La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2013 | FRANCE | N°12NT02661

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 04 juillet 2013, 12NT02661


Vu la requête, enregistrée le 11 septembre 2012, présentée pour la commune de Barneville-Carteret, représentée par son maire, par Me Savereux, avocat au barreau de Saint-Malo ; la commune de Barneville-Carteret demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-2111 du 11 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à Mme D... et à M. E... la somme de 10 576 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2011, au titre des désordres qui affectent le mur de leur propriété trouvant partiellement leur origine dans les trav

aux réalisés en 2000 par la commune de Barneville-Carteret ;

2°) de met...

Vu la requête, enregistrée le 11 septembre 2012, présentée pour la commune de Barneville-Carteret, représentée par son maire, par Me Savereux, avocat au barreau de Saint-Malo ; la commune de Barneville-Carteret demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-2111 du 11 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à Mme D... et à M. E... la somme de 10 576 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 octobre 2011, au titre des désordres qui affectent le mur de leur propriété trouvant partiellement leur origine dans les travaux réalisés en 2000 par la commune de Barneville-Carteret ;

2°) de mettre à la charge de Mme D... et de M. E... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le jugement a méconnu les dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

- que les conclusions du rapport d'expertise sont empreintes de contradictions ; que les sinistres trouvent leur seule origine dans un défaut de conception du mur qui ne lui est pas imputable ;

- que n'étant pas à l'origine des désordres en cause, elle n'avait pas à supporter la charge des frais d'expertise ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2012, complété le 8 février 2013, présenté pour Mme D... et pour M. E..., par Me Cassaz, avocat au barreau de Caen, lesquels concluent au rejet de la requête, à ce que la somme que la commune a été condamnée à leur payer au titre de la reconstruction de leur mur soit indexée sur l'indice BT01 du coût de la construction jusqu'à l'achèvement des travaux, et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Barneville-Carteret au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que, la commune n'ayant produit aucune écriture en première instance, ses moyens critiquant la régularité de la procédure suivie devant les premiers juges sont irrecevables ; que sa critique de l'expertise, nouvelle en appel, n'est pas davantage recevable ;

- que les désordres affectant leur mur trouvent leur origine, selon les conclusions très claires du rapport d'expertise, d'une part, dans un défaut de conception du mur à hauteur de 80% et, d'autre part, dans une modification du cours d'eau par la commune à hauteur de 20 % ;

- que les sommes que la commune a été condamnée à leur verser doivent être actualisées dès lors que c'est la commune qui empêche la réalisation des travaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

1. Considérant que, suite à d'importantes précipitations au mois de décembre 1999, le mur de la propriété de Mme D... et de M. E... longeant le ruisseau " La Notte " sur la commune de Barneville-Carteret, s'est effondré ; que ce mur, reconstruit par l'entreprise Le Calvez en septembre 2000, a dû faire l'objet de reprises au cours de l'année 2002 à raison de diverses malfaçons ; que, malgré ces reprises, les désordres affectant le mur ont persisté ; que l'expert mandaté par l'assureur de la société Le Calvez a mis en cause les travaux réalisés par la commune de Barneville-Carteret, en amont de la rivière, comme étant à l'origine d'une augmentation de la vitesse d'écoulement des eaux contribuant à la dégradation des fondations de l'ouvrage ; que, par des ordonnances respectives des 31 octobre et 18 novembre 2007, le juge des référés du tribunal administratif de Caen et le président du tribunal de grande instance de Cherbourg ont désigné M. A..., expert, lequel, dans son rapport enregistré le 15 janvier 2010, a conclu à un partage des responsabilités entre l'entreprise Le Calvez et la commune de Barneville-Carteret à des hauteurs respectives de 80 % et 20 % ; que, par un jugement du 4 juillet 2011, le tribunal de grande instance de Cherbourg a condamné la SMABTP, assureur de la société Le Calvez, à indemniser Mme D... et M. E... à hauteur de 80 % des sommes demandées ; que la commune de Barneville-Carteret relève appel du jugement du 11 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à Mme D... et à M. E... la somme globale de 10 576 euros correspondant à sa part de responsabilité ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte du jugement attaqué que ce dernier comporte dans ses visas la mention des dispositions législatives ou réglementaires dont il est fait application ; que, dès lors, ce jugement n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sur la responsabilité de la commune de Barneville-Carteret :

4. Considérant qu'il résulte du rapport de l'expertise réalisée en première instance que les désordres qui affectent le mur de la propriété de Mme D... et de M. E... résultent, d'une part, d'un défaut d'exécution de l'assise du mur de soutènement, et, d'autre part, de la modification du régime d'écoulement du cours d'eau à la suite de travaux réalisés en 2000 par la commune de Barneville-Carteret en amont de la propriété ; que, sur la base du partage de responsabilité entre l'entreprise Le Calvez et la commune de Barneville-Carteret à des hauteurs respectives de 80 % et 20 %, le tribunal de grande instance de Cherbourg a, par un jugement du 4 juillet 2011, condamné la SMABTP, assureur de la société Le Calvez, à indemniser Mme D... et M. E... de 80 % des sommes demandées au titre de leur dommage ; que, selon les conclusions de l'expert, qui ne sont pas sérieusement contredites par la commune de Barneville-Carteret, les travaux communaux ont contribué à augmenter la vitesse d'écoulement des eaux, engendrant un creusement du lit de la rivière et un affaiblissement des assises du mur reposant sur ce lit ; que, par conséquent, la responsabilité sans faute de la commune a été à juste titre retenue par les premiers juges à hauteur des 20 % restants pour le dommage anormal et spécial causé à la propriété de Mme D... et de M. E... en lien direct et certain avec les travaux communaux vis-à-vis desquels ceux-ci avaient la qualité de tiers ;

Sur l'évaluation des préjudices :

5. Considérant que les travaux de démolition et de reconstruction de l'ouvrage ont été évalués par l'expert au montant total non contesté de 52 460 euros HT ; que, compte tenu de la part de responsabilité de la commune dans ces désordres retenue comme indiqué au point 4, c'est par une juste appréciation que les premiers juges ont condamné la commune à verser à ce titre à Mme D... et à M. E... la somme de 10 492 euros ;

6. Considérant, toutefois, que le montant du préjudice dont Mme D... et

M. E... sont fondés à demander réparation correspond aux frais qu'ils devront engager en conséquence des désordres affectant leur propriété, qui doivent être évalués à la date où leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il pourra être procédé aux travaux de remise en état ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'un courrier du 27 août 2012, que le maire de la commune s'est opposé à la reconstruction du mur ; que, bien que le préfet de la Manche ait déclaré, par un courrier du 28 janvier 2013, ne pas s'opposer à la reconstruction du mur de soutènement dans le lit du cours d'eau " La Notte " au titre des articles L. 214-1 à 6 du code de l'environnement, le refus de la commune faisait jusqu'à présent obstacle à ce que les travaux puissent être entrepris ; que, par suite, Mme D... et à M. E... sont fondés a demander que l'indemnité allouée de 10 492 euros soit indexée sur l'indice BT01 du coût de la construction jusqu'à la date du présent arrêt ; qu'il y a lieu de réformer, dans cette mesure, le jugement attaqué ;

7. Considérant, enfin, que le tribunal administratif a fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence du fait de la perte de jouissance des extérieurs de la maison en accordant à ce titre à Mme D... et à M. E... une indemnité de 84 euros ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Barneville-Carteret n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à Mme D... et à M. E... la somme totale de 10 576 euros ; qu'il résulte également de ce qui précède que Mme D... et M. E... sont fondés à demander, dans la mesure précisée au point 6, la réformation du jugement attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme D... et de M. E..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par la commune de Barneville-Carteret au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Barneville-Carteret la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme D... et M. E... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Barneville-Carteret est rejetée.

Article 2 : La somme de 10 492 HT que le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de Barneville-Carteret à verser à Mme D... et à M. E... au titre des travaux de reconstruction de leur mur sera indexée sur l'indice BT01 du coût de la construction jusqu'à la date du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement n° 12-2111 du 11 juillet 2012 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : La commune de Barneville-Carteret versera à Mme D... et à M. E... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Barneville-Carteret, à M. B... E...et à Mme C...D....

Délibéré après l'audience du 13 juin 2013, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juillet 2013.

Le rapporteur,

F. LEMOINELe président,

I. PERROT

Le greffier,

C. GUÉZO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 12NT02661


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02661
Date de la décision : 04/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : SAVEREUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-07-04;12nt02661 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award