Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les arrêtés du 20 février 2019 par lesquels le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de six mois et a ordonné son assignation à résidence dans le département de l'Hérault pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 1900922 du 27 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 mars 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler les arrêtés du préfet de l'Hérault du 20 février 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
* en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, faute de consultation préalable du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de son état de santé, et méconnaît également pour cette raison les dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
* en ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 511-1 II 3b du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
* en ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français, elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 II du même code ;
* en ce qui concerne la décision d'assignation à résidence, elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité des autres décisions en litige ; en tout état de cause, elle est illégale compte tenu de son état de santé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné par décision du 23 janvier 2020, Mme E..., présidente assesseure, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né en 1972, fait appel du jugement du 27 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 20 février 2019 par lesquels le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de six mois et a ordonné son assignation à résidence dans le département de l'Hérault pour une durée de quarante-cinq jours.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) " et aux termes de l'article R. 511-1 du même code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. (...) ".
3. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des procès-verbaux d'audition établis par les services de police le 20 février 2019, que l'intéressé, qui a uniquement indiqué être asthmatique et avoir été opéré en 2016 pour des problèmes thyroïdiens, aurait porté à la connaissance de l'administration, préalablement à l'intervention de la décision en litige, des éléments relatifs à son état de santé justifiant pour le préfet de saisir pour avis le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration avant d'édicter l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre.
4. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux produits, qui ne se prononcent pas sur la disponibilité en Algérie d'un traitement adapté aux troubles dont souffre M. A..., que ce dernier ne pourrait bénéficier d'un tel traitement dans ce pays. Par suite, en décidant de l'obliger à quitter le territoire français sans délai, le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. - 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. M. A... déclare être entré en France en septembre 2015. Il n'établit pas la réalité de sa relation sentimentale alléguée avec une ressortissante française en se bornant à produire une attestation émanant d'une femme qui indique l'employer comme aide-soignant et avoir besoin de sa présence à son chevet. Il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans en Algérie, où il a nécessairement conservé des attaches, notamment en la personne de ses trois enfants, de ses parents, de ses trois frères et de ses deux soeurs. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé en France, la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Enfin, il résulte des circonstances de fait précédemment énoncées qu'en obligeant M. A... à quitter le territoire français, le préfet de l'Hérault n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
8. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 ; (...) ".
9. En premier lieu, l'arrêté en litige, en tant qu'il refuse d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire, cite les dispositions des 3° b) et f) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que l'intéressé s'est maintenu sur le territoire au-delà de la durée de validité de son visa, a utilisé l'identité de son frère lors de son interpellation et a fourni des renseignements inexacts avant d'avouer sa véritable identité. Cette décision comporte également une description détaillée des conditions de séjour en France du requérant. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
10. En second lieu, compte tenu des éléments caractérisant la situation du requérant, telle que rappelée aux points précédents, le préfet de l'Hérault a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, prononcer à son encontre la mesure critiquée.
Sur la décision portant interdiction de retour :
11. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.(...). ".
12. Eu égard aux conditions d'entrée et de séjour en France de M. A..., telles que décrites précédemment, et bien que sa présence ne représente pas une menace pour l'ordre public, le préfet de l'Hérault n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en prenant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Sur la décision portant assignation à résidence :
13. En premier lieu, les moyens dirigés contre les décisions faisant à M. A... obligation de quitter sans délai le territoire français et prononçant à son encontre une interdiction de retour d'une durée de six mois n'étant pas fondés, les exceptions d'illégalité de ces décisions invoquées par le requérant à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant assignation à résidence ne peuvent qu'être écartées par voie de conséquence.
14. En second lieu, aux termes du I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ". Aux termes des 4ème et 5ème alinéas de l'article L. 561-1 du même code, également applicable aux mesures d'assignation à résidence prises sur le fondement de l'article L. 561-2 : " L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. (...) / L'autorité administrative peut également, aux fins de préparation du départ de l'étranger, lui désigner, en tenant compte des impératifs de la vie privée et familiale, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside, dans la limite de trois heures consécutives par période de vingt-quatre heures. Lorsque l'étranger est assigné à résidence en application des 5° ou 6° ou au titre d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3 à L. 523-5 ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, la durée de cette plage horaire peut être portée à dix heures consécutives par période de vingt quatre heures. (...) ".
15. Il ressort des pièces du dossier que la décision en litige impose à M. A..., d'une part, de demeurer dans le département de l'Hérault pour une durée de quarante-cinq jours, et d'autre part, de se présenter, au cours de la période considérée, tous les lundis, mercredis et vendredis à 8h30 auprès du commissariat de Béziers. Le requérant ne fait valoir aucune circonstance, tenant à son état de santé, rendant impossible ou excessivement difficile l'accomplissement de ces différentes obligations. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 30 janvier 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme E..., présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
- Mme Courbon, premier conseiller,
- Mme D..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2020.
N° 19MA01429 2