Vu la procédure suivante :
Par un arrêt n° 17MA00806 du 8 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a porté à 21 000 euros la somme que la commune de Pietraserena et le syndicat intercommunal de la Foata ont été solidairement condamnés à verser à M. Jean-EmileMARIANI, leur a enjoint de réaliser toutes les démarches nécessaires à l'accomplissement de la procédure d'expropriation portant sur le terrain d'assiette de plusieurs ouvrages publics, sauf à parvenir à une solution amiable avec M. MARIANIou à déplacer les ouvrages, dans un délai de six mois à compter de la date de notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et a mis à leur charge le versement de la somme de 1 000 euros chacun à M. MARIANI en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par des mémoires enregistrés le 15 mai et le 24 juin 2019, M.MARIANI, représenté par Me Marchiani, demande à la cour :
1°) de liquider l'astreinte prononcée par l'arrêt du 8 novembre 2018 ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Pietraserena et du syndicat intercommunal de la Foata la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que l'arrêt du 8 novembre 2018 n'a pas été exécuté, non plus que l'article 2 du jugement n° 1500591 du 12 janvier 2017 du tribunal administratif de Bastia ayant fait l'objet de l'appel.
La commune de Pietraserena a communiqué des pièces à la cour le 2 et le 10 juin 2019.
Le syndicat intercommunal de la Foata a communiqué des pièces à la cour le 7 et le 12 juin 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code monétaire et financier ;
- la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 ;
- la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013, notamment son article 39 ;
- le décret n° 2008-479 du 20 mai 2008 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la cour a désigné Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Merenne,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant M. MARIANI.
Considérant ce qui suit :
1. L'article L. 911-4 du code de justice administrative prévoit que : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".
2. L'article L. 911-7 du même code dispose en outre que : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / (...) / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ".
3. Par un arrêt n° 17MA00806 du 8 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a porté à 21 000 euros la somme que la commune de Pietraserena et le syndicat intercommunal de la Foata ont été solidairement condamnés à verser à M. Jean-EmileMARIANI, leur a enjoint de réaliser toutes les démarches nécessaires à l'accomplissement de la procédure d'expropriation portant sur le terrain d'assiette d'un château d'eau, d'un répartiteur d'eau et d'un réseau de canalisations souterraines irrégulièrement implantés sur la parcelle de l'intéressé, sauf à parvenir à une solution amiable avec M. MARIANIou à déplacer les ouvrages, dans un délai de six mois à compter de la date de notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et a mis à leur charge le versement de la somme de 1 000 euros chacun à M. MARIANI en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. MARIANIfait valoir que l'arrêt du 8 novembre 2008 n'a pas été exécuté, tant en ce qui concerne l'injonction qu'en ce qui concerne les condamnations pécuniaires.
4. Par ailleurs, le tribunal administratif de Bastia, par le jugement du 12 janvier 2017 ayant fait l'objet de l'appel devant la cour administrative d'appel de Marseille et n'ayant pas été réformé sur ce point, a condamné solidairement la commune et le syndicat à verser à M.MARIANI, à l'article 1er, la somme de 5 000 euros, et à l'article 2, celle de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. MARIANIfait valoir que cet article 2 n'a pas été exécuté.
Sur l'exécution de l'injonction prononcée par la cour :
5. Par un arrêté du 28 janvier 2019, le préfet de la Haute-Corse a déclaré d'utilité publique la régularisation du réservoir d'eau potable et de deux canalisations et a déclaré cessible la parcelle appartenant à M. MARIANIpour une surface de 225 mètres carrés servant d'assiette au château d'eau. Par un arrêté du 22 février 2019, le préfet a en outre institué une servitude pour permettre le passage des canalisations sur le reste de la parcelle. Enfin, par une ordonnance du 28 mai 2019, le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Bastia a prononcé le transfert de la propriété de la partie de la parcelle ayant fait l'objet de la déclaration d'utilité publique. Contrairement à ce que fait valoir M.MARIANI, l'exécution de l'arrêt de la cour n'implique pas l'expropriation de la totalité de la parcelle. Il appartient cependant au requérant de saisir le juge de l'expropriation s'il estime que cette expropriation partielle lui cause un préjudice. La présence de vannes d'eau et d'une piste donnant accès aux ouvrages n'a pas été évoquée devant la cour avant l'arrêt du 8 novembre 2018 et est extérieure à l'autorité de la chose jugée par cet arrêt. La commune justifie en conséquence avoir réalisé les démarches nécessaires pour régulariser les ouvrages en litige lui appartenant. Elle a ainsi exécuté l'injonction prononcée par la cour, quand bien même la procédure d'expropriation s'est achevée après l'expiration du délai imparti pour accomplir ces démarches. Il n'y a dès lors pas lieu de procéder à la liquidation de l'astreinte en ce qui la concerne.
6. Le syndicat intercommunal de la Foata s'est borné à adresser au préfet de la Haute-Corse un dossier en vue de la réalisation d'une enquête publique pour l'expropriation d'une parcelle de 15 mètres carrés servant d'assiette au répartiteur lui appartenant par un courrier du 5 juin 2019, soit après l'expiration du délai imparti par l'arrêt du 8 novembre 2018 et la lettre du greffe l'invitant à justifier devant la cour des démarches entreprises pour exécuter celui-ci. Le syndicat n'a ainsi pas accompli les diligences nécessaires en vue d'exécuter l'injonction prononcée par celle-ci dans le délai imparti. Il y a lieu de modérer le taux de l'astreinte à 50 euros par jour de retard afin de tenir compte des démarches entreprises par le syndicat après l'expiration du délai imparti, et de la liquider au bénéfice de M. MARIANIpour la période comprise entre le 13 mai 2019, date à laquelle le délai de six mois imparti à compter de la notification de l'arrêt a expiré, et le 5 juin 2019, date à laquelle la démarche permettant d'initier la procédure d'expropriation a été accomplie par le syndicat, soit à hauteur de la somme de 1 200 euros mise à la charge de celui-ci. Il appartiendra au syndicat de communiquer sans délai à la cour les décisions prises par le préfet de la Haute-Corse relatives à la déclaration de l'utilité publique du projet, et en tout état de cause d'informer la cour dans un délai de six mois de l'état d'avancement de cette procédure.
Sur l'exécution des condamnations pécuniaires :
7. A la suite du jugement du 12 janvier 2017 du tribunal administratif de Bastia, la commune de Pietraserena, par un mandat de paiement émis le 14 juillet 2017, a ordonnancé la somme de 2 500 euros correspondant à la moitié de la condamnation solidaire prononcée au principal, à laquelle s'ajoute la somme de 750 euros correspondant à la moitié de la somme mise solidairement à sa charge par l'article 2. Le syndicat intercommunal de la Foata en a fait de même par un mandat du 4 décembre 2017.
8. A la suite de l'arrêt du 8 novembre 2018, la commune de Pietraserena, par un mandat émis le 28 avril 2019, a ordonnancé la somme de 8 000 euros correspondant à la moitié de la majoration de la condamnation solidaire prononcée au principal, à laquelle s'ajoute la somme de 1 000 euros mise à sa charge par l'article 7 du même arrêt sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le syndicat intercommunal de la Foata en a fait de même par un mandat du 24 mai 2019.
9. Les condamnations emportaient elles-mêmes de plein droit intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt en application de l'article 1231-7 du code civil. En l'absence de paiement dans le délai de deux mois à compter du jour où l'arrêt est devenu exécutoire, le taux de l'intérêt légal a ensuite été majoré de cinq points en application de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. En outre, en l'absence d'accord du créancier, les paiements partiels se sont d'abord imputés sur les intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-1 du code civil. Les sommes restant dues après les paiements partiels font ainsi également courir les intérêts au taux majoré à compter des dates auxquelles ces paiements ont été effectués.
10. Les sommes mandatées avec retard n'ont pas pris en compte les intérêts à calculer dans les conditions rappelées ci-dessus. Les condamnations prononcées tant par le tribunal administratif que par la cour n'ont donc pas été entièrement exécutées. Il y a lieu d'enjoindre à la commune de Pietraserena et au syndicat intercommunal de la Foata d'y procéder par l'émission de mandats de paiement dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
11. En outre, le paiement effectif de certaines des sommes mandatées est débattu devant la cour. Il appartiendra à la commune et au syndicat de communiquer sans délai à celle-ci les mandats de paiement émis pour parfaire l'exécution de ces condamnations, ainsi que de se rapprocher du directeur départemental des finances publiques de la Haute-Corse pour s'assurer de leur paiement, étant précisé qu'ils peuvent être remboursés de façon récursoire par l'Etat, sur le fondement de l'article 39 de la loi du 28 janvier 2013, de la part des intérêts moratoires versés imputable à un comptable de l'Etat.
Sur les frais liés au litige :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. MARIANIsur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le syndicat intercommunal de la Foata est condamné à verser la somme de 1 200 euros à M. MARIANI en exécution de l'article 5 de l'arrêt de la cour administrative d'appel du 8 novembre 2018.
Le syndicat intercommunal communiquera sans délai à la cour les décisions prises par le préfet de la Haute-Corse relatives à la déclaration de l'utilité publique du projet, et en tout état de cause informera celle-ci de l'état d'avancement de cette procédure dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 2 : Il est enjoint à la commune de Pietraserena et au syndicat intercommunal de la Foata d'émettre des mandats de paiement portant sur le solde des condamnations prononcées aux articles 3 et 7 de l'arrêt du 8 novembre 2018 et à l'article 2 du jugement du 12 janvier 2017 du tribunal administratif de Bastia dans les conditions prévues au point 9 du présent arrêt, dans un délai d'un mois à compter de sa notification.
La commune, le syndicat intercommunal et le directeur départemental des finances publiques de Haute-Corse communiqueront sans délai à la cour copie des actes justifiant des mesures prises en vue du paiement effectif des sommes dues.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. MARIANIest rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Emile MARIANI, à Mme FrançoiseMARIANI, à la commune de Pietraserena et au syndicat intercommunal de la Foata.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Haute-Corse, au directeur départemental des finances publiques de la Haute-Corse et au ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière.
Délibéré après l'audience du 27 juin 2019, où siégeaient :
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- MmeE..., première conseillère,
- M. Merenne, premier conseiller.
Lu en audience publique le 11 juillet 2019.
Le rapporteur,
signé
S. MERENNE
La présidente,
signé
K. JORDA-LECROQ
La greffière,
signé
C. MONTENERO
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Corse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
5
N° 17MA00806