Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 juillet 1996, présentée pour la commune de Gruchet-le-Valasse (Seine-Maritime), représentée par son maire en exercice, par la S.C.P. HERCE, avocat ;
La commune de Gruchet-le-Valasse demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 93-167 en date du 23 mai 1996 du Tribunal administratif de Rouen en tant que, par ses articles 2 et 3, ce jugement déclare nulle et de nul effet la convention signée le 16 mai 1990 entre la commune et M. et Mme X..., en ce qu'elle impose à ces derniers des participations au financement de travaux publics routiers, et annule le titre de recettes émis et rendu exécutoire le 15 octobre 1990 à l'encontre de M. et Mme X... pour avoir paiement au profit de la commune de la somme de 95 772 F ;
2 ) de rejeter en totalité la demande présentée par M. et Mme X... devant le Tribunal administratif ;
3 ) de condamner M. et Mme X... à payer à la commune de Gruchet-le-Valasse la somme de 95 772 F, avec intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 1990 ;
4 ) de les condamner à payer à la commune la somme de 10 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 1998 :
- le rapport de M. MARGUERON, premier conseiller,
- les observations de Me HERCE, avocat de la commune de Gruchet-le-Valasse,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.332-6 du code de l'urbanisme : "Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : 1 Le versement ... de la participation instituée dans les secteurs d'aménagement définis à l'article L.332-9 ..." ; qu'aux termes de l'article L.332-9 de ce code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Dans les secteurs du territoire de la commune où un programme d'aménagement d'ensemble a été approuvé par le conseil municipal, celui-ci peut mettre à la charge des bénéficiaires d'autorisations de construire tout ou partie des dépenses de réalisation des équipements publics correspondant aux besoins des habitants actuels ou futurs du secteur concerné et rendus nécessaires par la mise en oeuvre du programme d'aménagement ..." ; qu'enfin, aux termes de son article L.332-10 : "La participation prévue à l'article précédent est exigée sous forme de contribution financière ... La mise en recouvrement de la participation sous forme de contribution financière se fait dans les délais fixés par l'autorité qui délivre l'autorisation de construire ..." ;
Considérant que par délibération du 30 mars 1990, le conseil municipal de la commune de Gruchet-le-Valasse a approuvé un programme d'aménagement d'ensemble, dans un secteur du territoire communal incluant un terrain que la commune avait décidé de vendre à M. et Mme X... et sur lequel ceux-ci avaient déposé le 13 décembre 1989 une demande de permis de construire, complétée le 10 janvier 1990 ; que la commune et M. et Mme X... ont signé, le 16 mai 1990, une convention confirmant la vente du terrain, sous réserve de la participation financière des intéressés à des travaux de création et d'aménagement de voies ; que par un titre de recettes émis et rendu exécutoire le 15 octobre 1990, il a été réclamé à M. et Mme X... le paiement au profit de la commune de la somme de 95 772 F au titre de cette participation ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées des articles L.332-6, L.332-9 et L.332-10 du code de l'urbanisme, la participation financière pour la réalisation d'équipements publics que prévoient ces dispositions ne peut être exigée que pour autant qu'une autorisation d'urbanisme est délivrée et qu'elle est prescrite par l'autorité qui délivre cette autorisation ; que l'exigibilité d'une telle participation ne saurait résulter des stipulations, quelles qu'en soit la teneur, d'un contrat conclu entre la personne publique susceptible de bénéficier de la participation et la personne à laquelle le paiement de celle-ci est réclamé ; que la convention signée le 16 mai 1990 devait, dès lors, être déclarée nulle et de nul effet en tant qu'elle mettait à la charge de M. et Mme X... une participation financière à la réalisation de travaux routiers ;
Considérant que si la commune de Gruchet-le-Valasse soutient que M. et Mme X... bénéficiaient d'une autorisation de construire depuis le 10 janvier 1990, il ressort des pièces du dossier que le maire ne leur a délivré à cette date qu'une autorisation de commencer les travaux prévus, conformément à la demande de permis de construire qu'ils venaient de déposer ; qu'une telle autorisation, qui était insusceptible de se rattacher à une disposition législative existante, et qui, au surplus, ne contenait aucune prescription relative à une contribution à des dépenses d'équipements publics, ne pouvait constituer une autorisation d'urbanisme au sens des dispositions précitées et, ainsi, n'était pas susceptible de donner un fondement légal au titre de recettes contesté ;
Considérant, enfin, que la commune ne peut utilement invoquer la circonstance, postérieure à la convention et au titre de recette en cause, que la participation financière litigieuse a été de nouveau mise à la charge de M. et Mme X... par le permis de construire délivré aux intéressés le 3 février 1993 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Gruchet-le-Valasse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a déclaré nulle et de nul effet la convention signée le 16 mai 1990 et annulé le titre de recette émis le 15 octobre 1990 ; que ses conclusions tendant à la condamnation de M. et Mme X... à lui verser la somme de 95 772 F, fondées sur ces mêmes convention et titre de recettes, doivent être rejetées par voie de conséquence ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que la commune de Gruchet-le-Valasse est partie perdante dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que M. et Mme X... soient condamnés à lui verser une somme au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel doit, en conséquence, être rejetée ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de condamner la commune de Gruchet-le-Valasse à payer à M. et Mme X... la somme de 6 000 F ;
Article 1er : La requête de la commune de Gruchet-le-Valasse est rejetée.
Article 2 : La commune de Gruchet-le-Valasse versera à M. et Mme X... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. et Mme X... tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Gruchet-le-Valasse, à M. et Mme X... et au ministre de l'intérieur.