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09/04/2015 | FRANCE | N°13NT03477

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 09 avril 2015, 13NT03477


Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2013, présentée pour Mme E... B..., demeurant "... et M. A... B..., demeurant "..., agissant en qualité d'ayants-droits de

M. C...B..., leur époux et père décédé, et de Mme D...B..., leur fille et soeur également décédée, par Me Bouchet-Bossard, avocat au barreau de Brest ; les consorts B...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1001688 du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'État à réparer les préjudices qu'ils estiment avoi

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Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2013, présentée pour Mme E... B..., demeurant "... et M. A... B..., demeurant "..., agissant en qualité d'ayants-droits de

M. C...B..., leur époux et père décédé, et de Mme D...B..., leur fille et soeur également décédée, par Me Bouchet-Bossard, avocat au barreau de Brest ; les consorts B...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1001688 du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'État à réparer les préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès survenu le 10 octobre 2004 de M. C...B..., leur mari et père, qu'ils imputent à son exposition à des rayonnements radioactifs sur des bâtiments nucléaires ;

2°) de condamner l'État, au besoin après avoir ordonné une expertise afin de déterminer les préjudices propres de M. C...B..., à verser à Mme E...B..., épouse de M. C...B..., la somme de 324 853,87 euros, à M. A... B...et aux ayants-droits de Mme D...B..., enfants de M. C...B..., la somme de 30 000 euros chacun ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

- la responsabilité de l'État en tant que maître d'ouvrage des bâtiments de la Marine sur lesquels M. C...B...a travaillé est engagée du fait de la négligence de la direction des constructions navales (DCN) à l'avoir exposé à des rayonnements nocifs ; les salariés des entreprises privées intervenant sous la direction de ce maître d'ouvrage n'ont ni été informés de l'exposition à laquelle ils ont été soumis, ni équipés de dosimètres ; la leucémie ayant causé le décès de M. C...B...est une maladie reconnue comme étant radio-induite ; la circonstance que celui-ci n'a pas été irradié n'est pas de nature à exonérer l'État de sa responsabilité puisque la simple exposition suffit à entrainer la leucémie ;

- l'État a commis une faute en matière de prévention des risques professionnels dès lors que la DCN n'a pas informé les salariés des entreprises sous-traitantes des risques auxquels ils ont été exposés ; en particulier, la directive EURATOM du 2 février 1959 exige la tenue d'un dossier médical pour les travailleurs exposés aux radiations ionisantes ; l'employeur de M. C...B...n'ayant pas respecté cette obligation, l'État a commis une faute en ne veillant pas au respect des règles applicables en la matière ;

- ils ont droit au remboursement des frais d'obsèques pour un montant de 2 207 euros, à la compensation de la perte des revenus du conjoint pour un montant de 264 853,87 euros, à l'indemnisation de leur préjudice d'accompagnement et d'affection pour 60 000 euros en ce qui concerne l'épouse et 30 000 euros chacun pour les enfants ; les préjudices propres de M. C...B...doivent être déterminés par une expertise ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le courrier, enregistré le 30 janvier 2015, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère qui déclare ne pas intervenir dans l'instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 mars 2015, présenté par le ministre de la défense et des anciens combattants, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que :

- la demande d'expertise n'est pas justifiée et ne peut suppléer la carence des consorts B...à établir que M. C...B...aurait été exposé à des rayonnements ionisants ;

- aucun élément du dossier ne permet d'établir que M. B...faisait partie des personnes intervenant en zone contrôlée au sens de la directive Euratom du 2 février 1959 ;

- les consorts B...ne peuvent utilement invoquer une obligation de sécurité de résultat puisque l'État n'était pas l'employeur de M. C...B... ;

- en l'absence de lien de causalité entre la maladie de M. C...B...et son activité professionnelle, la responsabilité de l'État ne peut être engagée ;

- les consorts B...ne justifient pas du caractère personnel, direct et certain des préjudices qu'ils invoquent ; les sommes demandées sont manifestement excessives et ne sont pas justifiées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2015 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public ;

- et les observations de Me Bouchet-Bossard, avocat des consorts B...;

1. Considérant que M. C...B..., électricien salarié de la société Bastide entre 1971 et 2001, employé sur des chantiers de réparation de bateaux civils et de sous-marins nucléaires de la direction des constructions navales (DCN) du ministère de la défense à Cherbourg, Brest, et Saint-Nazaire, est décédé le 10 octobre 2004 d'une leucémie aigüe lymphoblastique ; que les consortsB..., qui imputent le décès de leur époux et père à son exposition à des rayonnements radioactifs durant son activité professionnelle, ont recherché la responsabilité de l'Etat en tant que maître d'ouvrage au titre de ses manquements dans la surveillance de la sécurité des chantiers et pour ne pas avoir informé les salariés des entreprises sous-traitantes de la DCN des risques liés à l'exposition à la radioactivité ; qu'ils relèvent appel du jugement du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'État à réparer les préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès de M. C...B...;

Sur la responsabilité de l'État :

2. Considérant que M. C...B..., électricien employé de la société Bastide, a été affecté à la DCN de Cherbourg et de Brest en tant que monteur et câbleur entre 1972 et 1984 pour travailler à la construction et à la réparation de sous-marins nucléaires, puis de 1984 à 2001 dans les DCN de Brest et de St Nazaire pour effectuer des travaux électriques sur les sous-marins de l'Ile Longue en qualité d'électricien de bord ; que la demande de reconnaissance de maladie professionnelle formulée par les consorts B...le 5 janvier 2009 à raison de son décès survenu dans les conditions rappelées au point 1 a été rejetée par la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère le 30 juin 2009 en raison de l'absence de preuve d'une exposition de M. C...B..., au cours de son activité professionnelle, à un risque couvert par la législation sur les maladies professionnelles ; que cette décision a été confirmée, après instruction complémentaire, par la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie le 3 février 2011, puis par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Brest par un jugement du 1er février 2013, enfin par la cour d'appel de Rennes le 17 décembre 2014 ; que cette dernière juridiction a estimé que les consorts B...n'établissant pas que

M. C...B...aurait été exposé de façon habituelle aux rayonnements ionisants ou à des produits hémato-toxiques durant sa période d'activité, la leucémie dont il décédé n'était pas d'origine professionnelle ; qu'ainsi, en l'absence de tout lien de causalité établi entre la maladie de M. C...B...et son activité professionnelle et, par voie de conséquence, entre la maladie de l'intéressé et l'activité de l'État à laquelle il avait participé, les consorts B...ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité de l'État, en sa qualité de maître d'ouvrage, du fait d'un quelconque manquement en matière de prévention des risques professionnels ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, que les consorts B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B..., à M. A... B..., au ministre de la défense et à la caisse primaire d'assurance maladie du Finistère.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2015 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller,

Lu en audience publique le 9 avril 2015.

Le rapporteur,

F. LEMOINE

Le président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de la défense en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT03477


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03477
Date de la décision : 09/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP BOUCHET-BOSSARD et L'HOSTIS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-09;13nt03477 ?
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