Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... G...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du directeur de l'agence nationale de l'habitat (ANAH) du 12 août 2014 décidant le retrait d'une subvention de 16 234 euros qui lui avait été accordée pour la rénovation d'un logement et la décision du 8 juillet 2015 réduisant cette somme à 7 143 euros et rejetant le surplus des demandes de son recours gracieux.
Par un jugement n° 1504921 du 4 mai 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 22 juin 2017 et le 18 avril 2018, M. G..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 4 mai 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler la décision du 12 août 2014 ;
3°) d'annuler la décision du 8 juillet 2015 ;
4°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'ANAH en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ANAH ne justifie pas lui avoir demandé de faire valoir ses observations sur la décision à intervenir ;
- les travaux ont été réalisés et le bail conventionné est toujours en cours de telle sorte qu'il a respecté les règles d'attribution de la subvention ;
- l'ANAH a été informée de la mutation de propriété, qui était forcée et non consentie ;
- en tout état de cause, l'adjudicataire du bien est tenu de poursuivre le bail en vertu des dispositions de l'article R. 322-2 du code des procédures civiles d'exécution et du cahier des conditions de vente annexé à l'acte de mutation, qui devait être rédigé par le créancier poursuivant ;
- les décisions attaquées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 12 avril 2018, l'ANAH, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. G... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. G... sont infondés.
Par une ordonnance du 18 avril 2018, la clôture de l'instruction a été reportée au 4 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code des procédures civiles d'exécution ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné, par arrêté du 29 mars 2018, Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur, pour présider par intérim la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Marseille à compter du 1er avril 2018.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. F... Grimaud, rapporteur ;
- les conclusions de M. C... Thiele, rapporteur public ;
- et les observations de Me E..., substituant Me B..., pour l'ANAH.
1. Considérant qu'en vue de la réhabilitation d'un bien immobilier constitué d'une annexe à leur habitation principale et situé 85 chemin de Torremila à Perpignan, M. et Mme A... et Elisabeth G...ont obtenu le 2 mai 2007 une subvention prévisionnelle de 14 760 euros ; qu'une convention à loyer social ou très social a été signée entre ces derniers et l'ANAH le 22 juin 2007 avec une prise d'effet le 1er mars 2008 et une fin le 28 février 2017 ; qu'à la suite du divorce des épouxG..., prononcé le 29 mars 2010, le bien en cause a fait l'objet d'une vente forcée sur saisie immobilière au bénéfice de la SCP Mas Tamaris par jugement d'adjudication du tribunal de grande instance de Perpignan du 13 septembre 2013 ; que le 16 octobre 2013, dans le cadre du contrôle des engagements souscrits par le bénéficiaire, les époux G...ont été invités par l'ANAH à justifier de la location du logement au plus tard le 29 novembre 2013 ; qu'à défaut de réponse de leur part, l'ANAH a renouvelé sa demande par courrier du 17 décembre 2013 en leur imposant de justifier du respect de leurs engagements avant le 6 janvier 2014 ; que, par une décision du 12 août 2014, le directeur général de l'ANAH a prononcé le retrait de la subvention et enjoint aux époux G...de reverser la somme de 16 234 euros ; que M. G... a formé un recours gracieux contre cette décision le 22 décembre 2014 ; qu'après avis de la commission locale d'amélioration de l'habitat, l'ANAH a, par une décision du 8 juillet 2015, arrêté le montant du reversement à la somme de 7 143 euros ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-3 du code de la construction et de l'habitation : " L'aide que l'Agence nationale de l'habitat accorde au propriétaire d'un logement à usage locatif pour y réaliser des travaux d'amélioration est subordonnée à la condition que le logement soit donné en location pendant une durée fixée par le règlement général de l'agence." ; qu'aux termes de l'article L. 321-4 du même code : " Une aide particulière peut être accordée au propriétaire qui s'engage à respecter des obligations définies par voie de convention. La convention, conforme à des conventions types prévues par décret, détermine notamment : / a) Le cas échéant, les travaux d'amélioration qui incombent au bailleur ; / b) Le montant maximum des loyers ; / c) Les conditions d'occupation du logement et, le cas échéant, ses modalités d'attribution ; / d) Sa durée, qui ne peut être inférieure à neuf ans si le propriétaire reçoit une aide pour réaliser des travaux d'amélioration, et à six ans dans le cas contraire ; / e) Les conditions de sa révision et de sa résiliation ; / f) Les pénalités encourues en cas de méconnaissance des engagements conventionnels. / Le contrôle du respect de la convention est assuré par l'Agence nationale de l'habitat (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 321-11 du même code : " En cas de mutation d'un bien faisant l'objet d'une convention mentionnée à l'article L. 321-4 ou à l'article L. 321-8, la convention en cours s'impose de plein droit au nouveau propriétaire. Les engagements de la convention en cours sont obligatoirement mentionnés dans l'acte de mutation. Un avenant précisant l'identité du nouveau propriétaire est signé entre celui-ci et l'Agence nationale de l'habitat. A défaut, l'Agence nationale de l'habitat peut appliquer au propriétaire vendeur les sanctions prévues à l'article L. 321-2. " ; qu'aux termes de l'article R. 321-21 du même code : " I - En ce qui concerne les aides versées par l'agence : / Le conseil d'administration ou, par délégation, le directeur général de l'agence exerce le pouvoir de sanction prévu à l'article L. 321-2. / (...) Le retrait et le reversement total ou partiel peuvent également être prononcés en cas de non-respect des prescriptions de la présente section ou des conventions conclues en application des articles L. 321-4 et L. 321-8, ou de toute autre convention liée au bénéfice des aides de l'agence, selon les modalités fixées par le règlement général de l'agence. / (...) Ces décisions sont prises à tout moment, avant ou après le versement du solde de la subvention. / (...) Lorsqu'elles sont prononcées après le versement du solde de la subvention, elles sont prises par l'agence. (...) " ; qu'en application de l'article R. 321-25 de ce code : " En cas de décès du propriétaire ou de mutation de propriété des logements conventionnés pour lesquels des travaux d'amélioration ont bénéficié d'une subvention de l'agence, lorsque les engagements de la convention ne sont pas poursuivis, la subvention est reversée dans les conditions prévues par le règlement général de l'agence " ; qu'aux termes de l'article 21 du règlement général de l'ANAH : " En cas de non-respect des prescriptions relatives aux aides de l'ANAH (articles R. 321-12 à R. 321-21 du CCH, engagements conventionnels, présent règlement général...), la décision de subvention sera retirée et tout ou partie des sommes perçues devra être reversé, en application du I de l'article R. 321-21 du CCH et dans les conditions précisées au présent article (...) Il y a exonération de reversement en cas de mutation dans les cas suivants : / (...) c) Concernant les bénéficiaires mentionnés aux I (1°) et II de l'article R. 321-12 du CCH (propriétaires ou exploitants qui donnent à bail), une décision de reversement peut être prononcée sauf si les acquéreurs, héritiers ou cessionnaires justifient, de façon expresse, du respect de l'ensemble des engagements réglementaires fixés par les articles R. 321-12 à R. 321-22 du CCH ainsi que, le cas échéant, des obligations conventionnelles spécifiques signées par le bénéficiaire initial de la subvention (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'ANAH peut décider du retrait et du reversement d'une subvention qu'elle a versée au propriétaire d'un logement à usage locatif lorsqu'elle constate que ce dernier n'a pas respecté les prescriptions fixées par le code de la construction et de l'habitation et le règlement général de l'ANAH, ou encore les engagements qu'il avait pris lorsqu'il a sollicité la subvention ;
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 alors en vigueur : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique " ;
5. Considérant que l'ANAH a, le 16 octobre 2013 puis le 17 novembre 2013, invité M. G... à justifier du respect des engagements découlant de la convention du 22 juin 2007 en l'avertissant des sanctions attachées à l'absence de réponse de sa part sur ce point ; qu'il a dès lors été mis à même de produire tout élément utile et de faire valoir ses observations ; que la circonstance que l'ANAH n'établisse pas que ces courriers ont été distribués à l'adresse à laquelle ils ont été envoyés à Perpignan est en tout état de cause sans incidence sur le bien-fondé du moyen tiré de la violation des dispositions précitées dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que M. G... résidait depuis le 20 septembre 2013 à Canet et qu'il n'établit pas avoir informé l'ANAH de sa nouvelle adresse ; qu'est de même sans incidence sur ce point la circonstance que l'ANAH n'a pas tenté de contacter M. G... par courrier électronique dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ou stipulation de la convention du 22 juin 2007 ne lui en faisait l'obligation pour mener à bien la procédure contradictoire ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que M. G... s'était engagé, aux termes de l'article VII de la convention du 22 juin 2007 à " informer l'ANAH dans les deux mois suivant l'évènement, de tout changement d'occupation ou d'utilisation des logements ou de toute mutation de propriété " ; qu'il n'établit pas avoir satisfait à cette obligation dans ce délai ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'ANAH a considéré qu'il avait méconnu cette stipulation ;
7. Considérant en troisième lieu, que la circonstance que les travaux ont été achevés est sans incidence sur la légalité des décisions attaquées dès lors que celles-ci ne se fondent pas sur leur non-exécution ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article R. 322-10 du code des procédures civiles d'exécution : " Au plus tard le cinquième jour ouvrable suivant l'assignation délivrée au débiteur saisi, le créancier poursuivant dépose au greffe du juge de l'exécution un cahier des conditions de vente comportant l'état descriptif de l'immeuble et les modalités de la vente. (...) / Le cahier des conditions de vente contient à peine de nullité : / (...) ; 4° La désignation de l'immeuble saisi, l'origine de propriété, les servitudes grevant l'immeuble, les baux consentis sur celui-ci et le procès-verbal de description (...) " ; qu'aux termes des dispositions de l'article R. 322-11 du même code : " Le cahier des conditions de vente est élaboré sous la responsabilité du créancier poursuivant. (...) " ;
9. Considérant que la convention conclue le 22 juin 2007 entre M. G... et l'ANAH ne constitue ni une servitude, ni un bail et qu'aucune obligation de la mentionner dans le cahier des conditions de vente ne pesait sur le créancier poursuivant ; qu'en tout état de cause, l'éventuelle méconnaissance de ses obligations par ce dernier est sans incidence sur le manquement de M. G... à l'obligation d'information de l'ANAH qui lui incombait en application de la convention du 22 juin 2007, y compris en cas de mutation non consentie ; que la circonstance que le bail d'habitation conventionné conclu par M. G... le 1er avril 2012 se soit poursuivi après la vente est de même sans incidence sur ce point dès lors qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 321-11 du code de la construction et de l'habitation que seule la mention de l'existence de la convention avec l'ANAH dans l'acte de vente et la conclusion d'un avenant à cette convention avec le nouveau propriétaire sont de nature à en assurer l'opposabilité à celui-ci ; que M. G... n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'ANAH aurait commis une erreur de droit ou une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il avait méconnu ses engagements contractuels à compter du 13 septembre 2013 et en décidant le recouvrement partiel de la subvention, proportionnellement à la durée pendant laquelle M. G... avait loué le bien dans des conditions conformes à la convention du 22 juin 2007 ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté, par le jugement attaqué, ses conclusions à fin d'annulation des décisions des 12 août 2014 et 8 juillet 2015 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'ANAH, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. G... sur ce fondement ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par l'ANAH à l'encontre de M. G... ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'ANAH tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G...et à l'ANAH.
Délibéré après l'audience du 4 juin 2018, où siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président,
- M. F... Grimaud, premier conseiller,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 juin 2018.
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N° 17MA02584