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20/09/2019 | FRANCE | N°18NT04535

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 20 septembre 2019, 18NT04535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 15 février 2017 par lequel le préfet du Loiret a refusé de faire droit à la demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse Mme B... F... et ses deux enfants mineurs Amira et Moad, ainsi que la décision du 16 mai 2017 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1703833 du 24 mai 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédur

e devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 décembre 2018, M. D..., représenté par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... D... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 15 février 2017 par lequel le préfet du Loiret a refusé de faire droit à la demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse Mme B... F... et ses deux enfants mineurs Amira et Moad, ainsi que la décision du 16 mai 2017 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1703833 du 24 mai 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 décembre 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 15 février 2017.

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de faire droit à la demande de regroupement familial dans les trente jours de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la motivation retenue par les premiers juges n'est pas satisfaisante ;

- la décision contestée est entachée d'erreur de fait sur la somme des revenus dont il dispose ; le préfet n'a tenu compte ni de tous ses revenus du travail ni des indemnités ;

- ses revenus sont stables ;

- la diminution des revenus, suite à un accident du travail, ne peut être prise en compte car postérieure à la période de référence et s'appuyer sur un tel élément constitue une discrimination ;

- la décision litigieuse porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît le droit fondamental de valeur constitutionnelle de mener une vie familiale normale sur le territoire de la République française ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; compte tenu de son état de santé, le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; il est immobilisé depuis le 23 février 2016 et ne peut ainsi se rendre à l'étranger ; son état de santé s'est dégradé ;

Par un mémoire en défense enregistré le 9 juillet 2019, le préfet du Loiret, représenté par Me G... conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 7 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant marocain né en 1968, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2021, a présenté le 3 mai 2016, une demande d'admission au séjour dans le cadre de la procédure de regroupement familial au bénéfice de sa femme et de deux enfants mineurs, Amira née en 2005 et Mouad né en 2003. Par les décisions du 15 février 2017 et du 16 mai 2017, le préfet du Loiret a rejeté la demande présentée par M. D.... Il relève appel du jugement du 24 mai 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contestées.

2. Aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423 1, L. 5423-2 et L. 5423-8 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : (...) / - cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que pour la période de douze mois précédant sa demande de regroupement familial, soit entre mai 2015 et avril 2016, M. D... qui a justifié avoir perçu, en moyenne par mois, la somme de 1 669,07 euros, démontre que ses revenus étaient suffisants.

4. M. D... est engagé depuis 2015 sous contrat à durée indéterminée par la SARL Immocom pour un salaire brut mensuel de 1 650 euros. Il ressort des pièces du dossier que s'il n'a perçu en moyenne, sur la période de référence, que 964 euros c'est, comme les attestations de son employeur le confirment, du fait de congés sans solde pris à son initiative afin de travailler auprès de sociétés d'intérim. M. D..., dans le cadre de ces contrats a, pour la période de référence, perçu en moyenne, environ 700 euros par mois. Si le préfet du Loiret fait valoir que cette somme ne présente pas un caractère de stabilité suffisante, il ressort des pièces du dossier que le recours au travail intérimaire de M. D... est un choix de gestion qui ne peut remettre en cause l'appréciation sur le caractère stable de ses revenus dès lors que son contrat à durée indéterminée, à lui seul, lui garantit une stabilité financière et que son employeur, dans l'attestation du 19 septembre 2018 indique que ce choix " ne pose aucun problème ". Ainsi, la décision contestée du préfet, refusant à M. D... le bénéfice du regroupement familial au profit de sa femme et de ses deux enfants Amira et Mouad a méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et doit être annulée.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué et les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

6. Eu égard aux motifs de l'annulation prononcée, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet fasse droit à la demande de regroupement familial présentée par M. D... au bénéfice de son épouse Mme B... F... et ses deux enfants mineurs Amira et Moad, sans qu'il y ait lieu de prononcer à cet effet une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

7. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me C... dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mai 2018 et la décision du 15 février 2017 du préfet du Loiret sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur d'admettre au séjour Mme B... F... et ses deux enfants mineurs Amira et Moad dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le versement de la somme de 1 000 euros à Me C... est mis à la charge de l'Etat dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2019, où siégeaient :

- M. Perez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2019.

Le rapporteur,

T. A...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT04535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04535
Date de la décision : 20/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SCP MADRID CABEZO FOUSSEREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-09-20;18nt04535 ?
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