Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 21 avril 2000, présentée pour la commune de Plouigneau (Finistère) représentée par son maire en exercice, par Me X..., avocat au barreau de Morlaix ;
La commune de Plouigneau demande à la Cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95-1174 du 17 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 11 mars 1995 par laquelle le maire de Plouigneau s'est opposé à la déclaration de travaux présentée par M. Y... pour le percement d'une porte en façade de la maison dont il est propriétaire ... ;
2 ) de condamner M. Y... à lui verser la somme de 5 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2001 :
- le rapport de M. BILLAUD, président,
- et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la commune de Plouigneau (Finistère) demande à la Cour d'annuler le jugement du 17 février 2000 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 11 mars 1995 du maire de la commune s'opposant à la déclaration de travaux présentée par M. Y... pour le percement d'une porte dans la façade de sa maison d'habitation sise ... ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par M. Y... :
Sur l'exception d'irrecevabilité tirée de la tardiveté de la requête présentée devant le Tribunal administratif de Rennes :
Considérant que la décision en date du 11 mars 1995 par laquelle le maire de Plouigneau s'est opposé à la déclaration de travaux de M. Y... a fait l'objet de la part de ce dernier d'une requête en annulation enregistrée au greffe du tribunal le 12 mai 1995 ; qu'ainsi, au regard de la date de la décision elle-même, le délai de recours contentieux contre cette décision n'était pas expiré lorsque la requête de M. Y... a été enregistrée au greffe du Tribunal ;
Sur la légalité de la décision d'opposition à déclaration de travaux :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-1, 2 alinéa, du code de l'urbanisme : "Sous réserve des articles L. 422-1 à L. 422-5, le permis de construire est exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume, ou de créer des niveaux supplémentaires" ; que l'article L. 422-1 dispose, en son 2 alinéa, que sont "exemptés du permis de construire ( ...) les constructions ou travaux dont la faible importance ne justifie pas l'exigence d'un permis de construire" et que l'article R. 422-2 du même code, pris pour l'application de l'article précité, exempte du permis de construire les constructions ou travaux "n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et ( ...) ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors-oeuvre brute inférieure ou égale à 20 m" ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que les constructions et travaux réalisés sur un terrain supportant un bâtiment existant et consistant à créer une ouverture en façade, même s'ils entraînent une modification de l'aspect extérieur dudit bâtiment, relèvent de la procédure de la déclaration de travaux régie par l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme et non de celle du permis de construire ; qu'ainsi, la commune de Plouigneau n'est pas fondée à soutenir que la demande de M. Y... exigeait le dépôt d'une demande de permis de construire ;
Considérant qu'en admettant que l'ouverture en façade projetée par M. Y... l'ait été en violation des articles 675 et suivants du code civil régissant les rapports entre propriétaires voisins, cette circonstance ne pouvait valablement servir de fondement à la décision d'opposition du maire de Plouigneau dont l'objet n'était pas de contrôler et d'éviter une éventuelle violation des dispositions relevant du droit privé mais, uniquement, d'assurer la conformité des travaux objet de la déclaration déposée avec la législation et la réglementation d'urbanisme ; qu'il suit de là qu'en faisant reposer son opposition à déclaration de travaux sur un tel motif, le maire de Plouigneau a entaché sa décision du 11 mars 1995 d'excès de pouvoir ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Plouigneau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a annulé la décision municipale du 11 mars 1995 s'opposant à la déclaration de travaux de M. Y... ;
Sur les conclusions de M. Y... tendant au remboursement de dépens :
Considérant que ces conclusions ne sont pas justifiées, ni même chiffrées ; qu'elles ne peuvent donc qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, font obstacle à ce que M. Y..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la commune de Plouigneau la somme de 5 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de condamner la commune de Plouigneau à payer à M. Y... une somme de 6 000 F au titre desdits frais ;
Article 1er : La requête de la commune de Plouigneau (Finistère) est rejetée.
Article 2 : La commune de Plouigneau versera à M. Jean-Yves Y... une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de M. Y... tendant au remboursement de dépens sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Plouigneau, à M. Y... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.