Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le certificat d'urbanisme délivré le 3 septembre 2019 par lequel le maire de la commune de la Bastide d'Engras a déclaré que la division d'un terrain en vue de créer trois lots à bâtir n'était pas réalisable.
Par une ordonnance n° 1903239 du 13 janvier 2020, le président de la première chambre du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 11 mars 2020, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la première chambre du tribunal administratif de Nîmes du 13 janvier 2020 ;
2°) d'annuler le certificat d'urbanisme délivré le 3 septembre 2019 par le maire de la commune de la Bastide d'Engras ;
3°) de mettre à la charge de la commune de la Bastide d'Engras le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la commune ne lui avait communiqué aucune information sur l'état d'avancement du futur plan local d'urbanisme et sur les règles applicables ;
- le premier juge a omis de répondre au moyen tiré de ce qu'elle a indiqué pourvoir prendre en charge le coût des travaux d'extension du réseau public d'électricité ;
- la commune n'a pas pris position sur les moyens soulevés dans la requête introduite devant le tribunal administratif ;
- elle avait proposé de prendre à sa charge le coût des travaux d'extension du réseau public d'électricité, ce qui était possible en application de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ;
- il a été accordé à une parcelle mitoyenne à la sienne un permis de construire ;
- même si le terrain d'assiette du projet de création des trois lots est situé en zone AP du projet du PLU arrêté le 15 juillet 2019, l'opération envisagée ne porte pas atteinte à la préservation et à la valorisation de l'environnement et du paysage ;
- le maire ne pouvait légalement délivrer un certificat d'urbanisme négatif en se fondant sur un sursis à statuer en cas de demande d'autorisation d'urbanisme.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... a déposé le 1er juillet 2019 auprès du maire de la commune de la Bastide d'Engras une demande de certificat d'urbanisme opérationnel en vue de créer trois lots à bâtir sur un terrain cadastré B 1201 et B 1203 situé au lieu-dit " Sarto ", route de Pougnadoressse, destiné à accueillir trois maisons individuelles. Par la décision en litige, le maire de la commune a délivré un certificat d'urbanisme indiquant que l'opération envisagée était non réalisable. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cette décision. Par l'ordonnance attaquée, le premier juge a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents des formations de jugement des cours peuvent (...), par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
Sur la régularité de l'ordonnance :
3. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'ordonnance attaquée que le premier juge a relevé que selon l'avis d'ENEDIS, l'opération projetée par Mme C... prévoyait d'alimenter une installation" dont la puissance ne relève pas d'un branchement pour un particulier " et nécessitait, compte tenu de la distance entre le réseau et la parcelle, non un raccordement qui peut être pris en charge par le pétitionnaire dans les conditions prévues à l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme, mais une extension du réseau public de distribution d'électricité, laquelle, au contraire du raccordement, ne peut être financée par le pétitionnaire. Il a ainsi implicitement mais nécessairement répondu à l'argumentation de Mme C... qui faisait valoir qu'elle s'engageait à financer le coût des travaux d'extension. Pour le surplus, Mme C... ne précise pas à quel moyen le premier juge se serait abstenu de répondre.
4. En deuxième lieu, les dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative permettent aux présidents des formations de jugement de rejeter par ordonnance les requêtes qui ne comportent, notamment, que des moyens inopérants, sans être tenus de procéder à une instruction contradictoire. Dès lors, la circonstance qu'en l'espèce, " la commune n'a pas pris position sur les moyens soulevés dans la requête introduite devant le tribunal administratif " n'est pas de nature à entacher l'ordonnance attaquée d'irrégularité.
Sur le bien-fondé de l'ordonnance :
5. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus (...). Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'Etat, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis. / Le certificat d'urbanisme est délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat par l'autorité compétente mentionnée au a et au b de l'article L. 422-1 du présent code ".
6. Il résulte des dispositions citées au point 5 qu'il appartient à l'autorité compétente, saisie d'une demande présentée sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, de délivrer un certificat d'urbanisme négatif lorsque le terrain ne peut être utilisé pour l'opération envisagée compte tenu de la localisation et de la destination du ou des bâtiments projetés et des modalités de desserte par les équipements publics existants ou prévus.
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés.(...) ". Il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé ou un certificat d'urbanisme négatif doit être délivré lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.
8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis d'ENEDIS daté du 5 août 2018, que des travaux d'extension du réseau public d'électricité sont nécessaires à la création de trois lots à bâtir envisagée par Mme C..., et qu'à la date de la décision contestée, la commune n'était pas à même de fixer un délai pour la réalisation de ces travaux. Si Mme C... fait valoir que le pétitionnaire est susceptible de prendre en charge des travaux de raccordement au réseau d'électricité dans les conditions prévues à l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme, elle n'apporte aucun élément de nature à établir que, compte tenu de la distance entre les terrains en cause et le réseau d'électricité et de la puissance électrique nécessaire, l'opération projetée ne nécessitait pas une extension du réseau et non un simple raccordement. Une extension présentant le caractère d'un équipement public, son financement ne pouvait être pris en charge par Mme C.... Dès lors, il appartenait au maire de la commune de la Bastide d'Engras de déclarer l'opération non-réalisable.
9. En deuxième lieu, l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme prévoit que " L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. ". L'article L. 424-1 du même code prévoit que " Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus au 6° de l'article L. 102-13 et aux articles L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. ".
10. Il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal a délibéré sur le projet d'aménagement et de développement durable (PADD) le 15 novembre 2016 et que la délibération arrêtant le projet de plan local d'urbanisme est intervenue lors d'une réunion du conseil municipal du 15 juillet 2019. Par suite, le maire de la commune pouvait légalement déclarer l'opération non réalisable au motif qu'en cas de dépôt d'une demande de permis de construire, un sursis à statuer serait susceptible de lui être opposé sur le fondement du plan local d'urbanisme à venir s'il estimait les conditions prévues aux articles L. 153-11 et L. 424-1 du code de l'urbanisme remplies. La circonstance que la commune n'aurait communiqué aucune information sur l'état d'avancement du futur plan local d'urbanisme et sur les règles applicables à Mme C... est sans incidence sur la légalité du motif litigieux.
11. Enfin, il ressort des pièces du dossier que les parcelles litigieuses sont situées dans le futur plan local d'urbanisme en zone Ap correspondant aux secteurs de protection de la silhouette paysagère du village et des vues patrimoniales au sud et à l'ouest du village dans lequel les constructions et installations sont interdites. Ce classement s'inscrit dans l'orientation n° 1 du plan d'aménagement et de développement durable qui entend préserver et valoriser l'environnement et le paysage par rapport à la préservation des zones agricoles. Mme C... fait valoir que ses parcelles se situent en contrebas de la route et se prévaut des documents photographiques versés au dossier pour contester que son projet de construction de trois maisons individuelles soit de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme. Il ressort de l'ensemble des pièces du dossier que les parcelles litigieuses, à l'état naturel et plantées de vignes sont situées à proximité du village dans un secteur non bâti. La circonstance, à la supposer établie, qu'il n'existerait aucune vue directe depuis le village sur ces terrains, n'est pas de nature à établir que la construction de trois maisons individuelles ne porterait pas atteinte à la silhouette paysagère du village et aux vues patrimoniales au sud et à l'ouest du village. Par ailleurs, le projet est directement prévu sur des terrains présentant le caractère d'un paysage agricole, alors que le classement de ce secteur en zone Ap s'inscrit directement dans l'orientation définie par le PADD, tendant à la préservation des paysages agricoles. Dans ces conditions, Mme C... n'apporte pas en appel d'élément de nature à établir que le maire de la Bastide d'Engras ne pouvait légalement déclarer l'opération non réalisable au motif qu'un sursis à statuer serait opposé à une demande de permis de construire.
12. La circonstance qu'un permis de construire ait été délivré sur une parcelle mitoyenne est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité du certificat délivré par le maire de la Bastide d'Engras.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la requête d'appel de Mme C..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... épouse C....
Copie en sera adressée à la commune de la Bastide d'Engras.
Fait à Marseille, le 11 janvier 2021.
N° 20MA012395