La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2014 | FRANCE | N°12NT03291

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 février 2014, 12NT03291


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2012, présentée pour Mme B...C..., demeurant..., par Me Lasserre, avocat au barreau de Paris ;

Mme C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-2740 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 29 juillet 2005 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique le projet de réalisation de la zone d'aménagement concerté (ZAC) du Moulin des Landes II à Sainte-Luce-sur-Loire, d'autre part, de l'arr

êté du 5 mars 2009 par lequel il a déclaré cessible au profit de la Société d'E...

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2012, présentée pour Mme B...C..., demeurant..., par Me Lasserre, avocat au barreau de Paris ;

Mme C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-2740 du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 29 juillet 2005 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique le projet de réalisation de la zone d'aménagement concerté (ZAC) du Moulin des Landes II à Sainte-Luce-sur-Loire, d'autre part, de l'arrêté du 5 mars 2009 par lequel il a déclaré cessible au profit de la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique la parcelle cadastrée AS 12 appartenant à la requérante en vue de la réalisation de cette opération ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que l'arrêté de cessibilité critiqué tend à la réalisation d'un projet différent de celui prévu à l'origine par la déclaration d'utilité publique ;

- les arrêtés contestés ont été signés par des autorités incompétentes ;

- l'arrêté du 29 juillet 2005 est entaché d'erreur de fait s'agissant de sa parcelle, dans la mesure où celle-ci, alors même qu'elle ne bénéficiait plus d'un accès direct à l'ex RN 23, a été ultérieurement desservie par une voie parallèle et, par suite, est demeurée exploitable ; en outre, la maison implantée sur sa parcelle n'était pas en déshérence car les travaux imposés par l'arrêté municipal de mise en demeure pour péril imminent étaient réalisés ;

- la déclaration d'utilité publique de l'opération visait à offrir aux entreprises voisines de sa parcelle, notamment la société Oxycoupage, la possibilité d'une extension à vil prix ;

- la désignation du commissaire enquêteur pour l'enquête parcellaire a été irrégulière ; son avis est insuffisamment motivé ; il a omis de transmettre son rapport au préfet et au sous-préfet, lequel n'a donc pu émettre l'avis requis par les dispositions de l'article R.11-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- l'arrêté de cessibilité du 5 mars 2009, qui a permis à la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique de mettre en oeuvre un aménagement au profit exclusif de la société Oxycoupage est entaché de détournement de pouvoir ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2013, présenté pour la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique, dont le siège est 18 rue Scribe à Nantes (44000) représentée par son directeur général, par Me Caradeux, avocat au barreau de Nantes ;

la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme C...le versement de la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que :

- la requête d'appel qui se borne à reproduire la demande de première instance est irrecevable ;

- les signataires des actes contestés bénéficiaient d'une délégation régulière ;

- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi : la parcelle cadastrée AS 12, insalubre et en déshérence, a été incluse dès l'origine dans l'emprise des terrains expropriés ; mais la négociation alors en cours entre Mme C...et la société Oxycoupage a empêché l'édiction immédiate d'un arrêté de cessibilité ; le prix retenu correspond à celui fixé par le service des Domaines ;

- la déclaration d'utilité publique n'est pas entachée d'erreur de fait ; elle n'a pas pour objet de condamner les accès directs à l'ex RN 23, lesquels sont par ailleurs interdits pour des motifs de sécurité publique ;

- la désignation du commissaire enquêteur qui a conduit l'enquête sur l'arrêté de cessibilité a été régulière ; son avis est suffisamment motivé ; le moyen tiré de ce qu'il n'a pas transmis le dossier d'enquête parcellaire au préfet est en l'espèce erroné en droit ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 août 2013, présenté pour Mme C..., qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens qu'elle développe ; elle ajoute que sa parcelle, dont l'indemnité d'expropriation a été fixée en mai 2012 à 20 800 € par le juge, a été revendue par l'expropriant au prix de 51 476 € en décembre de la même année ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 septembre 2013, présenté pour la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique, devenue société Loire-Atlantique Développement, qui persiste dans ses conclusions ; elle ajoute que le moyen tiré du prix de revente d'une parcelle expropriée est inopérant devant le juge administratif ; qu'en tout état de cause, elle a dû démolir la maison présente sur le terrain et supporter des frais d'aménagement ;

Vu l'ordonnance du 20 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 9 janvier 2014 à 12 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui indique reprendre à son compte les observations émises par le préfet de la Loire-Atlantique en 1ère instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 janvier 2014, présenté pour MmeC..., qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens qu'elle développe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 2014 :

- le rapport de M. François, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

- les observations de Me Lasserre, avocat de MmeC... ;

- et les observations de MeA..., substituant Me Caradeux, avocat de la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique ;

1. Considérant que Mme C... relève appel du jugement du 18 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 29 juillet 2005 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a déclaré d'utilité publique le projet de réalisation de la zone d'aménagement concerté (ZAC) du Moulin des Landes II à Sainte-Luce-sur-Loire, d'autre part, de l'arrêté du 5 mars 2009 par lequel il a déclaré cessible au profit de la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique la parcelle cadastrée AS 12 appartenant à la requérante ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'en indiquant que les parcelles constituant la ZAC avaient été acquises amiablement par l'expropriant, à l'exception de celle appartenant à Mme C...qui faisait l'objet d'une négociation avec l'entreprise Oxycoupage au terme de laquelle aucun accord n'avait pu être trouvé et que l'enquête parcellaire conjointe n'avait pas donné lieu à un arrêté de cessibilité pour la parcelle en cause, le tribunal a répondu au moyen tiré de ce que l'arrêté de cessibilité du 5 mars 2009 contesté tendait à la réalisation d'un projet différent de celui prévu par la déclaration d'utilité publique ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché de l'irrégularité alléguée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 29 juillet 2005 déclarant l'utilité publique de l'opération :

3. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 29 juillet 2005 aurait été signé par une autorité incompétente, que Mme C... renouvelle en appel sans apporter aucune précision nouvelle, doit être écarté par adoption des mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la réalisation de la ZAC du Moulin des Landes II sur le territoire de la commune de Sainte-Luce-sur Loire s'inscrit dans un projet global de développement de sites d'activités diversifiées et de répartition des emplois dans l'agglomération nantaise ; que bordée par l'autoroute A 811, par l'ex route nationale 23 devenue route départementale (RD) 723, et par la rue du Moulin des Landes, cette opération vise à l'aménagement du site pour y accueillir des activités industrielles et tertiaires et prévoit notamment la création d'une voie interne desservant l'ensemble des parcelles de la zone d'activités avec, pour corollaire, la suppression des accès directs à la RD 723, au demeurant interdits par le plan local d'urbanisme, afin d'éviter le développement d'activités à caractère commercial le long de cette route très passante ; qu'ainsi, contrairement aux allégations de la requérante, la ZAC n'a pour objectif ni la suppression de parcelles en déshérence ni celle des accès à la RD 723 ; que, par suite, en estimant que l'aménagement du site, en substitution des terrains en friche, permettrait le développement des activités industrielles et tertiaires en bordure de grands axes d'entrée de la ville et une meilleure répartition des emplois, et alors que la requérante n'établit pas que la parcelle cadastrée AS 12 lui appartenant n'aurait pas été en déshérence, l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique n'est pas entaché d'une erreur de fait ; que Mme C...ne saurait utilement se prévaloir de la création dans le cadre de la ZAC de la rue des Garennes, dès lors que cette création est postérieure à la déclaration d'utilité publique contestée et, en tout état de cause, ainsi qu'il ressort des documents produits et du jugement rendu le 29 mars 2012 par le juge de l'expropriation, que cette voie ne permet pas la desserte de son terrain ;

5. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que les terrains constituant la ZAC du Moulin des Landes II ont été acquis à l'amiable par la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique (SELA) à l'exception de la parcelle appartenant à MmeC..., en raison de la négociation en cours entre cette dernière et la société Oxycoupage, qui n'a cependant pas abouti ; que, par suite l'enquête parcellaire menée en 2005 conjointement à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique n'ayant pu donner lieu à un arrêté de cessibilité pour la parcelle en cause, le préfet a ultérieurement prescrit par un arrêté du 30 octobre 2008 l'ouverture d'une nouvelle enquête parcellaire préalablement à l'édiction d'un nouvel arrêté de cessibilité, lequel ne peut être regardé comme tendant à la réalisation d'un projet différent de celui prévu à l'origine par la déclaration d'utilité publique ; qu'à la supposer établie, la circonstance que la société Oxycoupage aurait proposé à la requérante l'acquisition de cette parcelle au prix de 50 euros le m2 peu de temps après l'offre en 2008 de la SELA au prix de 19,33 euros le m2 ne suffit pas à établir l'existence d'un détournement de pouvoir, lequel n'est pas non plus établi par la circonstance que l'expropriant a revendu en décembre 2012 la parcelle AS 12 au prix de 51 476 euros, alors que l'indemnité fixée en mai 2012 par le juge de l'expropriation s'est élevée à 20 800 euros ; qu'eu égard à l'intérêt général de l'opération lié au développement d'un site d'activité à l'échelle de l'agglomération nantaise, la requérante ne saurait enfin soutenir que la déclaration d'utilité publique critiquée a pour but d'offrir aux entreprises voisines de sa parcelle la possibilité d'une extension à vil prix et aurait ainsi pour effet de satisfaire des intérêts particuliers ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de cessibilité du 5 mars 2009 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-20 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Le préfet désigne, par arrêté, dans les conditions fixées au premier alinéa de l'article R. 11-4 et parmi les personnes mentionnées à l'article R. 11-5, un commissaire enquêteur (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 11-25 du même code : " Le commissaire enquêteur (...) donne son avis sur l'emprise des ouvrages projetés (...) " ;que l'article R.11-26 de ce code dispose que : " Le commissaire enquêteur (...)transmet le dossier, selon le lieu de l'enquête, soit au préfet, soit au sous-préfet qui émet un avis et transmet le dossier au préfet." ;

7. Considérant, d'une part, que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 5 mars 2009 aurait été signé par une autorité incompétente, renouvelé en appel sans aucune précision nouvelle, doit être écarté par adoption des mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges ; que le commissaire enquêteur, dont la partialité n'est pas démontrée, a identifié la parcelle concernée, l'identité de son propriétaire et mentionné l'organisation d'une réunion avec les parties ainsi que les observations formulées par ces dernières ; que son avis est par suite suffisamment motivé, compte tenu de la nature d'une enquête parcellaire ; que l'enquête parcellaire s'étant déroulée dans l'arrondissement de Nantes, chef-lieu du département, l'avis du sous-préfet de l'arrondissement n'était pas requis ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'enquête parcellaire doit être écarté ;

8. Considérant qu'il ressort d'autre part des pièces du dossier que, comme il vient d'être dit, l'enquête parcellaire prescrite par l'arrêté du 16 février 2005 n'ayant pu donner lieu immédiatement à un arrêté de cessibilité pour la parcelle AS 12 en raison de la négociation en cours, une seconde enquête parcellaire a dû être prescrite par l'arrêté du 30 octobre 2008 pour l'acquisition des propriétés nécessaires à la réalisation de la ZAC après d'infructueuses tentatives d'acquisition à l'amiable par l'expropriant en 2008 ; qu'ainsi, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme C... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de Mme C... une somme de 2000 euros au titre des frais de même nature que la Société d'Equipement de la Loire-Atlantique, devenue société Loire-Atlantique Développement, a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Mme C... versera à la société Loire-Atlantique Développement une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C..., à la Société Loire-Atlantique Développement et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 février 2014, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Sudron, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 février 2014

Le rapporteur,

E. FRANÇOISLe président,

A. PÉREZ

Le greffier,

S BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 12NT03291


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03291
Date de la décision : 28/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : LASSERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-02-28;12nt03291 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award