations du contribuable ; que ces mentions figurent explicitement sur la proposition de rectification adressée le 15 mai 2013 à la SARL STPME ; que le moyen tiré de ce qu'elles ne figurent pas sur la réponse aux observations du contribuable est inopérant ;
7. Considérant, d'autre part, que la proposition de rectification du 15 mai 2013 rappelle, au sujet de l'existence d'un passif injustifié, les dispositions de l'article 38-2 du code général des impôts et l'interprétation qui en est faite par l'administration fiscale et souligne l'absence de justification de ce passif par des écritures comptables précisément décrites ; que, par suite, ce chef de rectification est suffisamment motivé en droit comme en fait ;
8 Considérant enfin que la proposition de rectification recense, pour chacun des deux exercices vérifiés, les factures établies par la SAS CMME et la SA Colas, auprès desquelles le droit de communication a été exercé par le vérificateur, qui n'ont pas été comptabilisées en recettes ; qu'elle recense également les factures, établies par la SARL BHM et la SARL KTM Constructions, fournisseurs de la société requérante, pour lesquelles le vérificateur a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée qui y était mentionnée ; que la proposition de rectification est, sur ces points, suffisamment motivée ;
9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue (...) d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...), le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai (...) " ;
10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 15 mai 2013 précise les conséquences financières des redressements, tant en matière de taxe sur la valeur ajoutée que d'impôt sur les sociétés sous forme de tableaux, clairement lisibles contrairement à ce que soutient la société, figurant aux pages 17 à 21 du document ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ne peut, par suite, qu'être écarté ;
11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...). Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure de redressement mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;
12. Considérant que la société requérante a été suffisamment informée, en pages 4 et 5 de la proposition de rectification du 15 mai 2013, de l'origine et de la teneur des informations et des documents obtenus par l'administration fiscale auprès de la SAS CMME et de la SA Colas et a été mise à même d'en demander la communication avant la mise en recouvrement des impositions, une copie des factures ayant d'ailleurs été remise à la gérante de la société au cours des opérations de contrôle ; qu'en outre, l'administration n'a aucune obligation d'avertir expressément le contribuable qu'il a la possibilité de demander la communication des documents obtenus par le service ; que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales n'ont, par suite, pas été méconnues ;
13. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales : " En cas de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, le supplément de taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées afférent à un exercice donné est déduit, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, des résultats du même exercice, sauf demande expresse des contribuables, formulée dans le délai qui leur est imparti pour répondre à la proposition de rectification. (...) Les demandes que les contribuables peuvent présenter au titre des troisième et quatrième alinéas doivent être faites au plus tard dans le délai de trente jours consécutif à la réception de la réponse aux observations prévue à l'article L. 57 ou, à défaut, d'un document spécifique les invitant à formuler lesdites demandes (...) " ;
14. Considérant que la proposition de rectification du 15 mai 2013 mentionne explicitement en sa page 20 la possibilité qui est offerte à la société de renoncer expressément au bénéfice de la cascade pratiquée par l'administration fiscale, dans un délai de trente jours à compter de la réception de ce document ; que le moyen tiré par la société de ce qu'elle n'aurait pas été informée suffisamment de ses droits doit être écarté ;
Sur l'application des pénalités :
15. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
16. Considérant, d'une part, que la proposition de rectification du 15 mai 2013 expose les motifs tenant à l'ampleur des manquements constatés et à la volonté délibérée d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration de 40 % des droits dus ; que cette majoration est, par suite, suffisamment motivée ;
17. Considérant, d'autre part, qu'eu égard aux minorations importantes et répétées par la société de son chiffre d'affaires, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant la volonté délibérée de la SARL STPME d'éluder l'impôt et comme justifiant l'application des pénalités pour manquement délibéré ;
18. Considérant, en second lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 3 l'amende de 100 % prévue par l'article 1759 du code général des impôts appliquée au titre des années 2010 et 2011 a fait l'objet d'un dégrèvement par l'administration fiscale ;
19. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SARL STPME n'est pas fondée à demander la décharge des impositions restant en litige ; que doivent être rejetées dans les circonstances de l'espèce, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la STPME à concurrence de :
- 7 702 euros en ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos le 31 décembre 2010 et le 31 décembre 2011,
- 5 668 euros en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée établis au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011.
- 352 437 euros en ce qui concerne la pénalité prévue par l'article 1759 du code général des impôts.
Article 2 : Le surplus des requêtes de la SARL STPME est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL STPME, à Me A... B...es mandataire judiciaire de la SARL STPME et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-Mer.
Délibéré après l'audience du 8 mars 2018, où siégeaient :
- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim,
- M. Haïli, premier conseiller,
- M. Sauveplane, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2018.
N°16MA01271, 16MA01272 2