I) Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 octobre 1996, présentée pour M. et Mme Y... demeurant 2, hameau du Bois d'Olivet à Saint-Martin-de-Nigelles 28130, par Me X..., avocat ;
M. et Mme Y... demandent à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95449 et 952183 en date du 6 août 1996 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a annulé, à la demande de M. et Mme Z..., les arrêtés des 5 août 1994 et 8 août 1995 par lesquels le maire de Saint-Martin-de-Nigelles leur a accordé un permis de construire un garage et un préau ;
2 ) de rejeter la demande présentée par M. et Mme Z... devant le Tribunal administratif d'Orléans ;
II) Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 octobre 1996, présentée par la commune de Saint-Martin-de-Nigelles (Eure) représentée par son maire en exercice, par Me A..., avocat ;
La commune de Saint-Martin-de-Nigelles demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95449 et 952183 en date du 6 août 1996 du Tribunal administratif d'Orléans en ce qu'il a annulé, à la demande de M. et Mme Z..., l'arrêté en date du 8 août 1995 par lequel le maire de Saint-Martin-de-Nigelles a accordé un permis de construire un garage et un préau à M. et Mme Y... ;
2 ) de rejeter la demande présentée par M. et Mme Z... devant le Tribunal administratif de Rouen ;
3 ) de condamner M. et Mme Z... à lui payer 10 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 1998 :
- le rapport de Mme THOLLIEZ, premier conseiller,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de M. et Mme Y... et de la commune de Saint-Martin-de-Nigelles présentent à juger la même question ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article L.421-1 du code de l'urbanisme, le permis de construire est exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume ou de créer des niveaux supplé-mentaires ; que ces dispositions réservent cependant l'application des articles L.422-1 à L.422-5 du même code relatifs aux cas d'exemption du permis ; que selon le deuxième alinéa de l'article L.422-1 sont exemptés du permis de construire "les constructions ou travaux dont la faible importance ne justifie pas l'exigence d'un permis de construire" ; que le troisième alinéa du même article laisse à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser la nature et l'importance des constructions, travaux et installations concernés ; que l'article L.422-2 assujettit en principe les travaux exemptés à un régime de déclaration auprès du maire ; que l'article R.422-2 du code de l'urbanisme qui, sur le fondement des dispositions législatives précitées, fixe les cas d'exemption du permis de construire englobe parmi ces dernières, les constructions ou travaux non prévus aux a) à I) dudit article, s'ils n'ont pas, notamment, pour effet de changer la destination d'une construction et qu'enfin l'article R.422-3 du code de l'urbanisme, qui précise le contenu de la déclaration exigée en cas d'exemption du permis, fait obligation au déclarant d'indiquer "la nature et la destination des travaux ..." ;
Considérant que par arrêté du 5 août 1995, le maire de Saint-Martin-de-Nigelles a accordé à M. et Mme Y... un permis de construire à l'effet d'édifier un garage et un préau et d'aménager une chambre dans les combles ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a annulé ledit permis au motif que le permis litigieux ne portait pas, également, sur les travaux réalisés antérieurement sans permis et qui avaient consisté à transformer le garage compris dans le bâtiment principal en pièce d'habitation ; que si les époux Y... se prévalent sur ce point, en appel, de la décision tacite de non opposition à leur déclaration de travaux déposée le 24 janvier 1995, relative au remplacement d'une porte coulissante par une fenêtre, et s'il ressort en effet des pièces du dossier que la déclaration de travaux invoquée avait en réalité pour objet la transformation du garage existant en pièce d'habitation, les travaux ainsi réalisés n'étaient pas, eu égard au changement de destination du local, au nombre de ceux qui sont dispensés du permis de construire ; que, dès lors, la décision tacite par laquelle le maire de Saint-Martin-de-Nigelles ne s'est pas opposé à cette déclaration de travaux est entachée d'illégalité ; que les époux Z... sont recevables à exciper de l'illégalité de ladite décision dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et qu'il n'est pas allégué, qu'elle ait fait l'objet des mesures de publicité prévues par l'article R.422-10 du code de l'urbanisme et, par suite, qu'elle serait devenue définitive ; qu'il suit de là que le maire de Saint-Martin-de-Nigelles ne pouvait légalement accorder à M. et Mme Y... un permis de construire portant uniquement sur un élément de construction qui ne pouvait être dissocié des travaux antérieurs réalisés sans permis ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme Y... et la commune de Saint-Martin-de-Nigelles ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a annulé le permis litigieux ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que M. et Mme Y... et la commune de Saint-Martin-de-Nigelles sont les parties perdantes dans la présente instance ; que leur demande tendant à ce que M. et Mme Z... soient condamnés à leur verser une somme au titre des frais qu'ils ont exposés doit, en conséquence, être rejetée ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées, de condamner la commune de Saint-Martin-de-Nigelles à payer à M. et Mme Z... la somme de 6 000 F ;
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme Y... et de la commune de Saint-Martin-de-Nigelles sont rejetées.
Article 2 : La commune de Saint-Martin-de-Nigelles versera à M. et Mme Z... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. et Mme Z... tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Y..., à la commune de Saint-Martin-de-Nigelles, à M. et Mme Z... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.