Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal des pensions militaires de Montpellier d'annuler la décision du 5 octobre 2009 par laquelle le ministre de la défense a refusé de faire droit à sa demande de pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " séquelles de sclérose en plaques ".
Par un jugement du 10 janvier 2017, confirmé par un arrêt de la Cour régionale des pensions du 7 mars 2018, et un deuxième jugement n° 11/00084 du 12 septembre 2017, le tribunal des pensions militaires de Montpellier a respectivement d'une part, annulé la décision du 5 octobre 2009 du ministre de la défense rejetant la demande de pension de M. C..., a dit que M. C... avait droit à une pension et désigné un expert pour en fixer le taux et d'autre part, a dit que M. C... avait droit à une pension à compter de mars 2018 pour un taux d'invalidité de 70% pour l'infirmité de " séquelles de sclérose en plaques ", et condamné l'Etat aux dépens.
Procédure devant la Cour :
La cour régionale des pensions militaires de Montpellier a transmis à la cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 relatif au contentieux des pensions militaires d'invalidité, le recours présenté par la ministre des armées, enregistrée à son greffe le 9 novembre 2017.
Par ce recours, et un mémoire enregistré le 12 mars 2021, la ministre des armées demande à la Cour d'annuler le jugement du tribunal des pensions de Montpellier du 12 septembre 2017 en tant qu'il attribue une pension militaire d'invalidité au taux de 70%, afin que lui soit substitué un taux d'invalidité de 40%.
Elle soutient que :
- son recours est recevable ;
- l'invalidité s'apprécie à la date de demande d'attribution de la pension, soit au 17 mars 2008 ; c'est à tort que le tribunal a retenu le taux de 70 % fixé par une expertise médicale du 8 mars 2017 alors que l'expertise médicale du 20 octobre 2008 fixe un taux d'invalidité de 40 % ; le tribunal a porté une appréciation manifestement erronée sur les éléments médicaux du dossier de M. C....
Par un mémoire enregistré le 17 février 2021, M. C..., représenté par la SCP Reche-Guille-Meghabbar, conclut au rejet du recours et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros de frais de justice.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable parce que tardive ;
- pour le surplus, les moyens de la ministre sont infondés.
Par ordonnance du 12 mars 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 mars 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né le 9 janvier 1984, s'est engagé le 22 décembre 2003 et a été réformé au 1er décembre 2008. Il a sollicité une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité de " séquelles de sclérose en plaques " qui lui a été refusée par une décision du ministre de la défense du 5 octobre 2009. Par un jugement avant dire droit du 26 mai 2011, le tribunal des pensions militaires de Carcassonne a ordonné une expertise médicale. Par un jugement du 8 décembre 2015, le tribunal des pensions militaire de Montpellier a déchargé le premier collège de sa mission vu son inertie et désigné un nouveau collège d'experts. Par un arrêt du 7 mars 2018 définitif, rendu sur requête du ministre de la défense contre le jugement du tribunal des pensions militaires de l'Hérault du 10 janvier 2017, la cour régionale des pensions de Montpellier a jugé que M. C... rapporte la preuve de présomptions graves, précises et concordantes permettant de retenir un lien causal entre la vaccination contre la fièvre jaune qu'il a subie en service le 3 mars 2005 et l'apparition de la sclérose en plaques dont il est atteint, constitutive d'une infirmité de séquelles de sclérose en plaques. Par un jugement du 12 septembre 2017, le tribunal des pensions militaires de Montpellier a fixé à 70% le taux de la pension militaire d'invalidité pour " séquelles de sclérose en plaques " de M. C.... La ministre des armées relève appel de ce jugement du 12 septembre 2017 en tant qu'il fixe un taux d'invalidité de l'infirmité à 70%, et non à 40%.
Sur la recevabilité du recours :
2. Le jugement du 12 septembre 2017 du tribunal des pensions militaires de Montpellier a été notifié à l'administration le 21 septembre 2017. Par suite, le recours de la ministre des armées enregistré au greffe de la cour régionale des pensions militaires de Montpellier le 9 novembre 2017, et non le 18 juillet 2019 comme le soutient M. C..., n'est pas tardif. Il est, dès lors, recevable.
Sur le taux de la pension :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : / 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; / 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". D'autre part, en vertu de l'article L. 4 de ce code : " Les pensions sont établies d'après le degré d'invalidité. /(...) ". D'autre part, en vertu de l'article L. 6 du même code, les juridictions de pensions doivent rechercher quel était le degré d'invalidité à la date de la demande et ne peuvent tenir compte d'aggravations survenues après cette date. Il résulte de ces dispositions qu'une demande de droit à pension ou d'aggravation d'une infirmité indemnisée, est examinée au regard des droits que l'intéressé tient à la date de sa demande d'indemnisation.
4. Par ailleurs, il résulte du guide barème annexé au code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre que " la sclérose en plaques est une maladie infectieuse du névraxe, se montrant surtout entré 10 et 40 ans, se traduisant cliniquement par une évolution lentement progressive, des poussées avec rémission, des symptômes tels que vertiges, nyslagmus, trouble de la parole, tremblement intentionnel, état spasmodique généralisé, troubles de la station de la marche, etc. Elle peut être évaluée suivant l'intensité des troubles fonctionnels de la façon suivante : (...) 2° Formes progressives avec gêne plus ou moins accentuée des mouvements de la station ou de la marche : 40 à 60 (%) ".
5. Il résulte de l'instruction d'une part, qu'un examen réalisé le 20 octobre 2008 par le docteur Martini, neurologue auprès du centre de réforme de Montpellier, conclut à un taux de l'infirmité de " séquelles de sclérose en plaques " de 40%. Ce médecin évoque " une station debout instable avec ébauche d'ataxie, une dyskinésie volitionnelle à la manoeuvre du doigt sur le nez à gauche, ainsi qu'à la manoeuvre du talon sur le genou gauche, une diplopie latérale gauche associée à un nystagmus intermittent bilatéral, ainsi qu'une parésie de l'addcution de chaque oeil, ce qui correspond à une ophtalmoplégie internucléaire, une baisse de l'acuité visuelle de l'oeil gauche évaluée à 8/10ème avec une pâleur du secteur temporal de la papille au fond de l'oeil, pas de déficit moteur véritable mais plutôt une mauvaise coordination du membre inférieur gauche. Les réflexes ostéo-tendineux sont vifs aux quatre membres, les cutanées plantaires ont en flexion, pas de troubles sphinctériens ". Ce praticien évalue l'invalidité au 20 octobre 2008 à 3,5 sur 10 de l'échelle EDSS. Il conclut à l'existence de séquelles de sclérose en plaques à forme rémittente associées à un cryptococcome intracérébral d'étiologie inconnue, entièrement guéri par un traitement médical. D'autre part, dans un rapport du 8 mars 2017, le collège d'expert désigné par le tribunal pour examiner M. C... évalue l'invalidité à 6,5 sur 10 de l'échelle EDSS et retient un taux d'invalidité de 70% par référence au guide barème. Dans ces conditions, eu égard aux termes de l'expertise médicale du 20 octobre 2008 ainsi que des conclusions de l'expertise précitée du 8 mars 2017, dès lors que la gêne fonctionnelle liée à la sclérose en plaques évolutive que présente M. C... est très invalidante, ce qui n'est pas contesté par l'administration, l'invalidité de l'infirmité que présente l'intéressé à la date de sa demande de pension, doit être évaluée, eu égard au guide barème précité, à un taux de 50%, sans préjudice pour l'intéressé d'en demander la réévaluation. Il s'ensuit que la ministre des armées n'est fondée à soutenir qu'en statuant ainsi, le tribunal a méconnu les dispositions de l'article L. 2 du code susvisé, et à demander l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il fixe un taux d'invalidité de 70% au titre de l'infirmité de " séquelles de sclérose en plaques " et non de 50%.
6. Eu égard à ce qui vient d'être dit, le taux d'invalidité de la pension militaire d'invalidité attribuée à M. C... au titre de l'infirmité de " séquelles de sclérose en plaques " doit être fixé à 50%.
Sur les frais de justice :
7. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à la demande de M. C... au titre des frais exposés par lui à l'occasion du litige et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : M. C... a droit, à compter de mars 2008, à une pension militaire d'invalidité au titre de l'infirmité " séquelles de sclérose en plaques ", au taux de 50%.
Article 2 : Le jugement du tribunal des pensions militaires de Montpellier du 12 septembre 2017 est réformé en tant qu'il est contraire à l'article 1er.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. C... devant le tribunal des pensions militaires de Montpellier, et ses conclusions devant la Cour, ainsi que le surplus des conclusions de la ministre des armées présentées devant la Cour, sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2021, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2021.
N° 19MA05247 2