Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 8 août 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1610021 du 5 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 mai 2017, M. A... C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 avril 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 août 2016 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous une astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
- la décision a été signée par une autorité incompétente ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- le préfet en prenant la décision en cause a méconnu le droit d'être entendu et de présenter ses observations avant l'édiction de la mesure et a par suite violé l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît également l'article 3 de l'accord franco-tunisien dès lors qu'il dispose d'un contrat à durée indéterminée au sein de la société " Le comptoir des saveurs " ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le requérant n'apportant aucun élément nouveau à l'appui des mêmes moyens invoqués en première instance, ceux-ci sont infondés.
Par une décision du 15 décembre 2017, M. A... C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à hauteur de 25 %.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lopa Dufrénot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 8 août 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande présentée par M. A... C..., ressortissant tunisien né le 23 septembre 1978, tendant à son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par le jugement attaqué, dont M. A... C...relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande à fin d'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, M. A... C...persiste en appel à invoquer, sans apporter d'éléments de fait et de droit nouveaux, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de la décision portant refus de lui délivrer un titre de séjour, de son insuffisante motivation, du défaut de saisine de la commission du titre de séjour, de la méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ainsi que de celle des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988. De tels moyens doivent donc être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...)". En outre, aux termes de l'article R. 313-21 dudit code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ".
4. Alors qu'il soutient être entré en France en 2007, le requérant ne produit aucune pièce relative à cette année, de nature à démontrer qu'il aurait résidé cette année-là sur le territoire français. Pour les années 2008 à 2010, les documents médicaux versés au dossier attestent de son séjour ponctuel sur le territoire français mais ne permettent pas d'établir la réalité du caractère habituel de sa résidence en France au cours de la période contestée. Il justifie, notamment par la production de pièces nouvelles en appel, d'une activité professionnelle sur le territoire depuis juillet 2010, par la production de différents contrats à durée indéterminée démontrant qu'il a occupé les emplois de cuisinier, de serveur et depuis le 1er janvier 2016 celui de boucher-traiteur au sein de la société " Le comptoir des saveurs " dont il dispose de 49 % des parts. Toutefois, il ne ressort pas de l'ensemble de ces pièces la réalité de la présence de M. A... C... sur le territoire au cours des périodes de janvier 2013 à mai 2013, de janvier 2014 à mars 2014, et au cours de l'année 2015. En outre, il a fait l'objet d'un précédent refus de séjour, dont la légalité a été reconnue tant par le Tribunal administratif de Marseille que par la Cour administrative d'appel de Marseille, auquel il n'établit pas avoir déféré. Enfin, il est célibataire et sans charge de famille sur le territoire national. Dans ces conditions, malgré les nombreux témoignages qu'il verse aux débats des personnes qu'il côtoie et qu'il a côtoyées à son arrivée en France, le préfet des Bouches-du-Rhône, en prenant l'arrêté attaqué, n'a, eu égard à la durée et aux conditions du séjour du requérant en France, pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. M. A... C...fait valoir qu'il est entré en France le 2 septembre 2007, sous couvert d'un visa Schengen de 6 jours délivré par les autorités autrichiennes, et qu'il a travaillé à compter du 23 juillet 2010 en qualité de cuisinier, puis en 2013 en tant que serveur et depuis le 1er janvier 2016, qu'il est copropriétaire de la société " Le comptoir des saveurs " et occupe l'emploi de boucher-traiteur. Toutefois, ainsi que cela a été exposé précédemment, il est célibataire et sans charge de famille sur le territoire national. Dans ces conditions, l'arrêté attaqué portant refus de séjour, ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels il a été édicté et n'est pas intervenu en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision en cause serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
7. M. A... C...soutient de nouveau en appel, sans apporter d'éléments de fait et de droit nouveaux, que cette décision est insuffisamment motivée, qu'elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour, qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle. Dès lors, ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en litige du 8 août 2016. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A...C..., au ministre de l'intérieur et à Me B...D....
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 31 août 2018, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 14 septembre 2018.
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N° 17MA01986