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06/12/2018 | FRANCE | N°17MA03296

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2018, 17MA03296


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Hôtel des Pergolas a demandé au tribunal administratif de Marseille " d'annuler " la décision du 10 juin 2016 par laquelle le directeur du SIE (Service des Impôts des Entreprises) de Marignane a rejeté sa demande de remboursement immédiat du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi dont elle s'estimait titulaire au titre de l'année 2015, et de prononcer le remboursement immédiat de cette créance.

Par une ordonnance n° 1605806 du 30 mai 2017, le président de la sixième chambre d

u tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Hôtel des Pergolas a demandé au tribunal administratif de Marseille " d'annuler " la décision du 10 juin 2016 par laquelle le directeur du SIE (Service des Impôts des Entreprises) de Marignane a rejeté sa demande de remboursement immédiat du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi dont elle s'estimait titulaire au titre de l'année 2015, et de prononcer le remboursement immédiat de cette créance.

Par une ordonnance n° 1605806 du 30 mai 2017, le président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 juillet et un mémoire enregistré le 19 janvier 2018, la SAS Hôtel des Pergolas, représentée par la SELARL Sekri Valentin Zerrouk, agissant par Me A..., demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler cette ordonnance du président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille et de renvoyer l'affaire devant ce tribunal ;

2°) à titre subsidiaire, de réformer la décision attaquée en prononçant le remboursement immédiat de la créance détenue par l'entreprise ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande ne pouvait faire l'objet d'un rejet par ordonnance ;

- subsidiairement, sur le fond, elle peut se prévaloir de la qualification de petites et moyennes entreprises (PME) communautaire autonome, et doit, à ce titre, bénéficier du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi au titre de 2015, comme elle l'a demandé ;

- le FCPR Turenne Hotellerie A, seul à détenir plus de 25 % du capital, ne constitue pas une entité économique ;

- l'exception prévue par l'article 3 de l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 est d'interprétation stricte.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient à titre principal, que la requête n'est pas recevable, et à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par la SAS Hôtel des Pergolas ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 800/2008 de la commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité ;

- le règlement (UE) n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 107 et 108 du traité ;

- la loi du 13 juillet 1979 relative aux fonds communs de placement ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Paix,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Hôtel des Pergolas a demandé le 2 juin 2016 le remboursement immédiat d'une créance de crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi dont elle s'estime détentrice au titre de l'année 2015, pour un montant de 45 650 euros. L'administration fiscale a rejeté cette demande. La SAS Hôtel des Pergolas demande à la Cour d'annuler l'ordonnance du 30 mai 2017 par laquelle le président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Par l'ordonnance attaquée, le président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la SAS Hôtel des Pergolas comme étant manifestement irrecevable, les actes dont elle demandait l'annulation étant indissociables de l'ensemble de la procédure d'imposition. Si les conclusions de cette demande tendaient à " l'annulation " de la décision du 2 juin 2016, celle-ci mentionnait également le remboursement immédiat de la créance détenue par la société. Ces conclusions étaient dépourvues de toute ambigüité. De plus, la SAS Hôtel des Pergolas avait joint à sa demande présentée devant le tribunal administratif de Marseille, le rejet opposé par l'administration fiscale qu'elle entendait soumettre au tribunal administratif en tant qu'il ne lui accordait pas satisfaction. La contribuable a ainsi produit, à l'appui de sa requête, la décision prévue par les dispositions combinées des articles R. 190-1 du livre des procédures fiscales et R. 412-1 du code de justice administrative. Dans ces conditions, en ne requalifiant pas sa requête, pour lui donner un effet utile, le président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille a entaché sa décision d'irrégularité.

3. Il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur la demande présentée par la SAS Hôtel des Pergolas devant le tribunal administratif de Marseille et sur ses conclusions devant la Cour.

Sur le bien-fondé de la demande :

4. L'article 244 quater C du même code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce prévoit que : " I.- Les entreprises (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt ayant pour objet le financement de l'amélioration de leur compétitivité à travers notamment des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement. (...) II.- Le crédit d'impôt mentionné au I est assis sur les rémunérations que les entreprises versent à leurs salariés au cours de l'année civile (...). " L'article 199 ter C du même code prévoit que : " I.- Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater C est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été versées. L'excédent de crédit d'impôt constitue, au profit du contribuable, une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée, puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période. (...) II. La créance mentionnée au premier alinéa du I est immédiatement remboursable lorsqu'elle est constatée par l'une des entreprises suivantes : 1° Les entreprises qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission du 6 août 2008 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (...) ".

5. La définition des petites et moyennes entreprises (PME) communautaires résulte de l'annexe I au règlement 800/2008 de la commission du 6 août 2008 (UE), repris par le règlement n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité qui précise en son article 2 : " 1. La catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (PME) est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'EUR ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros. ". L'article 3 de l'annexe I, qui définit les types d'entreprises prises en compte pour le calcul de l'effectif et des montants financiers prévoit que : " 1. Est une "entreprise autonome" toute entreprise qui n'est pas qualifiée comme entreprise partenaire au sens du paragraphe 2 ou comme entreprise liée au sens du paragraphe 3. 2. Sont des " entreprises partenaires " toutes les entreprises qui ne sont pas qualifiées comme entreprises liées au sens du paragraphe 3 et entre lesquelles existe la relation suivante: une entreprise (entreprise en amont) détient, seule ou conjointement avec une ou plusieurs entreprises liées au sens du paragraphe 3,25 % ou plus du capital ou des droits de vote d'une autre entreprise (entreprise en aval).Une entreprise peut toutefois être qualifiée d'autonome, donc n'ayant pas d'entreprises partenaires, même si le seuil de 25 % est atteint ou dépassé, lorsque l'on est en présence des catégories d'investisseurs suivants, et à la condition que ceux-ci ne soient pas, à titre individuel ou conjointement, liés au sens du paragraphe 3 avec l'entreprise concernée: (a) sociétés publiques de participation, sociétés de capital à risque, personnes physiques ou groupes de personnes physiques ayant une activité régulière d'investissement en capital à risque (business angels) qui investissent des fonds propres dans des entreprises non cotées en bourse, pourvu que le total de l'investissement desdits business angels dans une même entreprise n'excède pas 1,25 million EUR. ".

6. L'administration a rejeté la réclamation de la SAS Hôtel des Pergolas au motif qu'elle n'était pas éligible à la qualification de PME autonome au sens communautaire tel que défini ci-dessus, dès lors que la répartition du capital social de la société faisait apparaître plusieurs fonds communs de placement dont le montant excède 1,25 millions d'euros.

7. En premier lieu la qualification de PME autonome au sens communautaire du règlement 800/2008 de la commission du 6 août 2008 ne s'oppose pas en elle-même à l'octroi du bénéfice du remboursement immédiat du crédit du crédit d'impôt compétitivité emploi, la qualification de PME autonome, de PME liée ou de PME partenaire ayant pour seul objet de modifier le calcul du seuil précité, dès lors qu'il y a lieu d'intégrer les données des entreprises partenaires ou liées pour apprécier le respect des seuils prévus par l'annexe I au règlement 800/2008 de la commission du 6 août 2008 (UE et par le règlement n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014.

8. En deuxième lieu, le ministre de l'action et des comptes publics ne peut pas utilement faire référence au seuil excédant 1,25 millions d'euros au-delà-duquel les participations d'investisseurs, dépassant 25 % du capital de l'entreprise, doivent être prises en compte pour l'appréciation des seuils prévus par le règlement. En effet ces participations sont celles réalisées par des " business angels " c'est-à-dire des personnes physiques qui décident d'investir une partie de leur patrimoine financier dans des entreprises innovantes et qui peuvent apporter leurs conseils aux entrepreneurs, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient également le ministre l'article 199 ter C précité n'exclut pas, en tant que tel, les entreprises qui répondraient à la définition des PME au sens du droit communautaire mais dont le capital serait détenu par des FCPR et qui ne seraient pas nouvelles.

9. En troisième lieu, et en tout état de cause, en vertu de l'article 1er de la loi susvisée du 13 juillet 1979 qui a créé les fonds communs de placement, ces derniers constituent une copropriété de valeurs mobilières et de sommes placées à court terme et à vue qui n'ont pas la personnalité morale et auxquels le droit des sociétés n'est pas applicable. Ils ne peuvent donc être considérés comme une entreprise ayant une activité économique au sens et pour l'application du a du 2 de l'article 3 du règlement 800/2008 de la commission du 6 août 2008 confirmé sur ce point par le règlement n° 651/2014. Dans ces conditions, la SAS Hôtel des Pergolas est fondée à soutenir que la participation du FCPR Turenne Hôtellerie A pour 46,074 % des parts comme d'ailleurs celle des autres fonds communs de placements ne doit pas être prise en compte pour la détermination de la répartition de son capital. La SAS Hôtel des Pergolas soutient sans être contestée que son chiffre d'affaires s'élevait à 2,5 millions d'euros au titre de l'année 2015, qu'elle employait vingt-neuf salariés et que le total de son bilan était de 4,6 millions d'euros soit en dessous des seuils maximums prévus par l'annexe au règlement n° 800/2008 du 6 août 2008. Elle est par suite fondée à soutenir qu'elle peut obtenir le remboursement immédiat du crédit d'impôt en litige.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SAS Hôtel des Pergolas est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance susvisée du président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille et le remboursement immédiat du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi qu'elle a réclamé au titre de l'année 2015, pour un montant de 45 650 euros. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1605806 du 30 mai 2017 du président de la sixième chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.

Article 2 : Il est accordé à la SAS Hôtel des Pergolas le remboursement immédiat d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi d'un montant de 45 650 euros au titre de l'exercice clos en 2015.

Article 3 : L'Etat versera à la SAS Hôtel des Pergolas une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Hôtel des Pergolas et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-Mer.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2018, où siégeaient :

- Mme Mosser, présidente,

- Mme Paix, présidente assesseure,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.

N° 17MA03296 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03296
Date de la décision : 06/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme MOSSER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : SELARL SEKRI VALENTIN ZERROUK

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-06;17ma03296 ?
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