Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... ont tous deux demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions du 16 octobre 2018 par lesquelles le préfet du Finistère a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français.
Par deux jugements n°1805265 et n° 1805266 du 16 janvier 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes de M. et Mme C....
Procédure devant la cour :
I) Par une requête enregistrée le 15 février 2019, sous le n° 1900676, Mme C..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2019 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler la décision du 16 octobre 2018 du préfet du Finistère ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au profit de son avocat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de lui refuser le séjour et l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle réside en France de manière stable depuis 2010, qu'elle a régulièrement travaillé pour subvenir aux besoins de sa famille et ce alors même que la qualité de travailleur handicapé lui a été reconnue et qu'elle s'implique fortement dans le milieu caritatif local ; ses enfants sont scolarisés en France ;
- la décision de lui refuser le séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- le préfet n'a pas porté une attention suffisante à la situation de ses enfants mineurs et la décision de lui refuser le séjour méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2019, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé.
II) Par une requête, enregistrée le 15 février 2019, sous le n° 1900677, M. C..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 janvier 2019 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du 16 octobre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son avocat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de lui refuser le séjour et l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il réside en France de manière stable en France depuis 2010 et que ses enfants sont scolarisés en France ;
- les peines pour lesquelles il a été condamné ont été converties en un travail d'intérêt général et il n'a pas causé d'atteinte à l'ordre public depuis 2017 ;
- le centre de ses intérêts privés et familiaux se trouve désormais en France ;
- la décision de lui refuser le séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 avril 2019, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par le requérant n'est fondé.
M. et Mme C... ont tous deux été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 11 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante géorgienne est entrée en France selon ses déclarations le 9 août 2010, accompagnée de ses deux enfants mineurs. Elle a été rejointe en octobre de la même année par son époux de même nationalité. Leurs demandes d'asile ont été rejetées en février 2012 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a confirmé ces décisions en janvier 2014. Ayant sollicité en mai 2013 la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales, Mme C... s'est vue délivrer une autorisation provisoire de séjour, puis une carte de séjour temporaire venant à expiration le 18 mai 2017. Elle en a sollicité en avril 2017 le renouvellement, avant de demander, en décembre 2017, un changement de statut, sollicitant alors son admission au séjour sur le double fondement des articles L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. C... a également formé en décembre 2017 une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour sur ce même fondement. Par deux arrêtés du 16 octobre 2018, le préfet du Finistère a refusé de faire droit à ces demandes, en assortissant ses décisions d'une obligation de quitter le territoire français. M. et Mme C... relèvent chacun appel des jugements en date du 16 janvier 2019 par lesquels le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions les concernant.
2. Les présentes affaires sont relatives à la situation des membres d'une même famille, posent à juger des questions de droit identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une décision unique.
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que les emplois successivement occupés par Mme C... ont, à chaque fois, présenté un caractère temporaire et ne sauraient de ce fait attester d'une insertion professionnelle de l'intéressée. Si Mme C... se prévaut de sa qualité de travailleur handicapé, elle ne produit aucun document attestant de la réalité d'une telle allégation. En outre, si elle soutient que sa cellule familiale est stable et que tous les membres de la famille résident depuis plusieurs années en France de manière interrompue, il ressort des pièces du dossier que M. C... a été condamné à plusieurs reprises entre 2014 et 2017, notamment pour des faits de vol en réunion, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui, conduite de véhicule sous l'emprise d'un état alcoolique, conduite d'un véhicule sans permis et outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique. Ainsi, M. C... ne saurait être regardé comme inséré dans la société française. De plus, M. et Mme C... ne démontrent pas en quoi ils seraient dans l'impossibilité de reconstituer leur cellule familiale en Géorgie, la circonstance que leurs filles sont scolarisées en France ne s'opposant pas à la poursuite de leur scolarité en Géorgie, pays où elles sont nées et ont vécu plusieurs années. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet du Finistère a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des éléments mentionnés au point 4 que le moyen tiré de l'atteinte excessive portée à la vie privée et familiale de M. et Mme C... doit également, pour les mêmes motifs, être écarté.
7. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. Il ressort des pièces du dossier que les décisions contestées n'ont pas pour effet de séparer les membres de la famille que forment M. et Mme C... et leurs deux enfants, qui ont la possibilité de poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine. Ainsi doit être écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés du 16 octobre 2018 pris à leur encontre par le préfet du Finistère. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E:
Article 1er : Les requêtes de M. C... et de Mme C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme E... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme G..., présidente,
- M. B..., premier conseiller,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique le 4 octobre 2019.
Le rapporteur
A. B...
La présidente
N. G... Le greffier
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19NT00676,19NT00677