Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 23 juin 2014 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 14-2798 du 20 novembre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 décembre 2014 et des mémoires enregistrés les 5 et 17 mars 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 novembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 23 juin 2014 ;
3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour en tant qu'étranger malade dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Il soutient que :
- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;
- cet avis est insuffisamment motivé quant à la gravité de sa pathologie, la nature du traitement requis et l'existence d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ;
- le préfet a méconnu sa compétence en s'estimant lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;
- les pièces qu'il produit attestent qu'il doit poursuivre son traitement en France ; le refus de titre est donc entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision litigieuse méconnaît aussi les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 février 2015 et le 9 mars 2015, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le moyen tiré d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et inopérant à l'encontre du refus de délivrer un titre sollicité sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- aucun des autres moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Millet a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.B..., ressortissant congolais, relève appel du jugement du 20 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2014 du préfet d'Indre-et-Loire refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il ressort des termes de la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif d'Orléans que celui-ci n'avait pas explicitement soulevé devant cette juridiction un moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que, par suite, il ne saurait reprocher aux premiers juges d'avoir omis de statuer sur un tel moyen ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3.Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11º A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; que l'article R. 313-22 du même code dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...)" ;
4.Considérant, d'une part, que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé dans son avis du 23 mai 2014 que si l'état de santé du requérant nécessitait une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le traitement était disponible en République du Congo, et qu'il pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine ; que cet avis comporte toutes les précisions qu'il incombait au médecin de l'agence régionale de santé de transmettre, en application de l'arrêté du 9 novembre 2011 précité, pour éclairer la décision du préfet, le secret médical lui interdisant de révéler des informations sur la pathologie de l'intéressé et la nature de ses traitements médicaux, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine ; qu'il suit de là que cet avis était suffisamment motivé et de nature à permettre au préfet d'exercer son pouvoir d'appréciation ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie doit, dès lors, être écarté ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté que le préfet d'Indre-et-Loire se serait estimé lié par cet avis et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;
5.Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a subi un accident cardio-vasculaire en avril 2013, qui a nécessité une hospitalisation jusqu'en janvier 2014 ; que selon le compte-rendu de fin d'hospitalisation établi le 28 janvier 2014, que confirme un compte-rendu de consultation de contrôle, l'état de santé du requérant a favorablement évolué et n'implique plus désormais qu'un traitement médicamenteux de routine et des examens réguliers ; qu'en produisant des ordonnances de prescriptions, un certificat médical relevant la nécessité d'une prise en charge et d'une surveillance constante de sa pathologie et une attestation, postérieure à la décision contestée, d'un médecin de l'hôpital général de Pointe-Noire faisant état de la difficulté d'effectuer dans cet établissement le suivi médical requis par l'état de santé de l'intéressé, M. B...ne remet pas sérieusement en cause l'avis susmentionné du médecin de l'agence régionale de santé du 23 mai 2014 ; que c'est ainsi sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet d'Indre-et-Loire, qui n'avait pas à prendre en considération le caractère effectif de l'accès aux soins de l'intéressé dans son pays d'origine, a refusé de faire droit à la demande de titre de séjour sollicitée par M. B...sur le fondement des dispositions précitées ;
6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., qui est célibataire, est entré en France à une date récente, le 2 mai 2011 ; que s'il fait valoir que sa fille aînée réside désormais régulièrement en Ukraine, il est constant qu'il conserve des attaches familiales dans son pays d'origine, notamment son père et une fille âgée de six ans ; que si M. B...indique être également le père d'une fille née en France le 15 juillet 2012, il n'établit pas participer effectivement à l'entretien et à l'éducation de cet enfant par la seule production d'une attestation de la mère de celle-ci et de quelques bordereaux de virement d'argent liquide postérieurs à la décision contestée ; que, dans ces conditions, le préfet d'Indre-et-Loire n'a pas porté au droit du requérant à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision litigieuse a été prise ;
8. Considérant, en dernier lieu, que si M. B...soutient que l'arrêté litigieux viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, il n'assortit son moyen d'aucune précision de nature à permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
10. Considérant que, dès lors que les conclusions à fin d'annulation de la requête sont rejetées, les conclusions présentées par M. B...à fin d'injonction et sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être également rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- M. François, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 octobre 2015.
Le rapporteur,
J-F. MILLET Le président,
A. PÉREZ
Le greffier,
S. BOYÈRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT03214