Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 23 août 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1807821 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédures devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 14 mars 2019 sous le n° 19MA01232, M. F... A...C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 23 août 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant autorisation de travailler dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 400 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
* la minute du jugement n'est pas signée ;
* l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
* il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
* la commission du titre de séjour aurait dû être saisie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 14 mars 2019 sous le n° 19MA01233, M. E... C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2019 ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le versement de la somme de 1 500 euros.
Il soutient que :
* l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables, pour lui et sa famille ;
* il développe des moyens sérieux de réformation du jugement dans sa requête au fond.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
* la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
* le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
* le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Tahiri a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... C..., ressortissant tunisien né en 1948, a présenté le 21 décembre 2017 une demande de titre de séjour. Par arrêté du 23 août 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours. M. A... C... fait appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 23 août 2018. Il présente également une requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes pour qu'elles fassent l'objet du même arrêt.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Contrairement à ce qui est allégué, la minute du jugement attaqué comporte les signatures manuscrites du président de la formation de jugement, du magistrat rapporteur et du greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré du défaut de signature de la minute du jugement manque en fait.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...) ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " et aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
4. M. A... C... déclare résider en France depuis la date de son entrée sur le territoire national en 2004. Toutefois, il n'établit pas le caractère habituel de sa présence par les pièces qu'il produit, et notamment des relevés bancaires, des ordonnances médicales, des factures d'achat non probants et des avis de non-imposition, par des attestations insuffisamment circonstanciées rédigées par des proches ou, eu égard notamment à la suppression des contrôles aux frontières au sein de l'espace formé par les États membres à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, par la production de passeports vierges. Ces éléments, s'ils prouvent une présence ponctuelle du requérant sur le territoire français, ne peuvent démontrer en revanche le caractère habituel de sa résidence en France depuis 2004, en particulier pour la période de 2007 à 2009. En outre, il ressort également des pièces du dossier qu'il est célibataire, n'a pas de charge de famille et il n'établit pas être dénué de famille en Tunisie. Dans ces conditions, la décision de refus de séjour ne peut être regardée comme ayant porté au droit de M. A... C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'a pas davantage méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale du requérant.
5. En second lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Pour les motifs indiqués au point 4, M. A... C... ne remplissait pas les conditions prévues par ces dispositions. Ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour précitée avant de rejeter sa demande.
6. Il résulte de ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 23 août 2018.
Sur les conclusions à fins de sursis à exécution du jugement :
7. Dès lors qu'il a été statué par le présent arrêt sur les conclusions de M. A... C... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2019, ses conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement se trouvent privées d'objet.
Sur les conclusions à fins d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de M. A... C...dirigées contre l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 23 août 2018, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions du requérant tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant autorisation de travailler doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme dont le requérant demande le versement au titre des frais exposés, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas partie perdante.
D É C I D E :
Article 1er : La requête n° 19MA01232 de M. A... C... et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'instance n° 19MA01233 sont rejetées.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de de M. A... C... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2019.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2019, où siégeaient :
* M. Gonzales, président,
* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
* Mme Tahiri, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juillet 2019.
N° 19MA01232,19MA01233 2