Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 22 mars 2019 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par une ordonnance n° 1905187 du 27 septembre 2019, la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 octobre 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du tribunal administratif de Marseille du 27 septembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour d'une durée de validité d'un an et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et de prendre une nouvelle décision dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, il a déposé un mémoire reprenant les éléments de fait et de droit concernant sa situation personnelle et familiale ;
- l'arrêté du 22 mars 2019 méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Un mémoire, enregistré le 14 août 2020 et présenté pour M. C..., n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 6111 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les observations de Me A..., représentant M. C....
Une note en délibéré présentée pour M. C... a été enregistrée le 4 septembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né en 1980, fait appel de l'ordonnance du 27 septembre 2019 par laquelle la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 22 mars 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français.
Sur le bien-fondé de l'ordonnance contestée :
2. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bienêtre économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. La circonstance qu'un étranger est susceptible de bénéficier d'une procédure de regroupement familial ne le prive pas de la faculté de se prévaloir, le cas échéant, de l'atteinte disproportionnée qu'un refus de titre de séjour porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
4. M. C... fait valoir qu'il réside en France depuis 2012, qu'il s'est marié en octobre 2016 avec une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2022 et qu'un enfant est né en juin 2017 de leur union. Il fait également valoir qu'il s'occupe de l'enfant que son épouse a eu d'une précédente union et qui présente un handicap, qu'il dispose d'une promesse d'embauche et que la demande de regroupement familial présentée en sa faveur a été rejetée. Si les pièces produites, pour la première fois en appel, ne suffisent pas, par leur caractère épars, à établir sa présence en France depuis 2012, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la durée de l'union de M. et Mme C..., de près de deux ans et demi à la date de l'arrêté attaqué, et à la présence d'un enfant en bas âge à leur foyer, le refus de titre de séjour a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a, ainsi, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête ainsi que la régularité de l'ordonnance du 27 septembre 2019 de la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille, d'annuler cette ordonnance et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 22 mars 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".
6. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique que soit délivré à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous réserve d'un changement de circonstances de droit et de fait à la date de la nouvelle décision du préfet des Bouches-du-Rhône. Il y a lieu, par suite, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer ce titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C... de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du 27 septembre 2019 de la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 22 mars 2019 du préfet des Bouches-du-Rhône sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lascar, président,
- Mme E..., présidente assesseure,
- Mme D..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 septembre 2020.
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N° 19MA04480
nc