Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Nans-les-Pins, Mme E... G..., Mme I... C..., Mme N... J..., Mme B... O... et Mme L... F... ont demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 29 août 2018 par laquelle le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a arrêté la nouvelle organisation des transports publics routiers non urbains de personnes, et a notamment modifié les arrêts de la ligne n° 4001 sur le territoire de la commune de Nans-les-Pins et, d'autre part, d'enjoindre à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur de rétablir l'organisation initiale de cette ligne.
Par un jugement n° 1808495 du 11 janvier 2021, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 29 août 2018 en tant qu'elle a fixé l'arrêt de bus desservant la commune de Nans-les-Pins au lieu-dit " Quatre chemins " et a enjoint à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur de réexaminer les modifications apportées à la desserte de la ligne n° 4001 sur le territoire de cette commune dans un délai d'un mois à compter de la notification de son jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 février 2021, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Marseille par la commune de Nans-les-Pins, Mme E... G..., Mme I... C..., Mme N... J..., Mme B... O... et Mme L... F... ;
3°) de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de la commune de Nans-les-Pins, de Mme E... G..., de Mme I... C..., de Mme N... J..., de Mme B... O... et de Mme L... F... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier car il n'est pas signé ;
- le jugement est entaché de contradiction de motifs quant à l'accessibilité de l'arrêt ;
- le tribunal s'est fondé à tort sur les dispositions du code des transports relatives au transport à la demande, qui n'étaient pas applicables à l'espèce ;
- le moyen tiré du principe d'égalité est infondé dès lors, d'une part, qu'elle est libre d'organiser le service public en fonction des impératifs du service du transport non urbain, ce qui exclut la desserte de proximité et, d'autre part, que l'ensemble des usagers peut accéder à l'arrêt, les conditions différentes d'accès depuis les diverses parties du territoire communal n'étant pas le produit de sa décision ;
- aucun autre moyen soulevé en première instance n'est susceptible de fonder l'annulation de la décision.
Par des mémoires enregistrés le 8 mars 2021 et le 18 mai 2021, la commune de Nans-les-Pins, Mme E... G..., Mme I... C..., Mme N... J..., Mme B... O... et Mme L... F..., représentées par Me H... D... et Me P... D..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que les moyens invoqués par la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sont infondés.
Un mémoire présenté par la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et enregistré le 7 avril 2021 n'a pas été communiqué.
Par ordonnance du 9 mars 2021, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 12 avril 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des transports ;
- la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 ;
- la loi n° 2015-988 du 5 août 2015 ;
- l'ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. Thielé, rapporteur public,
- et les observations de Me M..., représentant la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 29 août 2018, le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a modifié l'organisation de la desserte des transports routiers non urbains, et notamment celles de la ligne régionale n° 4001 assurant le trajet Brignoles-Marseille, en supprimant certains horaires de desserte de la commune et cinq arrêts de cette ligne sur le territoire de la commune de Nans-les-Pins, seul l'arrêt dénommé " Quatre chemins " étant maintenu. Saisi par cette commune et certaines de ses résidentes, le tribunal administratif de Marseille a, par le jugement attaqué, annulé cette décision et enjoint au président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur de restaurer l'organisation antérieure du service.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article L. 3111-1 du code des transports : " Sans préjudice des articles L. 3111-17 et L. 3421-2, les services non urbains, réguliers ou à la demande, sont organisés par la région, à l'exclusion des services de transport spécial des élèves handicapés vers les établissements scolaires. Ils sont assurés, dans les conditions prévues aux articles L. 1221-1 à L. 1221-11, par la région ou par les entreprises publiques ou privées qui ont passé avec elle une convention à durée déterminée ".
3. La commune de Nans-les-Pins et Mmes G..., C..., J..., O... et F... font valoir que la localisation excentrée de l'arrêt " Quatre chemins ", unique arrêt de la ligne 4001 sur le territoire de la commune, rend son accès difficile aux personnes dépourvues de véhicule et méconnaît ainsi le principe d'égalité des usagers du service public. Toutefois, chacun des usagers d'un service public de transport non urbain se trouve, par rapport au tracé du réseau et à la localisation de ses arrêts, dans une situation différente de celle de chacun des autres voyageurs réels ou potentiels. Il s'ensuit que l'inégalité qui affecte la situation des différents usagers de l'arrêt " Quatre chemins " de la ligne n° 4001 est nécessairement le produit de la configuration même d'un tel service public et que la décision attaquée n'a eu ni pour objet, ni pour effet de créer par elle-même une différence de traitement entre des catégories d'usagers objectivement déterminables.
4. Il résulte de tout ce qui précède que la région Provence-Alpes-Côte d'Azur est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 29 août 2018 au motif que cette décision méconnaîtrait le principe d'égalité des usagers du service public.
5. Toutefois, lorsque le juge d'appel, saisi par le défendeur de première instance, censure le motif retenu par les premiers juges, il lui appartient, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par l'intimé en première instance, alors même qu'ils ne seraient pas repris dans les écritures produites, le cas échéant, devant lui, à la seule exception de ceux qui auraient été expressément abandonnés en appel.
6. En premier lieu, la décision du 29 août 2018 du président du conseil régional arrêtant l'organisation du réseau de transport public non urbain sur le territoire de la région présente un caractère réglementaire et n'avait donc pas à être motivée. Le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit donc être écarté comme inopérant.
7. En deuxième lieu, en vertu des dispositions de l'article L. 3111-4 du code des transports : " Les dessertes locales des services réguliers non urbains organisés par une autorité organisatrice de transport autre que l'autorité organisatrice de la mobilité territorialement compétente sont créées ou modifiées après information de cette dernière ".
8. Ces dispositions, seules invoquées par les requérantes de première instance, n'imposent aucune concertation avant la modification d'une desserte de service régulier non urbain et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur fait au demeurant valoir, sans être contredite, qu'elle a organisé des réunions d'information avec les communes affectées par ces modifications du tracé de la ligne. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit dès lors, et en tout état de cause, être écarté.
9. En troisième lieu, si les usagers du service public disposent d'un droit au fonctionnement normal de ce service et à son adaptation aux conditions économiques et sociales dans lesquelles il est fourni, ils n'ont aucun droit au maintien du service dans les mêmes conditions de fonctionnement. La commune de Nans-les-Pins et les résidentes ayant saisi le tribunal administratif de Marseille ne sont donc pas fondées à soutenir que la décision du 29 août 2018 violerait le principe d'adaptation du service public. Pour le même motif, elles ne sont pas fondées à soutenir que le principe de continuité du service public aurait été méconnu, celui-ci impliquant seulement que le service défini par l'autorité chargé de son organisation soit assuré avec une régularité conforme à son règlement, et non qu'un service existant ne puisse être modifié.
10. En quatrième lieu, les requérantes de première instance ne peuvent utilement à se prévaloir, à l'encontre de la décision attaquée, qui fixe les modalités de desserte normale du service public de transport non urbain, des dispositions de l'article L. 1222-3 du code des transports, qui ne régissent que les conditions d'accomplissement du service en cas de perturbation de trafic.
11. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 1111-1 du code des transports : " L'organisation des mobilités sur l'ensemble du territoire doit satisfaire les besoins des usagers et rendre effectifs le droit qu'a toute personne, y compris celle dont la mobilité est réduite ou souffrant d'un handicap, de se déplacer et la liberté d'en choisir les moyens, y compris ceux faisant appel à la mobilité active, ainsi que la faculté qui lui est reconnue d'exécuter elle-même le transport de ses biens ou de le confier à l'organisme ou à l'entreprise de son choix. La mise en oeuvre de cet objectif s'effectue dans les conditions économiques, sociales et environnementales les plus avantageuses pour la collectivité et dans le respect des objectifs de lutte contre la sédentarité et de limitation ou de réduction des risques, accidents, nuisances, notamment sonores, émissions de polluants et de gaz à effet de serre ". Par ailleurs, aux termes du I de l'article 45 de la loi du 11 février 2005 : " La chaîne du déplacement, qui comprend le cadre bâti, la voirie, les aménagements des espaces publics, les systèmes de transport et leur intermodalité, est organisée pour permettre son accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite. / En cas d'impossibilité technique avérée de mise en accessibilité de réseaux existants, des moyens de transport adaptés aux besoins des personnes handicapées ou à mobilité réduite doivent être mis à leur disposition. Ils sont organisés et financés par l'autorité organisatrice de transport normalement compétente dans un délai de trois ans. (...) / Un plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics est établi dans chaque commune de 1 000 habitants et plus à l'initiative du maire ou, le cas échéant, du président de l'établissement public de coopération intercommunale. Ce plan fixe notamment les dispositions susceptibles de rendre accessible aux personnes handicapées et à mobilité réduite l'ensemble des circulations piétonnes et des aires de stationnement d'automobiles situées sur le territoire de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale. Ce plan de mise en accessibilité fait partie intégrante du plan de déplacements urbains quand il existe ". Toutefois, aux termes des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 1112-1 du code des transports : " L'accessibilité du service de transport est assurée par l'aménagement des points d'arrêt prioritaires compte tenu de leur fréquentation, des modalités de leur exploitation, de l'organisation des réseaux de transport et des nécessités de desserte suffisante du territoire. Ces critères sont précisés par décret ". En outre, en vertu des dispositions de l'article L. 1112-2 du même code, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-1090 du 26 septembre 2014, ratifiée par la loi n° 2015-988 du 5 août 2015 : " I. - Pour les services de transport ne relevant pas des services de transport librement organisés prévus aux articles L. 3111-17 et suivants, un schéma directeur d'accessibilité des services fixe la programmation de la mise en accessibilité des services de transport et les modalités de l'accessibilité des différents types de transport. (...) ". En vertu des dispositions de l'article L. 1112-2-2 de ce code, résultant également de l'ordonnance du 26 septembre 2014 : " La durée de réalisation du schéma directeur d'accessibilité-agenda d'accessibilité programmée ne peut excéder, à compter de son approbation : / 1° Une période de trois ans maximum pour les services réguliers et à la demande de transport public urbain mentionnés à l'article L. 1231-1 ; / 2° Deux périodes de trois ans maximum pour les services réguliers et à la demande de transport routier public non urbain mentionnés aux articles L. 3111-1 à L. 3111-6 et pour les services réguliers et à la demande de transport public dans la région Ile-de-France mentionnés à l'article L. 1241-1 (...) ".
12. D'une part, si la commune de Nans-les-Pins et Mmes G..., C..., J..., O... et F... soutiennent que l'arrêt dit " les Quatre chemins " de la ligne n° 4001 n'est pas accessible aux personnes handicapées, elles ne soutiennent ni n'établissent que celui-ci constituerait un arrêt prioritaire pour les travaux d'accessibilité au sens des dispositions de l'article L. 1112-1 du code des transports, travaux dont l'échéance fixée par les dispositions de l'article L. 1112-2-2 du même code n'était d'ailleurs pas expirée à la date de la décision attaquée. D'autre part, si les requérantes de première instance affirment par ailleurs que la réduction du nombre de dessertes horaires de la commune et la localisation de l'unique arrêt de la ligne n° 4001 desservant Nans-les-Pins au lieu-dit " les Quatre chemins " ont entraîné une dégradation du service, qui serait selon elles devenu difficilement voire totalement inaccessible, il incombe à la région d'organiser le service de transport public non urbain dans des conditions de nature à satisfaire les principes posés par les dispositions de l'article L. 1111-1 du code des transports à l'échelle de l'ensemble de son territoire. Il appartient par conséquent à cette collectivité de définir la desserte des différentes communes situées sur une ligne non urbaine de façon à satisfaire au mieux les intérêts des usagers réels ou potentiels résidant sur l'ensemble du tracé de cette ligne, comme de ceux situés à l'extérieur de sa zone de desserte immédiate et susceptibles d'user de cette ligne, notamment par le biais de correspondances, tandis que les autres autorités organisatrices de transport locales sont chargées d'organiser le maillage des transports à l'échelle infrarégionale et notamment communale et intercommunale. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la région a entendu réduire le nombre d'arrêts de la ligne n° 4001, qui relie Brignoles à Marseille, et privilégier un trajet plus direct évitant le centre des communes desservies, ce dont a résulté une réduction du temps de trajet pouvant atteindre vingt à vingt-cinq minutes sur l'ensemble de la ligne. Si cette nouvelle organisation du service s'est traduite de manière regrettable par une réduction de la desserte de la commune de Nans-les-Pins à un arrêt situé à l'extérieur de la zone urbanisée de la commune et difficilement accessible autrement que par le biais d'un autre moyen de transport, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à la nature et à l'objet du service de transport confié à la région par les dispositions de l'article L. 3111-1 du code des transports, à l'objectif de fluidification et de renforcement de l'attractivité de la ligne n° 4001 qu'elle poursuivait et aux correspondances, certes limitées mais réelles, assurées par le réseau de transport de la communauté d'agglomération de la Provence verte, la décision du 29 août 2018 n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
13. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ni sur la recevabilité de la demande présentée au tribunal administratif de Marseille par la commune de Nans-les-Pins, Mme E... G..., Mme I... C..., Mme N... J..., Mme B... O... et Mme L... F..., que la région Provence-Alpes-Côte d'Azur est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 29 août 2018 en ce qu'elle a fixé l'arrêt de bus desservant la commune de Nans-les-Pins à l'arrêt " Quatre chemins " et enjoint à son président de réexaminer l'organisation du service. Ce jugement doit donc être annulé.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par les défenderesses sur leur fondement soit mise à la charge de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de la commune de Nans-les-Pins, de Mme E... G..., de Mme I... C..., de Mme N... J..., de Mme B... O... et de Mme L... F..., à verser à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1808495 du tribunal administratif de Marseille du 11 janvier 2021 est annulé.
Article 2 : La commune de Nans-les-Pins, Mme E... G..., Mme I... C..., Mme N... J..., Mme B... O... et Mme L... F... verseront une somme de 1 000 euros à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, à la commune de Nans-les-Pins, à Mme E... G..., à Mme I... C..., à Mme N... J..., à Mme B... O... et à Mme L... F...
Délibéré après l'audience du 31 mai 2021, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- Mme Christine Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. K... Grimaud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 juin 2021.
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N° 21MA00448