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06/11/2018 | FRANCE | N°16MA02768

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 06 novembre 2018, 16MA02768


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A...épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'une part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le préfet de la zone de défense et de sécurité sud a rejeté ses demandes en date des 1er septembre 2011 et 7 janvier 2013 tendant au paiement de la facture en date du 16 août 2011, rectifiée le 3 janvier 2013, d'un montant de 1 794 euros de son avocat, Me G..., sa demande en date du 1er septembre 2011, tendant à mandater le paiement de la facture n° 038412 du 25 août 2

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A...épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Marseille d'une part, d'annuler les décisions implicites par lesquelles le préfet de la zone de défense et de sécurité sud a rejeté ses demandes en date des 1er septembre 2011 et 7 janvier 2013 tendant au paiement de la facture en date du 16 août 2011, rectifiée le 3 janvier 2013, d'un montant de 1 794 euros de son avocat, Me G..., sa demande en date du 1er septembre 2011, tendant à mandater le paiement de la facture n° 038412 du 25 août 2011 d'un montant de 3 588 euros de son avocat, Me F..., de sa demande en date du 24 octobre 2011 tendant à mandater le paiement de la note d'honoraire n° 2011-0604 du 7 juillet 2011, d'un montant de 350 euros de Me D..., de sa demande en date du 18 novembre 2012 tendant à bénéficier de l'assistance matérielle et juridique de son administration dans le cadre de l'introduction d'une requête devant la cour européenne des droits de l'homme et d'autre part, de condamner l'État à hauteur de 6 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait d'un défaut de protection fonctionnelle.

Par un jugement n° 1306667 du 19 mai 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire respectivement enregistrés le 5 juillet 2016, le 25 juillet 2016 et le 27 octobre 2016, Mme B... A...épouseC..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler les décisions rejetant ses demandes de remboursement des factures liées aux honoraires d'avocat dans le cadre des instances couvertes par la protection fonctionnelle ;

3°) d'enjoindre au ministre de procéder aux remboursements en cause ;

4°) de condamner l'État à hauteur de 6 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du défaut de protection fonctionnelle ;

5°) de mettre à la charge de l'État le versement à son profit de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont prononcé à tort un non-lieu à statuer ;

- les décisions rejetant implicitement ses demandes de remboursement ont fait l'objet de sa part d'une demande de communication des motifs ;

- la décision lui octroyant la protection fonctionnelle ne pouvait être rapportée et était inconditionnelle ;

- la note ministérielle du 18 janvier 1996 a une valeur réglementaire.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 juin 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutel,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

1. Considérant que Mme A..., brigadier de police, a sollicité le 17 mars 2009 le bénéfice de la protection fonctionnelle auprès du secrétaire général pour l'administration de la police à Marseille à la suite d'agissements commis à l'occasion de ses fonctions pour lesquels elle a déposé une plainte le 13 février 2009 ; que, par un jugement en date du 8 juillet 2010, devenu définitif, le tribunal administratif de Toulon a annulé le refus implicite opposé à cette demande de protection fonctionnelle ; que, par une décision en date du 30 juillet 2010, le directeur départemental de la circonscription de la sécurité publique des Bouches-du-Rhône lui a accordé le bénéfice de la protection fonctionnelle ; que, par courriers en date des 1er septembre et 24 octobre 2011, du 18 novembre 2012 et du 7 janvier 2013, Mme A... a sollicité auprès de son administration, le remboursement d'honoraires afférents aux frais d'assistance, de représentation et de conseil exposés dans le cadre des recours introduits devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et devant la cour de cassation puis devant la cour européenne des droits de l'homme ; que, par courrier en date du 14 août 2013, elle a sollicité l'annulation des décisions rejetant implicitement ses précédentes demandes et a formé une demande indemnitaire pour la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ; que, par jugement en date du 19 mai 2016, le tribunal a rejeté sa demande ; que Mme A... interjette appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, ainsi qu'il est soutenu, la facture d'honoraires d'avocat en date du 16 août 2011 à hauteur de 1 794 euros n'a pas été prise en charge par l'administration ; que, par suite, les premiers juges ont irrégulièrement décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la légalité de la décision refusant de faire droit au remboursement de cette dépense : qu'il y a lieu d'annuler, sur ce point, le jugement en litige ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer partiellement l'affaire et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par Mme A... devant le tribunal administratif, tendant à l'annulation de la décision rejetant le remboursement des honoraires d'avocat présentés par facture en date du 7 août 2011 ;

4. Considérant que cette dépense s'inscrit dans le cadre de la procédure engagée par la requérante pour injures publiques, outrage, harcèlement moral et discrimination dont il est avéré, conformément à ce qu'ont estimé les premiers juges au point 5 du jugement attaqué, qu'elle ne pouvait sérieusement aboutir, alors que l'intéressée a utilisé toutes les voies de réformation des actes de procédure entrepris ; qu'il s'ensuit que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision refusant le remboursement des frais en cause ;

Pour le surplus, sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, alors en vigueur : " " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui [...] refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir " ; qu'aux termes de l'article 5 de cette loi : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. " ;

6. Considérant que si, par courrier du 1er septembre 2011, Mme A... a présenté, pour remboursement, la facture n° 038412 du 25 août 2011 d'un montant de 3 588 euros de son avocat, Me F..., pour l'introduction du pourvoi en cassation de l'arrêt rendu le 17 mai 2011 par la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, l'intéressée a présenté par courrier du 7 janvier 2013, l'état de frais et honoraires du 3 janvier 2013 de ce même avocat qui annule et remplace sa précédente facture, du même montant, du 25 août 2011 ; qu'ainsi la demande du 1er septembre 2011 doit être regardée comme dépourvue d'objet et remplacée par la demande à hauteur de 3 588 euros en date du 7 janvier 2013 ; que, par un courrier du 24 octobre 2011, Mme A... a présenté la note d'honoraire n° 2011-0604 du 7 juillet 2011, d'un montant de 350 euros de Me D... qu'elle a consulté ; que, par lettre du 18 novembre 2012, Mme A... a sollicité l'assistance de son administration dans le cadre de l'introduction d'une requête devant la cour européenne des droits de l'homme pour la plainte qu'elle a déposée en février 2009 ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : 2° Lorsque la demande ne s'inscrit pas dans une procédure prévue par un texte législatif ou réglementaire ou présente le caractère d'une réclamation ou d'un recours administratif " ; qu'aux termes de l'article L. 112-3 du même code : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception. " ; toutefois suivant les termes de l'article L. 112-2 : " Les dispositions de la présente sous-section ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents. " ; qu'aux termes de l'article L. 232-4 : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués. " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'en cas de naissance d'une décision implicite de rejet du fait du silence gardé par l'administration pendant la période de

deux mois suivant la réception d'une demande, le délai de deux mois pour se pourvoir contre une telle décision implicite court dès sa naissance à l'encontre d'un agent public, alors même que l'administration n'a pas accusé réception de la demande de cet agent, les dispositions désormais codifiées à l'article L. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration n'étant pas applicables aux agents publics ; que ce n'est qu'au cas où, dans le délai de deux mois ainsi décompté, l'auteur de la demande adressée à l'administration reçoit notification d'une décision expresse de rejet, qu'il dispose alors, à compter de ladite notification, d'un nouveau délai pour se pourvoir ;

9. Considérant que si Mme A... fait valoir que, par lettre du 6 avril 2012, elle a demandé à l'administration la communication des motifs des décisions rejetant implicitement ses demandes, ce courrier avait trait à ses deux demandes de remboursement du 1er septembre 2011 et du 24 octobre 2011 ; que, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, cette lettre, présentée postérieurement au délai de recours contentieux, ne saurait être regardée comme ayant été présentée dans des délais utiles en application des dispositions de l'article L. 232-4 du code précité ; que, par suite, les décisions implicites de rejet des demandes en cause ne sont pas illégales faute de communication de leurs motifs ; qu'il en est de même de la lettre 14 août 2013 qui concerne également les demandes de remboursement des 18 novembre 2012 et 7 janvier 2013, dont les dates de réception ont fait naître des décisions implicites de rejet qui n'ont pas davantage fait l'objet d'une demande de communication des motifs dans les délais appropriés ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. / Lorsqu'un fonctionnaire a été poursuivi par un tiers pour faute de service et que le conflit d'attribution n'a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions n'est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui. / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / La collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ou à l'ancien fonctionnaire dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle... " ; que ces dispositions établissent à la charge des collectivités publiques, au profit des fonctionnaires et des agents publics non titulaires lorsqu'ils ont été victimes d'attaques dans l'exercice de leurs fonctions, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général ; que si cette obligation peut avoir pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles le fonctionnaire ou l'agent public est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu'il a subis¸ laquelle peut notamment consister à assister, le cas échéant, l'agent concerné dans les poursuites judiciaires qu'il entreprend pour se défendre, il appartient dans chaque cas à la collectivité publique d'apprécier, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la question posée au juge et du caractère éventuellement manifestement dépourvu de chances de succès des poursuites entreprises, les modalités appropriées à l'objectif poursuivi ;

11. Considérant, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que si la protection accordée à l'agent peut prendre la forme d'une prise en charge des frais engagés dans le cadre de poursuites judiciaires, elle n'a pas pour effet de contraindre l'administration à prendre à sa charge, dans tous les cas, l'intégralité de ces frais ; que si l'administration a refusé de prendre en charge l'intégralité des honoraires engagés par Mme A..., alors même que cette dernière avait obtenu la protection fonctionnelle par décision du 30 juillet 2010 du ministre de l'intérieur, il y a lieu sur ce point d'adopter le motif retenu par le premier juge, dès lors que ce motif est largement suffisant et n'appelle aucune précision en appel au regard des arguments exposés par la requérante, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance, par l'administration, des objectifs de protection fixés par les dispositions citées par la loi du 13 juillet 1983 ;

12. Considérant que la requérante ne saurait utilement se prévaloir de la note du ministre de l'intérieur en date du 18 janvier 1996 qui est dépourvue de valeur réglementaire ;

Sur les conclusions indemnitaires :

13. Considérant que pour obtenir la réparation d'un préjudice un requérant doit en établir la réalité, ainsi que l'existence d'un lien de causalité avec les agissements de l'administration susceptibles d'être regardés comme fautifs ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration, en s'abstenant de rembourser l'intégralité des frais engagés par Mme A..., n'a commis aucune faute ; qu'ainsi, les conclusions indemnitaires de Mme A..., tendant à réparer divers chefs de préjudice du fait d'une faute de l'administration, ne peuvent qu'être rejetées ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède d'une part, que la demande de Mme A... devant le tribunal tendant à l'annulation de la décision refusant de rembourser la facture du 16 août 2011 à hauteur de 1 794 euros est rejetée ; que d'autre part, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des autres décisions rejetant la prise en charge des honoraires d'avocat ainsi qu'à la condamnation de l'État du fait de la faute dans l'exercice de la protection fonctionnelle ; qu'il y a lieu par voie de conséquence de rejeter les conclusions de Mme A... présentées aux fins d'injonction ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il a déclaré qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur le remboursement de la facture d'honoraires du 16 août 2011 à hauteur de 1 794 euros.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal tendant à l'annulation du refus de remboursement de la facture du 16 août 2011 est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 16 octobre, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. Jorda, premier conseiller,

- M. Coutel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 novembre 2018.

N° 16MA02768 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02768
Date de la décision : 06/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-07-10-005 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Garanties et avantages divers. Protection contre les attaques.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Marc COUTEL
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SCP BERNARDINI GAULMIN - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-06;16ma02768 ?
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